samedi 3 avril 2010

Luc 24.13-35 (Pâques)




13 Ce même jour, deux disciples se rendaient à un village appelé Emmaüs, éloigné de Jérusalem d'une douzaine de kilomètres.14 Ils discutaient ensemble de tout ce qui s'était passé. 15 Pendant qu'ils parlaient et discutaient, Jésus lui-même s'approcha et fit route avec eux, 16 mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître.17 Il leur dit: «De quoi parlez-vous en marchant, pour avoir l'air si tristes?»18 L'un d'eux, un dénommé Cléopas, lui répondit: «Es-tu le seul en séjour à Jérusalem qui ne sache pas ce qui y est arrivé ces jours-ci?» 19 «Quoi?» leur dit-il. Ils lui répondirent: «Ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth, qui était un prophète puissant en actes et en paroles devant Dieu et devant tout le peuple,20 et comment les chefs des prêtres et nos magistrats l'ont fait arrêter pour qu'il soit condamné à mort et l'ont crucifié.21 Nous espérions que ce serait lui qui délivrerait Israël, mais avec tout cela, voici déjà le troisième jour que ces événements se sont produits. 22 Il est vrai que quelques femmes de notre groupe nous ont beaucoup étonnés. Elles se sont rendues de grand matin au tombeau23 et n'ont pas trouvé son corps; elles sont venues dire que des anges leur sont apparus et ont annoncé qu'il est vivant.24 Quelques-uns des nôtres sont allés au tombeau et ils ont trouvé les choses comme les femmes l'avaient dit, mais lui, ils ne l'ont pas vu.»25 Alors Jésus leur dit: «Hommes sans intelligence, dont le coeur est lent à croire tout ce qu'ont dit les prophètes!26 Ne fallait-il pas que le Messie souffre ces choses et qu'il entre dans sa gloire?»27 Puis, en commençant par les écrits de Moïse et continuant par ceux de tous les prophètes, il leur expliqua dans toutes les Ecritures ce qui le concernait.28 Lorsqu'ils furent près du village où ils allaient, il parut vouloir aller plus loin,29 mais ils le retinrent avec insistance en disant: «Reste avec nous car le soir approche, le jour est [déjà] sur son déclin.» Alors il entra pour rester avec eux.30 Pendant qu'il était à table avec eux, il prit le pain et, après avoir prononcé la prière de bénédiction, il le rompit et le leur donna.31 Alors leurs yeux s'ouvrirent et ils le reconnurent, mais il disparut de devant eux.32 Ils se dirent l'un à l'autre: «Notre coeur ne brûlait-il pas en nous lorsqu'il nous parlait en chemin et nous expliquait les Ecritures?»33 Ils se levèrent à ce moment même et retournèrent à Jérusalem, où ils trouvèrent les onze et les autres qui étaient rassemblés34 et qui leur dirent: «Le Seigneur est réellement ressuscité et il est apparu à Simon.»35 Alors les deux disciples racontèrent ce qui leur était arrivé en chemin et comment ils l'avaient reconnu au moment où il rompait le pain.



Chers frères et sœurs,
Chers amis,

Il y a dans le langage typique de certains milieux chrétiens une expression "rencontrer le Christ" qui évoque une expérience vécue de découverte de Christ. Comme beaucoup d'expressions toutes faites, elle a le don de m'énerver, mais nous devons bien admettre qu'elle est vraie. Rencontrer le Christ vivant n'est pas une option pour un croyant. Etre Chrétien, c'est rencontrer le Christ ressuscité, et les récits qui racontent les apparitions du Christ vivant à ses disciples après le matin de Pâques en témoignent encore et encore.

Je voudrais avec vous méditer sur l'histoire de ces deux "pèlerins" sur la route d'Emmaüs ce matin. Nous ne savons presque rien d'eux, à part un nom, Cléopas. Nous ne savons pas s'il s'agit de deux amis ou d'un couple, mari et femme. Nous ne savons pas d'ailleurs précisément où se trouvait le village d'Emmaüs. En fait, qu'importe? En l'occurrence, je crois que tout ce flou sur les détails nous aide aussi à nous identifier à ses deux disciples qui cheminent ensemble ce matin là.

