3 Donne-nous chaque jour notre
pain quotidien;
4
pardonne-nous nos péchés, car nous aussi nous pardonnons à toute
personne qui nous offense, et ne nous expose pas à la tentation,
[mais délivre-nous du mal.]'»5 Il leur dit encore: «Supposons que
l'un de vous ait un ami et qu'il aille le trouver au milieu de la
nuit pour lui dire: 'Mon ami, prête-moi trois pains,6 car un de mes
amis est arrivé de voyage chez moi et je n'ai rien à lui offrir.' 7
Supposons que, de l'intérieur de sa maison, cet ami lui réponde:
'Ne m'ennuie pas, la porte est déjà fermée, mes enfants et moi
sommes au lit, je ne peux pas me lever pour te donner des pains.'
8 Je vous le dis, même s'il ne se lève pas pour les lui donner parce que c'est son ami, il se lèvera à cause de son insistance et lui donnera tout ce dont il a besoin.9 Et moi, je vous dis: Demandez et l'on vous donnera; cherchez et vous trouverez; frappez et l'on vous ouvrira. 10 En effet, tous ceux qui demandent reçoivent, celui qui cherche trouve et l'on ouvrira à celui qui frappe.11 Quel père parmi vous donnera une pierre à son fils, s'il lui demande du pain? Ou bien s'il demande un poisson, lui donnera-t-il un serpent au lieu d'un poisson?12 Ou bien s'il demande un oeuf, lui donnera-t-il un scorpion? 13 Si donc, mauvais comme vous l'êtes, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, le Père céleste donnera d'autant plus volontiers le Saint-Esprit à ceux qui le lui demandent.»
Martin de Tours, le grand évangélisateur de l'Ouest de la France (Saint Martin, si vous y tenez absolument) disait :
8 Je vous le dis, même s'il ne se lève pas pour les lui donner parce que c'est son ami, il se lèvera à cause de son insistance et lui donnera tout ce dont il a besoin.9 Et moi, je vous dis: Demandez et l'on vous donnera; cherchez et vous trouverez; frappez et l'on vous ouvrira. 10 En effet, tous ceux qui demandent reçoivent, celui qui cherche trouve et l'on ouvrira à celui qui frappe.11 Quel père parmi vous donnera une pierre à son fils, s'il lui demande du pain? Ou bien s'il demande un poisson, lui donnera-t-il un serpent au lieu d'un poisson?12 Ou bien s'il demande un oeuf, lui donnera-t-il un scorpion? 13 Si donc, mauvais comme vous l'êtes, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, le Père céleste donnera d'autant plus volontiers le Saint-Esprit à ceux qui le lui demandent.»
Martin de Tours, le grand évangélisateur de l'Ouest de la France (Saint Martin, si vous y tenez absolument) disait :
« La prière est la
respiration de l’âme. » C’est de la prière et de sa réponse
dont nous allons parler ce matin.
Tout
commence avec Jésus qui se retire pour prier. Ses disciples
l’observent se demandant quelle technique, quelles paroles, Jésus
utilise-t-il pour s’adresser à son Dieu. Quand Jésus revient vers
eux, la demande est claire : « Jésus, enseigne-nous à prier !
Partage-nous les secrets de ta spiritualité, dis-nous les mots que
tu utilises pour converser avec Dieu, fais-nous connaître ta
technique. » L’idée est assez simple : si les disciples imitent
Jésus dans la forme de sa prière, s’ils usent des mots que Jésus
utilise, les disciples devraient développer une communion avec Dieu
bien plus intime qu’elle ne l’est actuellement. Et surtout, ils
pourront espérer obtenir de Dieu bien plus qu’ils n’ont
actuellement.
De
tout ce passage, on peut deviner l’image que les disciples ont de
Dieu. Dieu est un peu comme un de ces distributeurs automatiques que
nous trouvons dans nos gares. D’une apparence froide, parfois d’une
certaine technicité, ces distributeurs de nourriture et de boissons
ne fonctionnent que si l’on s’y prend correctement : il s’agit
de choisir tout d’abord ce que l’on désirerait obtenir et le
choix est restreint, il faut ensuite introduire le montant exact ou
supérieur, il faut ensuite taper le code précis du produit désiré,
il faut attendre sa distribution, il faut le chercher dans sa loge
hermétique, et enfin récupérer sa monnaie.
Et
tout cela quand ça veut bien fonctionner. Qui d’entre vous n’a
pas perdu quelques euros dans un de ces automates récalcitrants ;
qui n’a pas vu la barre chocolatée ou la canette de Coca Light
tant désirée rester coincée dans la spirale de l’appareil ; qui
ne s’est pas énervé contre un appareil qui refuse obstinément
d’accepter votre monnaie ? En fait, si vous faites bien attention,
dans certaines gares, vous verrez que ces distributeurs portent
encore les stigmates des coups de pieds de consommateurs frustrés...
