Or, le troisième jour, il y eut des noces à Cana en Galilée. La mère de Jésus était là. 2 Jésus fut aussi invité aux noces avec ses disciples. 3 Comme le vin venait à manquer, la mère de Jésus lui dit: «Ils n'ont plus de vin.»4 Jésus lui répondit: «Que me veux-tu, femme? Mon heure n'est pas encore venue.»5 Sa mère dit aux serviteurs: «Faites tout ce qu'il vous dira.» 6 Or il y avait là six jarres de pierre, destinées aux purifications des Juifs et contenant chacune une centaine de litres.7 Jésus leur dit: «Remplissez d'eau ces jarres.» Et ils les remplirent jusqu'au bord. 8 «Puisez maintenant, leur dit-il, et apportez-en à l'organisateur du repas.» Et ils lui en apportèrent. 9 L'organisateur du repas goûta l'eau changée en vin. Ne sachant pas d'où venait ce vin, tandis que les serviteurs qui avaient puisé l'eau le savaient bien, il appela le marié10 et lui dit: «Tout homme sert d'abord le bon vin, puis le moins bon après qu'on s'est enivré; mais toi, tu as gardé le bon vin jusqu'à présent!» 11 Tel fut, à Cana en Galilée, le premier des signes miraculeux que fit Jésus. Il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en lui.
Chers frères et sœurs,
Et ce texte nous est proposé lors de la saison de l'Epiphanie où nous nous concentrons sur la manifestation de Jésus. Pendant ces quelques dimanches, nous voyons comment Jésus s'est dévoilé, révélé, comment il a montré qu'il était le Fils de Dieu et le Sauveur des hommes. En l'occurrence, l'évangile de ce dimanche nous révèle un aspect de Jésus bien trop souvent oublié. Quand nous pensons à Christ, nous autres Chrétiens, nous pensons à la puissance qu'il a manifestée. Nous pensons à la vérité qu'il a fait connaître. Même nos amis incroyants reconnaissent souvent en Jésus une manifestation éminente de l'amour. Mais ici, frères et sœurs, il est question de joie. Voilà un thème que nous ne rattachons peut-être pas naturellement d'emblée à la personne de Jésus. Et pourtant, Jean nous montre aujourd'hui à quel point Jésus est le Prince de la joie.
La joie, nous la trouvons tout d'abord dans ce mariage où Jésus, sa mère et ses disciples ont été invités. Les mariages sont des évènements joyeux, marqués par la présence des parents et des amis, la célébration de l'amour de deux êtres qui s'engagent pour la vie, la perspective du bonheur commun qu'ils auront à bâtir ensemble. Un mariage, c'est une fête joyeuse. Et voilà Jésus en train de prendre du bon temps, de partager la joie d'un homme et d'une femme, de leurs familles, de leurs amis.
Souvent, le christianisme a un problème avec la joie. Nous avons pendant trop longtemps fait de la gravité et de l'austérité des marques de piété et de sainteté. Jésus, pourtant, n'était pas un ennemi de la joie, bien au contraire: sa présence à la fête le prouve. Ca a même dû être un grand changement pour André, qui l'accompagnait et qui jusque là était disciple de Jean Baptiste, plutôt spécialiste du jeûne et de la dégustation de sauterelles dans le désert.
Mais puisque nous parlons de joie, le mariage auquel Jésus assistait a bien failli tourner au vinaigre. Il faut que vous compreniez qu'un mariage juif de l'époque, c'était une fête s'étirant parfois sur une semaine, avec un grand nombre d'invités, qu'il fallait traiter de façon tout à fait spéciale. Et là, arrive ce qui ne devait surtout pas arriver: le vin vient à manquer! Catastrophe! L'ambiance risque d'en prendre un coup. Pensez: venir à une fête et ne boire que de l'eau plate!
Marie vient alors auprès de son fils et lui dit simplement "ils n'ont plus de vin". Ce qui est bien avec les mères, c'est qu'elles ont parfois une façon de dire les choses. Par exemple "ta chambre n'est pas rangée" veut dire "range ta chambre". Mais on voit bien que Marie ne parle pas simplement comme une mère à son fils. Car s'il ne s'agissait que de cela, si Jésus n'était pour elle que son fils, pourquoi lui parler de ce problème d'intendance? Marie prie Jésus d'intervenir.
