Le scrutin européen qui va avoir lieu dimanche prochain n'a guère provoqué l'enthousiasme des électeurs. Il a au moins été à l'origine d'une initiative du CPDH (Comité Protestant Evangélique pour la Dignité Humaine), qui a fait parvenir aux différents partis en lice un questionnaire destiné à guider le vote des Chrétiens.
Cette initiative est problématique à plusieurs problèmes et pourrait ouvrir la porte à certaines dérives malvenues. Voici pourquoi:
-Le questionnaire du CPDH comporte 4 questions. Elles portent sur le statut du foetus, l'euthanasie, le mariage et l'adoption homosexuels et la notion d'héritage chrétien de l'Europe.
Ces thématiques ont une orientation qui est au moins reconnaissable au premier coup d'oeil. Mais on se demande pourquoi elles ont seules été mises en avant, alors que d'autres sujets fondamentaux (refonte du capitalisme, écologie, partage des richesses, sauvegarde de la protection sociale) ont été totalement oubliés par le CPDH. Ou alors, est-ce que l'organisation considère qu'ils ne concernent pas la "dignité humaine"?
-De quel droit le CPDH se permet-il d'agir au nom de chrétiens protestants et/ou évangéliques? A t'il été mandaté par une quelconque église?
-Il est un peu ironique de voir le CPDH se référer au "lobbying homosexuel" quand on découvre qu'il est lié au groupe CARE, dont on comprend d'emblée être un lobby chrétien évangélique oeuvrant à Bruxelles.
-Fondamentalement, le problème est qu'on sent que le modèle du CPDH reste peu ou prou celui de la Droite Chrétienne évangélique américaine, qui a fourni depuis trente ans des alliés aussi aveugles que zélés au Parti Républicain. Mais nous sommes en France, République laïque où un sondage récent a révélé que plus de 80% de la population rejete l'intrusion du religieux en politique. Et, où, au passage, les évangéliques ne représentent que 0,50% des habitants.
Il est surtout navrant (et celà, Jacques Ellul l'a bien montré) de voir les Chrétiens courir après l'influence politique en ayant recours aux mêmes moyens que le Monde. La théologie luthérienne, elle, a toujours distingué le domaine temporel et le domaine spirituel, en affirmant que l'Eglise n'a à se préoccuper que de ce dernier. Cette position, notre Eglise la tire de la Bible. Tous les enragés de politique, de gauche comme de droite, la lui ont reprochée. Mais, quand on contemple les résultats qu'ont pu donner l'intrusion de l'Eglise dans la sphère publique et la politisation des sermons, on se dit que c'est là un de nos plus grands trésors.
Pascal Montabert
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