Ils discutaient ensemble de tout ce qui s'était passé dit Luc, et sans doute leur dialogue était-il lourd et triste. Ils parlent de la mort de Jésus, et de cette histoire incroyable de tombe vide qu'on leur a rapportée avant qu'ils ne quittent Jérusalem. Une histoire qu'ils ne savaient pas trop comment expliquer mais que, de toute évidence, ils n'ont pas crue. Voilà pourquoi ils s'en vont, le cœur lourd, amer et déçu. C'est à ce moment là que Jésus se met à marcher avec eux. Et c'est là une première bonne nouvelle pour nous: savoir que quand nous sommes en train de nous battre avec le doute, quand nous essayons de trouver un sens à notre vie, quand nous devons faire face à la déception et à la tristesse, Jésus est là, avec nous. En Esaïe, Dieu dit "j'habite dans les hauteurs et la sainteté, mais je suis avec l'homme brisé et abattu, afin de redonner vie au cœur abattu" (57.15).
Oh, bien sûr, les deux disciples ne reconnaissent pas Jésus. Luc nous précise "leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître". Empêchés par leurs propress tristeses et leurs manques de foi? Peut-être. Mais aussi et surtout, je crois, au risque de vous choquer, empêchés par Dieu lui-même. Car si nous croyons en un Dieu qui se montre, qui se révèle, il ne faut jamais oublier que ce même Dieu choisit le moment et la façon dont il se révèle. C'est là un point essentiel de ce texte, et je vous demande de garder cette pensée pour plus tard.
Jésus marche deux à côté des deux pèlerins. "Vous parlez de quoi? Ca n'a pas l'air d'aller??".

"De Jésus de Nazareth, qui était un prophète puissant en actes et en paroles devant Dieu et devant tout le peuple, les chefs des prêtres et nos magistrats l'ont fait arrêter pour qu'il soit condamné à mort et l'ont crucifié. Nous espérions que ce serait lui qui délivrerait Israël".

Cette réponse est fascinante. Tout d'abord, faites attention aux temps employés: Jésus ETAIT un prophète, nous ESPERIONS que ce serait lui qui délivrerait Israël.
C'est du passé, pour eux, tout est fini. Bien plus, la réponse de Cléopas montre qu'il n'avait rien compris à l'identité et à la mission de Jésus. Pour eux Jésus était un prophète, rien de plus. Bien sûr ils avaient bien espéré qu'il soit le Messie, mais pour eux comme pour beaucoup de juifs de l'époque, le Messie devait être le libérateur qui viendrait les délivrer de l'occupation romaine manu militari. Ils pensaient que Jésus allaient écraser les occupants. Mais il était mort, et avec lui leurs espoirs et leur foi. Pourquoi? Parce que ce qu'ils attendaient ne pouvait pas être fait par un Messie crucifié comme le dernier des bandits.
Cléopas demande à celui qui les a rejoints "es-tu le seul à ne pas savoir ce qui s'est passé ces jour-ci à Jérusalem??". En fait, Cléopas ne savait pas ce qui s'était passé à Jérusalem. Il connaissait les évènements qui s'étaient produits mais il n'en saisissait pas le sens.

Alors Jésus doit tout reprendre à zéro. "Hommes sans intelligence, dont le coeur est lent à croire tout ce qu'ont dit les prophètes! Ne fallait-il pas que le Messie souffre ces choses et qu'il entre dans sa gloire?". Ce que Jésus va expliquer, en se basant sur les promesses de l'Ancien Testament, c'est que le Messie annoncé ne devait pas venir dans la puissance et la force mais vivre dans la faiblesse et expier par sa mort les péchés des hommes. Quels textes Jésus a-t-il utilisés? Nous n'en savons rien, mais peut-être s'est il servi d'Esaïe 53 que nous avons lu lors du Vendredi Saint.
3 Méprisé et délaissé par les hommes, homme de douleur, habitué à la souffrance, il était pareil à celui face auquel on détourne la tête: nous l'avons méprisé, nous n'avons fait aucun cas de lui.4 Pourtant, *ce sont nos souffrances qu'il a portées, c'est de nos douleurs qu'il s'est chargé. Et nous, nous l'avons considéré comme puni, frappé par Dieu et humilié.5 Mais lui, il était blessé à cause de nos transgressions, brisé à cause de nos fautes: la punition qui nous donne la paix est tombée sur lui, et *c'est par ses blessures que nous sommes guéris.6 Nous étions tous comme des brebis égarées: chacun suivait sa propre voie, et l'Eternel a fait retomber sur lui nos fautes à tous.

Le Messie ne devait pas être un guerrier libérateur. Le Messie devait être un serviteur souffrant dont le sang devait couler pour que nous soyons purifiés de nos fautes. Ce que Jésus est en train de dire, de faire comprendre en se servant de la Parole de Dieu.
C'est là quelque chose d'essentiel. Nous parlons ce matin de rencontrer Jésus. Encore faut-il rencontrer le vrai Jésus, le Jésus dont la Bible rend témoignage, le Jésus confessé depuis des siècles par la véritable Eglise dans le Credo de Nicée-Constantinople. Pas un de ces Jésus alternatifs tels que beaucoup de pseudo-théologies en fabriquent, pas une sorte de Che Guevara palestinien, pas une espèce de gourou New Age, non, le vrai Christ. Ce vrai Jésus, nous le connaîtrons à travers la Parole lue, méditée, écoutée dans la prédication de l'Eglise. Les deux pèlerins avaient une vision du Messie totalement opposée à celle de Jésus et de la Bible. Voilà pourquoi ils n'ont d'abord pas pu le reconnaître. Mais si nous rencontrons le Christ de l'Ecriture, vrai homme et vrai Dieu, par les blessures duquel nous sommes guéris, alors notre cœur commencera à bruler d'un feu nouveau.

