samedi 22 novembre 2008

Esaïe 65.17-25



Frères et sœurs, nous voici à l’avant dernier dimanche du temps de l’Eglise. Pendant un an, le Seigneur nous a conduits à travers sa Parole pour nous instruire et nous fortifier. Cinquante deux fois, du haut ce cette chaire, vous aurez entendu développer et proclamer la Bonne Nouvelle du salut en Jésus-Christ. La liturgie pour aujourd’hui nous invite à lever les yeux vers le ciel : la course est presque achevée, le combat est bientôt fini : le repos de nos âmes est là, tout proche.
Le livre de l’Apocalypse est intarissable sur le sujet. Sans doute connaissez-vous aussi des passages des évangiles ou des épîtres qui nous auraient très bien guidés dans cette réflexion. Mais il m’a semblé important de vous enseigner ce matin à partir d’une prophétie de la première alliance. L’Evangile, chers amis, est l’annonce de la délivrance finale qui nous sera accordée en Christ, et cet évangile brillait déjà de façon splendide dans la Bible des Hébreux.
Voici, dit Dieu par la bouche du prophète Esaïe : « Je vais créer de nouveaux cieux et une nouvelle terre » ! Vous ne souffrirez plus ; vous ne travaillerez plus en vain ; la nature elle-même vous sera favorable !
I
Premier point de cette méditation : vous ne souffrirez plus…
L'Eternel invite tous les croyants à se réjouir. Qu’est-ce que je dis ? A jubiler, oui ! « Réjouissez-vous – dit-il- et soyez dans l'allégresse, car je vais créer Jérusalem pour l'allégresse et son peuple pour la joie ! Je vais créer de nouveaux cieux et une nouvelle terre.... Je ferai de Jérusalem mon allégresse et de mon peuple ma joie ».
De quelle Jérusalem le prophète parle-t-il ? S’agit-il de la capitale actuelle de l’Etat d’Israël, partagée entre chrétiens, juifs, arméniens et musulmans ? S’agit-il de la « ville éternelle » que domine le dôme étincelant de la mosquée d’Omar ? Certainement pas. Depuis les premiers écrits du Nouveau Testament, Jérusalem a cessé de désigner une ville faite de pierres et de briques. Jérusalem est le symbole de la maison du Père. Le peuple qui y habite n’est plus descendant d’Abraham selon la chair, mais selon l’Esprit. La Jérusalem céleste, c’est l'ensemble de tous les rachetés depuis le commencement de l'histoire de l'Eglise.
Trois fois de suite, dans ce beau texte, Dieu nous dit : « Réjouissez-vous » ! Pourquoi ? Parce qu’il nous a préparé quelque-chose de formidable. Jésus disait, en parlant de notre vie future : « Lorsque je m'en serai allé, et que je vous aurai préparé une place, je reviendrai, et je vous prendrai avec moi, afin que là où je suis, vous y soyez aussi ». Comprenez bien, frères et sœurs : tout ce que Dieu fait est parfait. La dernière étape de notre vie de chrétien ressemblera à toutes les autres : elle portera la signature de Dieu, tout comme notre élection, notre justification, notre baptême et notre vie chrétienne. Soyons certains que cette vie éternelle sera géniale et dépassera notre attente !
L'homme a créé des édifices grandioses et magnifiques sur la terre, mais ce projet là – précisément – n’est pas pour cette terre et l’homme n'est pas capable d’en concevoir les plans. Il lui transmettrait les imperfections de sa nature humaine, et le limiterait aux dimensions de sa propre imagination.
La nouvelle Jérusalem, au contraire, sera à l’échelle des perfections divines. C’est parfois difficile d’expliquer à quelqu’un le bonheur qui l’attend quelque part. Alors, pour rendre les choses plus parlantes, on commence par dire ce qui va changer, ce à quoi on va échapper : « On ne se rappellera plus les choses passées – dit Esaïe -, elles ne reviendront plus à l'esprit... On n'y entendra plus le bruit des pleurs et des cris ».
