La
semaine dernière, lors du dimanche de Pâques, nous avons pu
remarquer que les évangiles ne nous décrivent pas la Résurrection
de Jésus. Ils ne nous la racontent pas, nous ne savons pas comment
les choses ses sont passées.
Ce
que nous avons dans notre Nouveau Testament, ce sont en revanche des
rencontres avec le Christ ressuscité. Notre texte de ce matin nous
rapporte la rencontre entre ce Christ revenu à la vie et son apôtre
Thomas.
Pauvre
Thomas! Devenu depuis si longtemps le symbole même de l'incrédulité.
« Doubting Thomas »
disent les anglo-saxons: Thomas qui doute. Mais même dans notre
langue, cet épisode biblique a laissé des traces. N'avez-vous
jamais entendu quelqu'un dire: « moi, je suis comme Saint
Thomas: je ne crois que ce que je vois! »? Cette phrase, qui
exprime en général le matérialisme le plus rigide (on a envie de
dire « obtus ») est inacceptable. Tout d'abord, parce
qu'elle ne rend pas vraiment compte de ce qui se passe dans ce récit
entre Thomas et Jésus. Ensuite, c'est une phrase qui me rend triste
pour ceux qui la prononcent. Cette phrase, souvent prononcée avec
fierté, montre en fait une incapacité à voir autant qu'à croire.
Bien
sûr, il y a des choses que nous voyons. Nous voyons, par exemple,
des arbres, des vaches, des maisons. Mais est-ce que pour autant nous
« croyons » aux arbres, aux vaches, aux maisons? Voilà,
chers amis, ce que nous « voyons ». Il n'y a là
rigoureusement rien à croire.
Nous
voyons telle chose ou telle personne, nous la nommons, et puis plus
rien. C'est du matérialisme pur et dur : encore une fois, rien à
croire.
Mais
même ce qu'il voit n'est pas le tout des choses. Voit-il tous les
fils et le serveur qui lui permettent d'envoyer un mail? Voit-il
l'enchevêtrement de son ADN? Voit-il les confins de notre galaxie?
Voit-il l'histoire humaine? Non, évidemment. Il voit des choses. Il
essaie de les analyser et en tire des théories qui sont peut-être
les siennes, mais qui peuvent être contredites.Notre homme croit sans doute qu'il existe un pays qui s'appelle l'Australie: il n'y a jamais mis les pieds. Il croit sans doute aux guerres napoléoniennes: il n'y était pas! Il croit aux planètes de notre système solaire: il n'en n'a "vu" aucune!
Et au delà de ce qu'il croit sans l'avoir vu directement, il y a des choses très importantes qu'on ne "voit" pas.
Au
sens strict, on ne « voit » pas l'amour, la tendresse, le
partage. Personne n'a jamais vu ce qui a permis à l'esprit de
Tolkien d'écrire Le Seigneur des Anneaux et à celui de
Montaigne d'écrire Les Essais. Personne donc ne "croit que ce qu'il voit". Ne ressemblons donc pas à notre pauvre homme si limité, de grâce!
D'ailleurs,
Thomas ne lui ressemble pas non plus. Thomas ne fait pas partie de
ces matérialistes hautains qui déclarent que le dossier « Dieu »
est classé. Thomas nous parle parce que nous voyons en lui le doute
qui est souvent le nôtre, même si nous sommes « croyants ».
Son surnom « Dydime » signifie jumeau. Jumeau de qui?? De
nous je pense, car Thomas ressemble à chacun d'entre nous et nous
pouvons nous reconnaître en lui ce matin. Son doute ressemble tant
au nôtre.
Nous
vivons dans une société qui n'est pas tendre envers les croyants,
vus comme des gens un peu naïfs et immatures. Cela crée une
pression sur certains: quand la majeure partie de notre élite
intellectuelle s'affirme agnostique ou athée, peut-on sérieusement
être chrétien? Il y a aussi ces prières auxquelles nous avons
parfois l'impression que Dieu n'a pas répondu; il y a les drames de
notre monde (guerres, injustices, désastre écologique): tout cela
peut nous faire douter de la réalité d'un Dieu d'amour.
Et
Thomas, justement, ne croit pas. Oh, il a cru bien sûr en ce Jésus
si extraordinaire par ses paroles et ses actes. Mais Jésus est mort,
et tout est fini. Quand Jésus a annoncé qu'il partait vers
Jérusalem, Thomas a dit aux autres disciples: «Allons-y, nous
aussi, afin de mourir avec lui. » (Jean 11.16). Paroles
magnifiques de détermination, mais qui n'ont pas empêché Thomas
d'abandonner Jésus, comme tous les autres. Voilà peut-être
pourquoi, à présent, Thomas se sent encore plus triste, encore plus
mal que les autres disciples. J'imagine que quand Jésus apparaît
une première fois à ses compagnons, Thomas est en train de se
terrer on ne sait où, rongé par la tristesse, la crainte et le
remords.