C'est ce qui arrive aux deux pèlerins alors que cet étranger bizarre. Mais ils ne sont pas encore arrivés à Emmaüs. Cela c'est une autre étape, à laquelle nous devons aussi arriver.
Car une fois arrivés dans le village, les deux compagnons disent à Jésus "reste avec nous". Qu'elle est belle cette parole: "reste avec nous". Nous qui brûlons à l'écoute de la Parole de Dieu, allons-nous le laisser s'éloigner ou allons-nous lui demander de se manifester pleinement? Pas si nous suivons l'exemple de pèlerins. Mais alors, il faudra lui ouvrir notre maison. Comme l'a dit Mickaël Oxen "Ouvrir nos portes, dire: reste avec nous, c'est accepter de remettre complètement en cause notre religion personnelle, nos idées sur le Christ pour nous mettre à l'écoute de la Parole de Dieu".
A cette présence que vous pouvez ressentir à vos côtés, dites "reste avec nous".
C'est alors que nous nous ouvrirons à la grâce d'une rencontre complète avec le Christ. En effet, une fois installés, il faut bien manger. "Jésus prit le pain et, après avoir prononcé la prière de bénédiction, il le rompit et le leur donna". Ca ne vous rappelle rien tout ça??
Oui, c'est à ce moment que les yeux des disciples s'ouvrent totalement, et qu'ils reconnaissent celui qui, la nuit où il fut livré, prit du pain et, après avoir rendu grâce le rompit et le donna à ses disciples en disant "prenez mangez ceci est mon corps qui est donné pour vous", le corps du Fils de Dieu brisé pour le pardon de nos fautes.

Et tout de suite après, Jésus disparaît. Pourquoi? Pour montrer son pouvoir? Non, je crois que Luc veut ici nous montrer qu'il est plus important pour nous de voir Jésus dans la Parole et les sacrements que dans sa chair. Il est plus important de rencontrer le Christ vivant dans la Parole et les sacrements avec les yeux de la foi que de le voir avec les yeux de notre tête.
Et le reste de l'histoire nous le prouve(Lc 24. 35-49) ; les deux disciples retournent à Jérusalem et qu'est-ce qui se passe? :

Les amis de Jésus sont rassemblés
Jésus apparaît au milieu d'eux
La Parole est annoncée
Un repas est partagé

Exactement comme dans l'histoire des pèlerins d'Emmaüs. Exactement comme dans les autres Evangiles où l'on retrouve le même schéma: disciples rassemblés, présence de Jésus, écoute de la Parole, partage du pain. Exactement comme dans le livre des Actes où Luc décrit ainsi la jeune église: ils persévéraient dans l'enseignement des apôtres (Parole), dans la communion fraternelle (rassemblement) dans la fraction du pain et dans les prières (repas) (Actes 2.42).

Est-ce que vous voyez où je veux en venir? Le culte de la première église était fondé sur l'expérience de la rencontre avec le Christ ressuscité! Car nos cultes n'ont pas d'autre raison d'être que de rencontrer le Christ vivant. Nous nous rassemblons, nous écoutons la Parole, nous rompons le pain ensemble et nous sommes assurés de la présence de Christ au milieu de nous. Dieu nous a donné sa Parole et le sacrement de la Cène pour que nous puissions y rencontrer Christ.

Si, dans votre spiritualité, il n'y pas de place pour une rencontre réelle avec Jésus dans le pain et le vin consacrés, changez de spiritualité: elle n'est pas biblique. Vous vous privez d'une bénédiction, et la même chose arrive quand vous négligez la lecture et la méditation de la Parole de Dieu.Nous avons tous besoin de nourrir notre foi à ces deux canaux que Dieu nous ouvre dans sa bonté. Nous avons besoin d'eux pour avoir la force, comme les pèlerins d'Emmaüs, comme les premiers chrétiens, d'aller dire aux autres: "Jésus est ressuscité!" afin qu'ils puissent le rencontrer comme leur Seigneur et leur Sauveur.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Notre spiritualité, c'est l'Esprit Saint qui témoigne, à notre esprit, que nous sommes enfants de Dieu, par J-C, au moyen de la foi, en vertu du témoignage de l'Évangile ou des sacrements. L'un n'exclut pas l'autre. Néanmoins, l'Évangile a bien priorité sur les autres(Rom.8, Rom.10/13-17, Gal.3-4 etc...)!