Pourquoi Dieu place-t-il « les pleurs et les cris » parmi le souvenir des choses passées ? D’abord, n’oubliez pas qui vous parle. Le règne relativement paisible d’Osias avait été suivi d’une série de calamités. Peu après, le roi d’Israël, allié à celui de Damas, avait tenté de renverser le royaume de Juda, et cette guerre fratricide s’était prolongée très longtemps… C’est alors qu’Esaïe annonce la chute des ennemis de Juda et l’accroissement de la puissance Assyrienne. En 722 av. Jésus-Christ, Samarie n’est plus que ruines ; vingt ans plus tard, Sennachérib envahit Juda et fait le siège de Jérusalem… Les contemporains d’Esaïe savent donc ce qu’est le prix du sang et des larmes…
De même, ceux qui ont vécu les bombardements des guerres, qui ont subi le bruit des avions, des sirènes n'oublient jamais. Ceux qui ont connu l'enfer des camps de concentrations en gardent une marque indélébile. Ceux qui vivent les attentats dans leur chair sont marqués à vie. Bien sûr la vie continue, mais le souvenir en reste souvent brûlant et finit toujours, même après des années, à arracher des larmes, à susciter des cauchemars, à réveiller de terribles angoisses.
Aujourd’hui, nous sommes Français, Européens et nous traversons la période de paix la plus longue de notre histoire. Cela n’a pas toujours été le cas et nous devons en remercier le Seigneur. Mais il n’est pas nécessaire d’être le rescapé d’un massacre pour que la vie soit une survie et la mémoire, une plaie ouverte.
Imaginez une vie éternelle où l’on garderait les traumatismes de son existence : celui d’un homicide, d’un viol, d'un mariage gâché, d’une séparation, d'une famille décimée, d'un grave accident de voiture, d'une foule de regrets et d’occasions manquées. Tout cela est incompatible avec la joie éternelle. Le prophète répond : « On ne se souviendra plus des choses passées ».
Ici, vous avez un exemple très concret du perfectionnisme de Dieu. Vous remarquerez que le prophète ne dit pas : « ces choses n’existeront plus », mais « on ne s’en souviendra plus », ce qui est très différent. Quand les autres vous ont fait souffrir, on voudrait bien oublier, mais on n’y arrive pas toujours. L’oubli rend possible le pardon, le repos de l’âme. Dieu effacera, avec nos larmes, le souvenir même de l’offense, de la misère et du deuil.
Remarquez au passage que notre monde est contraint de faire l'inverse : nous venons de commémorer l’armistice du 11 novembre 1918. Il y a quatre-vingt dix ans exactement cessait la plus effroyable boucherie du XXe siècle. Alors on ressuscite les cauchemars – en technicolor, on évoque dans les journaux les atrocités, les holocaustes et les abominations en ajoutant : plus jamais çà ! C’est la pédagogie humaine et nécessaire de ce monde. Il n'empêche qu'on est glacé d’horreur devant ce que l’homme est capable d’accomplir, et cela depuis le commencement.
Dans le paradis de Dieu, le souvenir de ce monde sera totalement effacé. Il n'y aura plus de jours gris, plus de mélancolie ni de sanglots au fond d’un lit, plus de rêves angoissants car on ne se rappellera plus les choses passées.
Le prophète annonce une autre différence : « Il n'y aura plus ni enfants ni vieillards qui n’accomplissent leurs jours ; Car celui qui mourra à cent ans sera jeune ».
Qu’est-ce que cela veut dire ? Certains n’ont pas eu la chance de voir vieillir leurs parents. D’autres assistent bouleversés et impuissants à leur lente décrépitude. On les a connus forts, actifs, entreprenants ; les voici qui se traînent, pleins d'infirmités, menant au ralenti une vie faite de privations, de frustrations et de regrets.
Mais au ciel, Dieu nous réserve une autre joie : le vieillard sera comme le jeune homme. Il n'y aura plus de vieillesse, plus d'infirmité ni de mort.
Ce sera finalement un retour à l’état originel, puisque l’homme avait été créé immortel. L’horloge biologique, telle que nous la connaissons, ne s’est mise en route qu’après la chute. La « nouvelle terre » que Dieu va créer sera semblable à la toute première : les conséquences du péché auront disparu. La vieillesse et la mort ne seront plus.
