8 Alors tout le
peuple s’est rassemblé comme un seul homme sur la place qui fait
face à la porte des eaux. Ils ont demandé au scribe Esdras
d'apporter le livre de la loi de Moïse, prescrite par l'Éternel à
Israël, 2 et Esdras, qui était aussi prêtre, a apporté la
loi devant l'assemblée. Celle-ci était composée d'hommes et de
femmes, de tous ceux qui étaient aptes à la comprendre. C'était le
premier jour du septième mois. 3 Esdras a lu dans le livre
depuis le matin jusqu'à la mi-journée, sur la place qui fait face à
la porte des eaux, en présence des hommes et des femmes, de ceux qui
étaient en âge de comprendre. Le peuple tout entier s’est montré
attentif à la lecture du livre de la loi.
5 Esdras a ouvert
le livre de façon visible pour le peuple dans son entier –
puisqu’il était surélevé par rapport à lui – et lorsqu'il a
fait ce geste, tout le peuple s’est mis debout. 6 Esdras a
béni l'Éternel, le grand Dieu, et tous les membres du peuple ont
répondu: «Amen! Amen!» en levant les mains, puis ils se sont
prosternés et ont adoré l'Éternel, le visage contre terre.
8 Ils
lisaient distinctement dans le livre de la loi de Dieu et ils en
donnaient le sens pour faire comprendre ce qu'ils avaient lu.
9 Le
gouverneur Néhémie, le prêtre et scribe Esdras et les Lévites qui
donnaient des explications ont dit à l’ensemble du peuple: «Ce
jour est un jour saint pour l'Éternel, votre Dieu. Ne prenez pas le
deuil et ne pleurez pas!» En effet, le peuple tout entier pleurait à
l’écoute des paroles de la loi. 10 Ils ont ajouté: «Allez
manger un bon repas et boire des liqueurs douces, en envoyant des
parts à ceux qui n'ont rien préparé, car ce jour est un jour saint
pour notre Seigneur. Ne soyez pas tristes, car c’est la joie de
l'Éternel qui fait votre force.»
Chers
frères et sœurs en Christ,
chers
amis
Dans
son roman Cent Ans de Solitude, Gabriel Garcia Marquez raconte
l'histoire de Macondo, un village d'Amérique du Sud dont les
habitants sont un jour frappés d'une maladie étrange et terrible:
ils perdent la mémoire.
Les
gens commencent par oublier le nom de leur outils quotidiens, et puis
ils oublient même à quoi ils servaient. Alors que le mal progresse,
les habitants de Macondo décident de placer des inscriptions qui, au
fur et à mesure que la mémoire disparaît, doivent être de plus en
plus complètes « ceci est une vache, il faut la traire chaque
jour et elle donnera du lait. Le lait doit être réchauffé dans une
casserole et mélangé avec du café pour faire de café au lait »
Et,
pour s'assurer qu'ils n'allaient pas oublier qui ils étaient, les
villageois placèrent un grand panneau à l'entrée du village « ici,
c'est le village de Macondo ». Ensuite, dans la rue principale,
où tout le monde pouvait le voir, il mirent un autre panneau qui
disait « Dieu existe ».
La
situation des gens de Macondo n'est pas sans rappeler celle que
Néhémie décrit dans le chapitre de son livre que nous avons lu ce
matin. Des siècles auparavant, Dieu avait fait aux Israélites des
dons merveilleux: il les avait libérés d'Égypte, il leur avait
donné un pays, la paix et l'abondance. Le problème, c'est que la
prospérité peut causer l'amnésie. Les Israélites ont commencé à
considérer tout ce qu'ils avaient comme des dus, ils ont commencé à
oublier Dieu, à le mettre de côté, à être enfin infidèle à ses
commandements et à son alliance. Ils ont oublié leur identité de
peuple spécial, élu par le seul vrai Seigneur.
Par
la suite, le pays a été envahi par les Babyloniens, qui ont déporté
beaucoup d'Israélites loin de leur terre. Finalement, 50 ans après,
le roi Cyrus autorisa le retour d'une grande partie des exilés.