Et
quand les disciples lui disent « nous avons vu le Seigneur! »,
Thomas refuse de croire. Ou plutôt, il pose des conditions: trois
conditions:«Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous (et
d'une), si je n'y mets pas mon doigt (et de deux) et si je ne mets
pas ma main dans son côté (et de trois), je ne croirai pas.» Quand
on sait que ce chiffre de 3 symbolise souvent dans la Bible ce qui
est complet, parfait (2 Co 12.7-8, Jn 21.15-17) on voit que Thomas
exige d'être pleinement et complètement convaincu par des preuves
irréfutables.
Faut-il
y voir de l'entêtement? Je ne le pense pas. J'aurai plutôt tendance
à voir aussi dans ces paroles une forme de prière, une façon de
dire: « je ne peux pas y croire, je suis trop défait, c'est
trop incroyable. Il va vraiment m'en falloir beaucoup ».
Peut-être
cette idée nous aidera t'elle à combattre cette fausse image du
chrétien idéal, vivant dans la pure sérénité d'une foi sans
nuages, cette foi qui, bien sûr, ne se poserait jamais de questions.
Oui,
nous nous rendons compte de plus en plus que ce Thomas nous ressemble
vraiment beaucoup, avec nos craintes, nos doutes. Et cette
ressemblance est une bonne nouvelle pour nous.
Car,
absent, silencieux, Jésus a entendu celui qu'il aime. Huit jours
après, il réapparaît en sa présence. Qu'est-ce que cela veut
dire, si ce n'est nos doutes, nos incrédulités ne seront jamais un
obstacle pour Jésus, qu'ils n'empêcheront pas le Seigneur de venir
vers nous?
Et
pour Thomas, Jésus fait quelque chose de véritablement inouï. Une
à une, avec une précision étonnante, il réalise les conditions
posées par Thomas:
«Avance
ton doigt ici et regarde mes mains. Avance aussi ta main et mets-la
dans mon côté. Ne sois pas incrédule, mais crois!».
L’incrédule
a beau se retrancher dans la forteresse de son doute, Jésus est
vivant ; Jésus est puissant ; Jésus est le plus fort ; Jésus
balaie ses résistances et l'amène à ce qui a dû être la plus
grande joie de la vie de Thomas qui peut enfin pousser ce cri de foi
véritable, c’est-à-dire de confiance et de consécration : “Mon
Seigneur et mon Dieu” (v. 28). Plus tard, Jésus va quitter ses
disciples. Thomas ne le verra plus, mais il ne deviendra pas
incroyant pour autant. Car la foi n'est pas tant une question de vue
qu'une question de vie: une vie changée par la rencontre avec
Jésus.
Jésus est venu à la rencontre de Thomas.Fera-t-il la même chose pour nous ?
La réponse est un « oui » clair et net. Oui, il fera la même chose, mais il la fera autrement. Il ne nous vaincra et ne nous convaincra pas par des apparitions, du moins en règle générale. Il le fera en nous renvoyant au témoignage de ceux qui ont vu. Il le fera en nous renvoyant à la Parole reçue, à la Bible lue dans la communauté des frères. “Heureux sont ceux qui croient sans m’avoir vu”, dit Jésus à Thomas reconquis, et l’évangéliste ajoute : « 30 Jésus a accompli encore, en présence de ses disciples, beaucoup d'autres signes qui ne sont pas décrits dans ce livre.31 Mais ceux-ci ont été décrits afin que vous croyiez que Jésus est le Messie, le Fils de Dieu, et qu'en croyant vous ayez la vie en son nom. »
Jésus est venu à la rencontre de Thomas.Fera-t-il la même chose pour nous ?
La réponse est un « oui » clair et net. Oui, il fera la même chose, mais il la fera autrement. Il ne nous vaincra et ne nous convaincra pas par des apparitions, du moins en règle générale. Il le fera en nous renvoyant au témoignage de ceux qui ont vu. Il le fera en nous renvoyant à la Parole reçue, à la Bible lue dans la communauté des frères. “Heureux sont ceux qui croient sans m’avoir vu”, dit Jésus à Thomas reconquis, et l’évangéliste ajoute : « 30 Jésus a accompli encore, en présence de ses disciples, beaucoup d'autres signes qui ne sont pas décrits dans ce livre.31 Mais ceux-ci ont été décrits afin que vous croyiez que Jésus est le Messie, le Fils de Dieu, et qu'en croyant vous ayez la vie en son nom. »
Voyez-vous,
frères et soeurs, la Bible n'est pas un recueil de belles histoires,
elle n'est pas un livre de morale. La Bible est un témoignage rendu
à Jésus-Christ, le Fils de Dieu afin que nous placions notre
confiance en lui. Elle nous explique qui il est, ce qu'il a fait en
mourant pour nos fautes sur la croix afin que nous puissions être
pardonnés de toutes nos fautes. Nous pouvons voir Jésus dans ce
témoignage et apprendre que la volonté du Père c'est que « celui
qui voit le Fils et croit en lui ait la vie éternelle ».
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