Cette mort aveugle, qui frappe aussi bien les enfants que les vieillards. Et quand on voit un enfant mourir tandis qu'un vieux tyran semble éternel, on se demande où est la justice de Dieu.
C’est pourquoi Esaïe ajoute : « le pécheur âgé de cent ans sera maudit ».
Frères et sœurs, cette phrase peut surprendre car l’on associe généralement l’âge et la sagesse. Mais devant Dieu, la vieillesse n'est pas le critère d'une vie juste et bénie. Que personne ne s'imagine donc que les cheveux blancs ont un quelconque mérite devant Dieu !
Bien plus : ce centenaire que Dieu maudit, est en réalité un homme – ou une femme – qui durant un siècle entier aura été appelé par l’Esprit. Oui ! Un siècle d’appels à la repentance et la foi, obstinément renouvelés par le témoignage des chrétiens ! Pour obtenir quoi ? Un refus ! Je ne voudrais pas être à la place de tous ces vieillards au jour du Jugement, auxquels le Seigneur déroulera la longue – la très longue – liste de toutes les circonstances favorables qu’il avait placées sur leur chemin pour entendre l’Evangile et qu’ils ont toujours méprisées. Cela doit être terrible de prendre conscience, alors qu’il est trop tard, d’un aveuglement aussi obstiné…
II
Vous ne souffrirez plus, dit le Seigneur ; et vous ne travaillerez plus en vain.
Le prophète dévoile maintenant un autre coin du Paradis : « Ils bâtiront des maisons et les habiteront ; ils planteront des vignes et en mangeront les fruits. Ils ne bâtiront pas des maisons pour qu'un autre les habite, ils ne planteront pas des vignes pour qu'un autre en mange les fruits. Car les jours de mon peuple seront comme les jours des arbres, et mes élus jouiront de l'œuvre de leurs mains. Ils ne travailleront pas en vain, et ils n'auront pas des enfants pour les voir périr. Car ils formeront une race bénie de l'Eternel, et leurs enfants seront avec eux ».
Frères et sœurs, beaucoup de choses, ici-bas, nous gâchent la vie et le plaisir de travailler, d'économiser et de construire : il y a le stress et la crainte du chômage, bien sûr. Le risque de l’accident, de l’infirmité ; préparer l’avenir avec la menace de la maladie est une idée angoissante bien exploitée par les compagnies d’assurance. De même, travailler pour voir tomber le fruit de son travail entre les mains d’autrui est révoltant.
Et puis, il y a tous les parents qui ressemblent au père de la parabole, dont le fils ou la fille coupe les ponts et part faire sa vie ailleurs. Avec en prime des reproches que l’on prend en pleine figure, sur l’éducation que l’on a donnée, les valeurs que l’on s’est efforcé de transmettre. L’un de ces parents me disait un jour : c’est pire que si mon enfant était mort : son silence est une grande souffrance.
Tout cela donne un goût amer à la vie et au travail.
Mais voici le message qui nous vient de l’Evangile : « Vous habiterez vos maisons, vous mangerez le fruit de vos vignes, vous ne travaillerez pas pour rien et vos enfants seront toujours avec vous ». Au ciel, il n'y aura plus de déchirure qui gâche le bonheur. Au ciel, on ne parlera plus avec regret, en disant : j'aurai tant voulu achever ce travail, pour que mon fils ou ma fille en profite.
Parents et enfants, par la foi, seront éternellement bénis. Notre vie, dit le prophète, sera comme le jour des arbres : ils semblent ne pas mourir et portent des fruits très longtemps.
Pour confirmer et rendre solide ce qu'il vient de dire, Esaïe ajoute, de la part de Dieu : « Avant qu'ils m'invoquent, je répondrai ; avant qu'ils aient cessé de parler, j'exaucerai ». Où trouvons-nous l’assurance de voir se réaliser tout ce que nous venons d'entendre ? En Dieu lui-même. Et en Christ notre Sauveur. Il va au-devant de nos prières pour nous donner ce qu'il a de meilleur.