Le
retour en Judée fut une déception cruelle. Les murailles de
Jérusalem était à terre, le temple n'était plus qu'un tas de
pierres, les champs des alentours n'étaient plus que des friches.
Deux hommes, Néhémie et Esdras, ont alors pris les choses en main
et ont dirigé le peuple dans un grand effort de reconstruction: on
releva les murailles, on construisit un nouveau temple, on rebâtit
les demeures...
Une
fois ce premier effort de reconstruction accompli, le peuple
s'assembla. Les Israélites étaient un peu plus en sécurité à
présent, mais leur situation était toujours sombre. Le pays restait
soumis à une occupation étrangère et devait payer un lourd tribu;
les peuplades voisines étaient hostiles, et le peuple souffrait de
divisions internes et d'injustices sociales criantes.
Alors,
on a demandé à Esdras de prendre un rouleau (l'équivalent d'un de
nos livres) qu'il avait ramené de Babylone. Ce rouleau contenait les
cinq livres que vous trouvez au début de vos Bibles.
Je
vais vous raconter la suite du récit dans un instant, mais avant je
voudrais vous demander de réfléchir à quelque chose: est-ce qu'il
n'y a pas, dans votre famille, des histoires qui ont été
transmises, qui ont façonné la mémoire de votre famille et qui ont
donc fait de vous ce que vous êtes? Chez moi, c'était des récits
de la Résistance en Corse durant la Guerre, pour d'autres ce sera
peut-être les histoires du grand-père syndicaliste qui ne manquait
jamais un 1er Mai... Peu importe en fait: ici je parle de récits
qui, parce qu'ils nous disent d'où nous venons nous aident à nous
rappeler qui nous sommes. Reprenons.
Esdras
a commencé à ouvrir le rouleau, et il a lu. Il a lu les histoires
qu'il contenait: la Création, Noé et son arche, Abraham et Sarah,
la sortie d'Égypte, Moïse et les Dix Commandements. Ces histoires
étaient écrites en hébreu, mais le peuple parlait araméen, el les
Lévites (les prêtres) traduisaient et « expliquaient le
texte ».
Pourquoi
« expliquer »? Pour que les gens puissent comprendre
comment le texte les touchait dans leurs vies. Et là quelque chose
s'est passé. Quelque chose qui bien sûr venait du Saint-Esprit de
Dieu.
En
écoutant la Parole de Dieu, en écoutant la grande histoire du salut
que Dieu avait commencée il y a si longtemps, le peuple s'est rendu
compte qu'il faisait partie de cette histoire du salut, qu'elle
n'était pas terminée et qu'elle se poursuivait, même si eux,
pendant longtemps, avaient oublié. Et beaucoup se désolaient. Ils
étaient remplis de honte et d'amertume parce qu'ils réalisaient que
depuis des années ils avaient gâché leur vie en vivant hors de
l'alliance de Dieu, parce qu'ils se rendaient compte qu'ils avaient
violé ses commandements.
Alors
Esdras et Néhémie leur ont dit: « Ne prenez pas le deuil et
ne pleurez pas!... Ne soyez pas tristes, car c’est la joie de
l'Éternel qui fait votre force.»
Ils
les ont même encouragés à faire un bon repas, à faire la fête.
Ils les ont surtout invités, alors même qu'ils étaient dans
l'épreuve et dans l'incertitude, à se confier à Dieu. Certes, ils
avaient été infidèles, mais le Seigneur, lui, restait fidèle.
En
tant que chrétiens, comment recevoir cette histoire aujourd'hui?
Tout
d'abord, je pense qu'elle nous invite à méditer sur le sens de la
mémoire, notamment la mémoire de qui nous sommes. Nous vivons dans
une société où beaucoup cherchent à détruire les identités,
parce que les gens sans identité, sans mémoire et repère sont plus
malléables. En tant que chrétiens nous sommes susceptibles de
tomber dans ce piège: d'oublier qui nous sommes et à quoi nous
sommes appelés. Je vous ai dit que la prospérité provoquait
l'amnésie, mais l'épreuve aussi peut nous faire oublier notre
statut d'enfant de Dieu. Elle peut nous décourager, nous faire
douter parfois de l'amour du Père.