La réponse de Jésus nous paraît dure "que me veux-tu, femme, mon heure n'est pas encore venue?". Elle nous paraît aussi contradictoire parce qu'après ce qui nous semble être un refus, Jésus agit. En fait, Jésus ne refuse pas. Mais il parle de son heure. Cette heure où il savait qu'il allait mourir à la Croix pour que nous ayons la vie éternelle. Jésus dit à sa mère: "n'oublie pas pourquoi je suis venu. Moi je le garde en ligne de mire dans tout ce que je vais faire et dire. Le compte à rebours a déjà commencé…"
Souvent, nous avons tendance à nous rapprocher de Jésus quand les choses vont mal. Et c'est tout à fait naturel de chercher de l'aide quand on en a besoin, et c'est une bonne chose que de la chercher auprès du Fils de Dieu.
Mais il faut être clair et bien avoir à l'esprit qui Jésus est: pas notre copain auquel on peut parler ou qui est toujours là pour dépanner, mais notre Sauveur en qui nous avons le pardon de toutes nos fautes. Nos problèmes peuvent parfois être grands. Aucun ne sera jamais aussi grand que LE problème auquel toute l'humanité doit faire face et qui est souvent d'ailleurs la cause de nos souffrances: notre séparation avec Dieu que seul Jésus peut combler. Jésus est conscient de nos besoins, mais il veut avant tout s'occuper de ce dont nous avons le plus besoin: retrouver la communion avec le Père et, du coup, avec nous-mêmes.
Jésus va donc, à ce mariage de Cana, accomplir un signe. Je préfère le terme à celui de miracle, car il est plus proche du mot qu'emploie Jean.
Un miracle, à l'extrême limite, peut être vu comme un tour de prestidigitation et Jésus comme le Gérard Majax de Judée-Samarie. Un signe, c'est comme un poteau indicateur qui pointe vers quelque chose (d'ailleurs, dans l'Evangile de Jean il y a sept signes, et sept fois où Jésus dit "je suis". Vous pouvez vous amuser à les rechercher).Que veut nous dire ce signe de l'eau changée en vin à Cana? Que nous dit-il sur Jésus?
Jean nous donne la solution quand il nous précise, mine de rien, que les cuves que Jésus emploie étaient "destinées aux purifications des Juifs". On sait à quel point le judaïsme était devenu une religion légaliste, obsédée par la pureté et l'obéissance minutieuse aux commandements. Et bien, c'est dans ces cuves, symboles de cette religiosité oppressante, étouffante, que Jésus va transformer de l'eau en vin, ce vin qui est dans la Bible symbole de joie; ce vin qui, comme le dit le Psaume "réjouit le cœur de l'homme".
Et il en apporte du vin: pensez: plus de 600 litres!! En imaginant qu'il y ait eu 300 invités à ce mariage, on se retrouve à deux bouteilles par personne, ce qui commence à devenir sérieux!! Et en plus, c'est du bon vin, savoureux, un très grand cru. On vient de passer du manque à la profusion. Le vin que Jésus apporte est abondant, gratuit, de qualité. En cela, il symbolise bien tout ce que Christ nous donne par la foi: la grâce, le salut, la vie nouvelle, la joie de se savoir aimés de Dieu. Nous n'avons pas à retourner à l'eau faussement purificatrice des jarres de pierre: la purification réelle et définitive, c'est le sang de Christ versé pour nous qui l'a opérée.
Nous n'avons plus à vivre dans l'esclavage du péché. Nous n'avons plus non plus à nous placer sous le joug d'une loi mortifère, de codes, de règles humaines. Nous sommes invités à la joie par Jésus-Christ. Bien sûr, il y aura des doutes, des épreuves. Jésus le sait mieux que nous, lui qui a connu la souffrance jusqu'au dernier point.
Mais si nous plaçons notre confiance en lui, nous savons que nous sommes déjà en route vers le banquet de noces que l'Apocalypse décrit, là où nous serons dans la présence joyeuse du Seigneur, à célébrer et à nous réjouir avec lui. Oui, "heureux sont ceux qui sont invités au festin de noces de l'Agneau" (Ap 19.5-9). Le reaps de l'eucharistie auquel nous allons bientôt être conviés préfigure ces noces joyeuses.
Réjouissons-nous, frères et sœurs, car aux noces de Cana, Jésus a changé l’eau en vin. Les noces de Cana, c’est un évangile, une bonne nouvelle pour nous aujourd’hui. A présent, voulons-nous faire de Jésus l'invité de notre vie? Il était jadis l’invité aux noces de Cana, mais il peut être aujourd’hui l’invité aux noces de notre existence. Il veut venir dans notre maison, et changer en nous quelque chose qui est deviendra source de joie. Je terminerai par cette belle phrase de l’Apocalypse : « je me tiens à la porte et je frappe, si quelqu'un m’ouvre la porte, j’entrerai chez lui et je prendrai le repas avec lui ». Encore un repas placé sous le signe de la joie, la joie vrai et durable que seul Jésus peut nous donner. Amen.
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