« Je vais créer de nouveaux cieux et une nouvelle terre », dit le Seigneur. Là, vous ne souffrirez plus ; vous ne travaillerez plus en vain ; et enfin : la nature elle-même vous sera favorable.
III
Le dernier tableau de la Jérusalem céleste est animalier ; on en voit des représentations dans tous les musées. C’est une image saisissante : « Le loup et l'agneau brouteront ensemble, le lion comme le bœuf, mangera de la paille, et le serpent aura la poussière pour nourriture ».
Frères et sœurs, on entend parfois que les prophéties ont toujours un premier temps d’accomplissement sur cette terre. Les théologiens libéraux affirment même que des prophéties qui concerneraient uniquement notre salut n’existent pas. Mais dites-moi un peu comment ces paroles d’Esaïe pourraient se réaliser ici bas ? Ecoutez cette autre description du paradis céleste, du même auteur : « Le loup habitera avec l'agneau, et la panthère se couchera avec le chevreau ; le veau, le lionceau et le bétail qu'on engraisse seront ensemble, et un petit enfant les conduira. La vache et l'ourse auront un même pâturage, leurs petits un même gîte. Le nourrisson s'ébattra sur le nid de la vipère et l'enfant sevré mettra sa main dans l'antre du cobra". (Esaïe 11:6,7).
Plus d'un enfant, en entendant ce texte, a rêvé de pouvoir jouer avec une panthère, d’apprivoiser un ours ou simplement le rouge-gorge du jardin.
Le prophète insiste : là-haut, tout sera vraiment différent.
Peut-être avez-vous en mémoire ces mots de Paul : « La création attend avec impatience la révélation des fils de Dieu. Car elle a été soumise à la vanité, avec l’espérance qu’elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption, pour avoir part à la liberté des enfants de Dieu. Jusqu’à ce jour, nous savons que la création tout entière soupire et souffre comme une femme qui accouche ».
En d’autres termes, la flore et la faune ont subi par ricochet le désastre du péché. De la même manière qu’elles partagent la souffrance des chrétiens, elle aspire à entrer dans ce monde qui doit renaître. Comprenez que nous avons une dette envers la création, comme auprès d’un ami qui aurait beaucoup souffert du fait de notre inconséquence ou de nos erreurs. Ne l’oublions pas.
Dans cette nouvelle création, le monde animal ne sera plus hostile à l'homme. On n’assistera plus à cette lutte impitoyable pour la vie. Il n’y aura plus de « fêtes sauvages », pour reprendre le titre d’un film paru il y a bien longtemps, « fêtes » d’angoisse, de souffrance et de mort dans les forêts, les jungles et les savanes. On ne verra plus de chasseurs ni de chiens, plus de pièges ni de filets. Auprès de Dieu, tout est source d'une vie paisible, calme, merveilleuse, tranquille, pleine de sérénité et de joie, y compris pour les animaux.
Bien plus : vous savez que notre société est secouée régulièrement par de multiples émeutes. Eh bien ! Si j’en crois ce qui est dit ici, le mal être des banlieues, l’agressivité d’une jeunesse désœuvrée seront résolus dans la Jérusalem céleste : « Il ne sera fait ni tort ni dommage sur toute ma montagne sainte », dit l'Eternel. Ainsi, plus de commissariat ni de CRS au paradis : la haine, l’envie, la convoitise auront été laissées au vestiaire du tombeau et leur souvenir même ne paraîtra plus.
Chers amis, tout ce que nous venons d'entendre n'est pas le fruit d'une superproduction de Walt Disney ! Nous n'avons pas entendu aujourd'hui un récit fait d'exagérations et de phantasmes, mais le témoignage de Dieu sur la vie éternelle. Il doit nous donner envie d’y aller, surtout lorsque la tristesse et le découragement nous envahissent.
Un bonheur parfait nous est préparé. Soyons fermes dans la foi ! Jésus nous a rachetés à grand prix pour que nous soyons toujours heureux auprès de lui. Amen !

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