Alors,
nous avons besoin d'entretenir notre mémoire, parce qu'ainsi nous
rendrons notre mémoire plus forte et nous ne perdrons pas courage.
Le
premier moyen, comme le montre bien notre récit, c'est de revenir
encore et toujours à la Parole de Dieu, à la Bible. C'est là la
condition nécessaire d'une vie chrétienne saine. Nous avons besoin
de la Bible. La Bible qui est prêchée dans cette église chaque
dimanche dans toute sa pureté: voilà un immense trésor. La Bible
que nous pouvons (devons) méditer chaque jour. Les outils ne
manquent pas: NCQ ou tout autre guide de méditations; de nouvelles
versions qui permettront peut-être une lecture renouvelée, des
Bibles en gros caractères pour les yeux fatigués. Tout cela, avec
des conseils en plus, est disponible auprès de votre pasteur.
En
tout cas, il est impossible de grandir et même de se maintenir dans
la vraie foi sans contact réel avec l'Écriture Sainte. Nous voyons
bien ce qui se passe dans les églises dites « libérales »,
où l'autorité de la Parole de Dieu a été remplacée par celles de
toutes les pseudo-philosophies au goût du jour. Nous avons besoin
d'être toujours renouvelés par notre lecture de la Bible. Par
exemple, il y a peu je lisais la lettre aux Galates « J'ai été
crucifié avec Christ; et si je vis, ce n'est plus moi qui vis, c'est
Christ qui vit en moi; si je vis maintenant dans la chair, je vis
dans la foi au Fils de Dieu, qui m'a aimé et qui s'est livré
lui-même pour moi. » (Galates 2.10). Ce verset, je l'avais
appris peu de temps après ma conversion, et il m'a encouragé, a
réveillé en moi des sentiments qui s'étaient peut-être
émoussés...
Mes
frères, si nous voulons vraiment connaître Dieu, si nous voulons
obéir à ce qu'il nous commande et croire en ce qu'il nous promet,
il n'y a qu'une seule source: la Bible. Ne l'oublions jamais!!
Mais
nous avons aussi d'autres moyens pour entretenir notre mémoire. Il y
a quinze jours, je vous ai raconté comment Luther, dans les moment
de doute et de luttes intérieures intenses, se touchait le front en
disant « j'ai été baptisé ».
Si
vous avez été baptisé, vous êtes marqué du sceau de l'alliance,
une alliance dans laquelle Dieu a voulu entrer avant même que vous
ne soyez conçu. Souvenez-vous toujours de votre baptême: cela vous
aidera à vous souvenir que Dieu vous aime.
Enfin,
la notion de mémoire est indissociable de la Cène. Jésus a bien
dit à ses disciples de manger le pain et de boire la coupe « en
mémoire de lui ».
Quand
nous nous approchons de la table sainte, nous venons bien sûr
communier à son corps et à son sang, mais nous faisons aussi
mémoire. Nous commémorons, c'est-à-dire que nous nous souvenons
ensemble. Nous nous souvenons que le Christ a aimé l'Église et
s'est livré lui-même pour elle (Eph 2.25). Nous nous souvenons que,
quelques soient nos péchés « il est puissant et juste pour
nous les pardonner ». Nous nous souvenons que Jésus est mort
« pour nous » et que par sa croix, nous avons une paix
parfaite et définitive avec Dieu, avec l'assurance de la vie
éternelle.
Frères
et sœurs, n'oublions pas qui nous sommes: le peuple élu de Dieu, sa
sainte Église, appelée à le servir et à le glorifier dans tout ce
que nous faisons. Ne laissons rien ni personne nous voler ce précieux
héritage et rappelons-nous notre identité profonde en méditant la
Loi de l'Éternel
Amen.
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