dimanche 15 février 2009

2 Rois 5.1-14

Naaman se purifiant dans le Jourdain
2 Rois 5.1-14


1 Naaman, le général en chef de l'armée du roi de Syrie[
a], était un homme que son maître, le roi de Syrie, tenait en haute estime et auquel il accordait toute sa faveur, car, par lui, l'Eternel avait accordé la victoire aux Syriens. Hélas, ce valeureux guerrier était lépreux[b]. 2 Or, au cours d'une incursion dans le territoire d'Israël, des troupes de pillards syriens avaient enlevé une petite fille. A présent, elle était au service de la femme de Naaman. 3 Un jour, elle dit à sa maîtresse:---Si seulement mon maître pouvait aller auprès du prophète qui habite à Samarie! Cet homme le guérirait de sa lèpre. 4 Naaman répéta au roi les propos de la jeune fille du pays d'Israël. 5 Alors le roi de Syrie lui dit:---C'est bien! Rends-toi là-bas. Je vais te donner une lettre pour le roi d'Israël[c].Ainsi Naaman se mit en route, emportant trois cent cinquante kilos d'argent, soixante-dix kilos d'or et dix vêtements de rechange. 6 Arrivé à Samarie, il remit au roi d'Israël la lettre dans laquelle il était dit: «Tu recevras ce message par l'intermédiaire de mon général Naaman que je t'envoie pour que tu le guérisses de sa lèpre.» 7 Quand le roi d'Israël eut pris connaissance du contenu de cette lettre, il déchira ses vêtements[d] et s'écria:---Est-ce que je suis Dieu, moi? Est-ce que je suis le maître de la vie et de la mort pour que cet homme me demande de guérir quelqu'un de sa lèpre? Reconnaissez donc et voyez qu'il me cherche querelle. 8 Lorsque Elisée, l'homme de Dieu, apprit que le roi d'Israël avait déchiré ses vêtements, il lui fit dire:---Pourquoi as-tu déchiré tes vêtements? Que cet homme vienne donc me voir et il saura qu'il y a un prophète en Israël. 9 Naaman vint donc avec ses chevaux et son char, et attendit devant la porte de la maison d'Elisée. 10 Celui-ci lui fit dire par un envoyé: ---Va te laver sept fois dans le *Jourdain et tu seras complètement purifié. 11 Naaman se mit en colère et il s'en alla en disant:---Je pensais que cet homme viendrait en personne vers moi, qu'il se tiendrait là pour invoquer l'Eternel, son Dieu, puis qu'il passerait sa main sur la partie malade et me guérirait de ma lèpre.12 Les fleuves de Damas, l'Amana et le Parpar[e], ne valent-ils pas mieux que tous les cours d'eau d'Israël? Ne pourrais-je pas m'y baigner pour être purifié? Il fit donc demi-tour et partit furieux.13 Mais ses serviteurs s'approchèrent de lui pour lui dire: ---Maître, si ce prophète t'avait ordonné quelque chose de difficile, ne le ferais-tu pas? A plus forte raison devrais-tu faire ce qu'il t'a dit, s'il ne te demande que de te laver dans l'eau, pour être purifié. 14 Alors Naaman descendit dans le *Jourdain et s'y trempa sept fois, comme l'homme de Dieu le lui avait ordonné, et sa chair redevint nette comme celle d'un jeune enfant: il était complètement purifié.




Naaman. Voilà un nom qui dit quelque chose. C'est un héros de guerre, un stratège reconnu, un homme qui est un proche du Roi de Syrie, un des hommes les plus puissants de la région. Comme nous allons le voir, Naaman est aussi riche. Très riche. Mais il y a autre chose dans la vie de Naaman. Il est lépreux. Regardez bien Naaman. Remarquez, ce n'est guère compliqué de le regarder: Presque tout notre texte est centre sur son histoire.
Il y a en revanche un autre personnage, très important, qui demeure très discret. C'est la petite fille. On peut difficilement imaginer un fossé plus grand que celui qui sépare ces deux êtres.

Il est un homme puissant. Elle n'est qu'une petite fille.
Il est général en chef d'une armée victorieuse. Elle n'est qu'une prisonnière de guerre.
Il a la puissance. Elle n'est qu'une esclave.
Il connaît la gloire. D'elle, nous ne connaîtrons même pas le nom.
Il est un homme de violence. Elle est un être compassionné, qui ne voit pas en Naaman un ennemi mais un humain qui souffre et auquel elle peut montrer le chemin de la guérison.
Il a tout. Elle n'a rien, à part une chose: son témoignage "il y a un prophète en Samarie qui peut guérir mon maître".