Le
problème des disciples, c'est qu'ils prennent Dieu pour un
distributeur automatique. Et ce qu'ils demandent, c’est comment
s’y prendre pour obtenir ce qu’ils désirent, pour recevoir la
nourriture que leur âme a besoin. Et Jésus de leur répondre via la
célèbre prière du Notre Père, ici dans la version courte et
ramassée de Luc.
La
demande qui va nous intéresser ce matin, c’est la troisième :
donne-nous
le pain dont nous avons besoin chaque jour.
En effet, toute la suite du passage que nous avons lu n’aura pour
but que de préciser cette demande, et par là même de dégager une
nouvelle image de Dieu pour les disciples et pour nous aujourd’hui.
Jésus
commence par raconter une histoire. C’est la nuit, vous êtes au
lit, les enfants dorment. Tout à coup, on appelle du dehors —
c’est l’équivalent de la sonnette moderne. Un voisin, dont vous
reconnaissez la voix, réclame que vous lui prêtiez du pain, car un
de ses propres amis vient d’arriver chez lui et il n’a rien à
lui offrir comme repas. On comprend que cet ami voyageur est arrivé
à l’improviste, visite donc inattendue, pour laquelle votre voisin
n’a pas eu la possibilité de se préparer. N’oubliez pas que
dans la culture du temps, l’hôte et l’hospitalité sont sacrés,
même quand il s’agit de visiteurs arrivant à l’improviste !
Comme
à l’époque il n’y a pas de petit arabe du coin ouvert très
tard pour se tirer d’affaires, votre voisin n’a pas eu d’autre
choix que de venir vous déranger dans votre sommeil. Il vous demande
du pain, en fait de la subsistance, de quoi nourrir correctement son
hôte. Comment allez-vous réagir ? Allez-vous renvoyer votre voisin
à ses problèmes en lui faisant remarquer l’heure indécente ? Ou:
allez-vous faire preuve d’hospitalité envers votre voisin ? Il y a
2000 ans, pour les juifs qui écoutent Jésus, la première solution
est purement impensable et la deuxième s'impose !
Pourquoi
? Parce qu’il en va de votre honneur ! Le verset 8, qui donne la
raison de votre lever hors du lit et de l’aide que vous allez
apporter à votre voisin, est généralement mal traduit. Il suppose
que la raison est l’insistance de votre voisin, qu’à force de
réclamer, vous cédiez pour enfin avoir la paix. Mais cela pose un
gros problème théologique avec cette lecture : on ne peut guère
forcer la main de Dieu. N’oublions pas que dans cette histoire,
vous qui vous faites réveiller en pleine nuit par votre voisin, vous
êtes une image de Dieu, de son attitude envers les hommes. Il serait
donc étrange que Jésus suggère de continuer de prier pour quelque
chose alors que Dieu aurait déjà répondu clairement non.
En
fait, Jésus interpelle ses auditeurs en leur disant : « Ecoutez !
Il peut arriver que l’un de vos voisins vienne sonner à votre
porte, obligé de vous emprunter de la nourriture, afin de préparer
un repas pour un de ses amis arrivé à l’improviste. C’est une
situation qui, en apparence, le désavantage énormément : vous et
votre famille êtes au lit, la porte est fermée et il ne manque pas
de vous déranger prodigieusement. Il peut même arriver que ce
voisin ne soit pas un de vos proches. Et pourtant, même pour un tel
voisin, vous vous lèverez parce que vous avez un sens de l’honneur,
du devoir et du service, et vous lui donnerez tout ce dont il a
besoin ! A combien plus forte raison donc, Dieu, qui est intègre au
degré maximal, agira-t-il de la sorte à votre égard. Il est
effectivement impensable qu’il n’écoute pas les prières de ses
enfants. Avec un tel Dieu, vous pouvez prétendre à la plus grande
écoute possible. »
Quelle
joie pour nous aujourd’hui d’avoir part à la même assurance en
Jésus-Christ ! Dieu ne rejette pas ceux et celles qui le recherchent
sincèrement et qui lui font part de ses besoins. Dieu pourvoit à
nos besoins. Et Jésus d’enfoncer le clou : demandez et vous
recevrez ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l’on vous
ouvrira ; car celui qui demande reçoit ; celui qui cherche trouve ;
et l’on ouvre à celui qui frappe.