Et c'est bien ce dernier point qui donne sa force à notre histoire. C'est l'initiative de la petite fille et son témoignage qui vont mener Naaman vers la guérison. Mais le voyage vers la guérison sera long pour Naaman. Ce voyage, ce n'est pas seulement celui qui mène de la Syrie au seuil d'Elisée via le palais du roi d'Israël. C'est un voyage entre deux mondes totalement différents dont Naaman et l'enfant sont les symboles.
Naaman quitte son pays, mais il ne quitte pas son monde. Dans ce monde là, la puissance (et notamment la puissance de l'argent) permet tout. Il part Naaman, avec ses luxueux vêtements; son or (pour plus d'1 600 00 d'€ actuels) son argent (40 millions d'€ actuels), son influence qui lui permet d'être reçu par un roi. Et c'est bien sur tout qu'il compte pour se tirer d'affaire.

Mais tout ça n'affole pas Elisée. Le général peut être reçu par le roi, mais le roi ne veut même pas le rencontrer. Tout ce qu'il a à dire, c'est Va te laver sept fois dans le Jourdain et tu seras complètement purifié.
Le statut de Naaman et sa faàon de faire n'impressionnent pas Elisée. Pour lui, il n'est qu'un autre lépreux parmi d'autres. La maladie, comme la mort, rend les hommes égaux. Naaman, bien sûr, est outragé. IL veut que sa guérison soit quelque chose qu'il peut gagner comme une nouvelle bataille, qu'il peut se payer. Mais Elisée reste de marbre "va au Jourdain". Naaman, quitte ton mande pour entrer dans celui de Dieu, ce monde où cette rivière sale qu'est le Jourdain deviendra pour toi le fleuve de vie. C'est dans ce monde de Dieu où les puissant tombent de leurs trônes et où les humbles de cœur hériteront la terre!
Vous voyez, c'est là que se tient le cœur de notre histoire. Ce n'est pas un autre récit d'un lépreux guéri. C'est la rencontre, la collision de deux mondes. Le monde la puissance humaine de Naaman, et le monde de la puissance de Dieu, qui se manifeste par l'intermédiaire de moins que rien comme la petite fille et Elisée.

Nous aussi, nous sommes pris dans ce conflit entre deux mondes. Le monde de la force, des gagnants, le monde où si l'on veut quelque chose il faut pouvoir y mettre le prix. Et le monde de Dieu, son Royaume, qui fonctionne selon l'étalon de la grâce et qui bannit toute notion de mérite. Le péché nous rend tous lépreux. Mais nous n'avons pas besoin d'aller chercher à acheter le pardon, avec à la main les lingots dévalués de nos bonnes œuvres. Le pardon, Dieu nous le donne gratuitement, et il manifeste la purification de nos fautes dans l'eau du baptême, tout comme Naaman n'a eu qu'à se plonger dans l'eau du Jourdain.

Il y a dans le texte hébreu un jeu de mots que nos traductions essaient de rendre. Quand il est dit que la chair de Naaman redevient saine comme celle d'un jeune enfant, le terme pour "jeune enfant" est très proche de celui qui veut dire…"petite fille". Ici, l'auteur, malicieusement veut nous faire comprendre que Naaman a dû se devenir comme la petite fille. Pour nous cela évoqué bien sûr ces paroles de Jésus en Matthieu "Je vous le dis en vérité, si vous ne vous convertissez et si vous ne devenez pas comme des petits enfants, vous n'entrerez pas dans le Royaume des Cieux" (Mt 18.3) car "le Royaume des Cieux est pour ceux qui leur ressemblent". Oui, pour entrer dans le Royaume des Cieux il faut avoir cette simplicité, cette humilité, cette certitude de l'amour paternel et aussi cette vulnérabilité qui caractérise les enfants.
Alors, retournons vers cette petite fille, et demandons-nous si elle peut représenter quelque chose pour l'Eglise dans nos pays. Je crois que oui.

A première vue, de nouveau, nous n'avons qu'une enfant sans puissance exilée dans un pays étranger où l'on ne respecte pas son Dieu. Mais regardons y à deux fois.
Elle n'est pas sans puissance. Elle a la force de son témoignage tranquille, un témoignage rendu à un Dieu qu'elle connaît personnellement et qui est capable de mettre à bas le monde si sûr de lui d'un Naaman.

Et nous citoyens du Royaume des cieux, c'est la même chose: nous vivons dans ce monde qui n'est pas vraiment notre pays, dans une société qui chaque jour rejette de plus en plus la Parole de Dieu. Il est loin le temps où l'Eglise pouvait se vêtir des beaux vêtements de son influence dans la société et parader avec sa richesse financière. Il faut accepter le fait que l'Eglise aujourd'hui est insignifiante et pauvre. Il faudra bien en tirer les conclusions pour la vie de nos communautés et surtout pour nos propres vies de chrétiens. Mais cette "pauvrette église" comme le disait Jean Calvin peut comme la petite fille louer son Dieu et lui rester fidèle en témoignant de la force de son amour. C'est la seule chose qui nous est demandée, c'est la seule qui doit compter pour nous, et c'est Dieu qui y veillera, car il nous a dit "ma grâce te suffit, car ma puissance s'accomplit dans la faiblesse" (2 Co 12.9).

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