A
ce stade, l’image de Dieu se précise. Dieu n’est pas distant
face à nos prières. Quand nous lui faisons part de nos besoins,
Dieu répond et donne généreusement de quoi les satisfaire. Il
n’est pas un de ces automates Sélecta compliqué et récalcitrant
où on risque tout le temps de perdre l’argent introduit. Dieu est
simple d’accès. Dans sa grande générosité, Dieu donne à tous
ceux qui en font la demande.
Mais
l’histoire précise également un point : Dieu répond à ce qui
est véritablement un besoin. Il n’y a ici aucune comparaison
possible entre le Père de Jésus-Christ et le Père Noël. Il ne
s’agit pas de faire sa liste de souhaits et de les apporter à
Dieu. Mais il s’agit de prendre conscience d’un manque réel en
soi, d’un besoin pertinent et de le présenter au Père éternel
pour que ce Dernier puisse y répondre.
Le
Père de Jésus-Christ agit ainsi tout comme un père agit envers son
enfant. Exception faite de certains cas pathologiques, lorsque que
votre enfant a faim, vous lui donnez à manger ; lorsqu’il a soif,
vous lui donnez à boire ; lorsqu’il a besoin de réconfort, vous
le prenez dans vos bras ; lorsqu’il a besoin d’aide, vous lui
accordez du temps. Si nous, parents humains, tout pécheurs que nous
sommes, tout faillibles et prompts au mal, nous sommes capables de
dons généreux envers nos enfants, à combien plus forte raison le
Père céleste l’est envers nous, ses propres enfants.
Jusqu’à
présent, le pain, la nourriture était au devant de la scène : le
voisin demandait du pain, les enfants également ou alors du poisson
ou un oeuf. Bref de quoi manger, de quoi subsister, de quoi aller de
l’avant, de quoi continuer sa route, son chemin, ses activités.
Car le pain est fondamental pour l’Israélite. Il est synonyme de
nourriture, de ce dont le corps a besoin quotidiennement pour
fonctionner correctement. Son importance est primordiale, sa présence
permanente sur toutes les tables. Il est le symbole des dons que Dieu
fait pour que l’homme puisse vivre : la vie, la santé, l’énergie,
la joie, la paix et la stabilité, etc.
Ainsi
l’image de Dieu dégagée par ce texte se précise. Dieu est de
moins en moins un automate devant lequel il est important de
connaître la technique, les mots adéquats pour obtenir ce que l’on
veut. Mais Dieu nous est présenté comme un père, comme une mère
peut-on dire aussi, qui aime son enfant, qui reconnaît ses besoins
et y répond. L’accès à Dieu est facile tout comme les bras d’une
maman ou d’un papa pour s’y blottir. Son sens du devoir à notre
égard n’est rien comparé à l’amour qu’il nous porte et qui
le met en action pour vous, en votre faveur.
Dieu
entend donc nos prières et il répond à nos besoins en nous
donnant… tout ce que nous demandons ? Pas vraiment. La fin de notre
texte n’est pas : « … à combien plus forte raison le Père
céleste donnera-t-il tout à ceux qui lui demandent ». Mais Jésus
précise : « … à combien plus forte raison le Père céleste
donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui lui demandent. » Certes,
l’Esprit Saint est le plus grand de tous les dons, mais
concrètement qu’est-ce que cela veut dire ? A un homme qui demande
la santé, Dieu donnera-t-il forcément la guérison ? A une femme
qui demande de quoi subsister, Dieu donnera-t-il forcément du
travail ? Peut-être ; mais pas forcément.
Dans
sa grande générosité, Dieu donne à tous ceux qui en font la
demande. Et tous ceux qui chercheront auprès de Dieu la source du
bonheur, trouveront Dieu, le Saint-Esprit. Cela signifie que nous
n’aurons pas toujours le bien que nous avons demandé : la
nourriture, la santé, la prospérité ; mais parce que nous nous
serons tournés vers Dieu, nous découvrirons Dieu, nous
l’expérimenterons dans notre vie. Nous aurons peut-être la
guérison ; mais nous aurons peut-être la paix dans la souffrance.
Nous aurons peut-être la prospérité ; mais nous aurons peut-être
la confiance pour vivre au jour le jour. Nous aurons peut-être la
joie ; mais nous aurons peut-être la force dans l’adversité.
Au
final, Dieu n’est pas un de ces automates récalcitrants : Dieu est
facile d’accès. Son sens du devoir envers nous est même dépassé
par son amour pour nous. Il nous écoute et répond à nos prières
en nous donnant au moins — mais est-ce un minimum ? — son Esprit,
sa présence réconfortante au coeur de notre vie. Et si nous
essayons… dès aujourd’hui.
Amen.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire