samedi 30 octobre 2010

JEAN 8.31-36 (Fête de la Réforme)

JEAN 8.31-36

Jér. 31.31-34, Rom 3.19-28


Alors Jésus dit au Juifs qui avaient cru en lui: « si vous demeurez dans ma parole, vous êtes vraiment mes disciples, vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres. » Ils lui répondirent: « nous sommes la descendance d'Abraham et nous n'avons jamais été esclaves de personne. Comment peux-tu dire: 'vous deviendrez libres'? ». « En vérité, en vérité, je vous le dis, répliqua Jésus, toute personne qui commet le péché est esclave du péché. Or l'eslcave ne reste pas toujours dans la famille, c'est le fils qui y reste pour toujours. Si donc le Fils vous libère, vous serez réellement libres.




























Si vous demeurez dans mes paroles, vous êtes vraiment mes disciples, et la vérité vous affranchira.
Quand nous entendons ces paroles, il est facile d'en retenir une partie: la vérité nous affranchira. Voilà un programme qui semble bien appétissant n'est-ce pas?
Mais, à bien y réfléchir, plus nous pensons à ces paroles de Jésus, et plus les questions abondent. Tout d'abord, qu'est-ce au juste que la vérité? Et ensuite, qu'est-ce que ça veut dire d'être libre?
Dans la mentalité actuelle, il peut même sembler difficile de faire cohabiter les deux concepts de vérité et de liberté. Pour beaucoup de nos contemporains, la vérité est quelque chose de bien mouvant et qui dépend du contexte: la vérité d'untel ne sera pas celle d'un autre. Par ailleurs, quand on parle de liberté, de quoi parle t'on? Libre de quoi, d'abord?
Ces questionnements ne sont pas nouveaux: les juifs du temps de Jésus aussi avaient du mal à saisir cette notion de liberté qui rend libre.

Les gens auxquels Jésus s'adresse sont manifestement interessés par sa personnalité et son message. Ce sont des
Et Jésus, alors qu'il est déjà en route vers Jérusalem et vers la Croix, dit à ce groupe « suivez-moi », en testant du même coup leur loyauté et leur réelle compréhension de ce qu'il dit.

Jésus leur affirme que la vérité les rendra libres. Ici, nous devons bien comprendre que la vérité, c'est la révélation de Dieu en Christ.
Immédiatement, ils se focalisent sur le mot « libres » et, avec un aplomb incroyable, disent qu'ils ne comprennent pas: ils sont les descendants d'Abraham et n'ont jamais été esclaves: ils ne peuvent donc pas être libérés!
On a là un bel exemple de révisionnisme. Car enfin, même s'ils n'acceptent pas l'idée de Jésus d'une libération de la puissance du péché, ces Juifs devraient bien se souvenir de l'histoire de leur peuple! Ils connaissent le livre de l'Exode, qui montre comment Dieu a libéré les Israëlites de l'esclavage en Egypte pour les mener à la liberté de la Terre Promise. Apparamment, ils ont aussi oublié les livres d'Esaïe et de Jérémie, qui racontent comment Dieu a envoyé son peuple en captivité à Babylone pour l'en ramener ensuite. Surtout, quand ils affirment ne jamais avoir été esclaves de personne, on ne peut s'empêcher de rappeler que la Palestine est à ce moment là occupé par les légions romaines.
Non seulement ceux qui écoutent les paroles de Christ montrent qu'ils ne peuvent saisir ce que veut dire être libre du péché, mais leur attitude indique qu'en plus ils ont fait de leur héritage une idôle. Ils sont tellement fiers de leur ascendance, tellement assurés des droits que leur confère selon eux leur naissance qu'ils oublient qu'à chaque fois que leur peuple a rompu son alliance avec Dieu, il a eu à en payer les conséquences.

Et nous, femmes et hommes du 21ème siècle, comment entendons-nous ce que nous dit Christ?

Si vous demeurez dans ma parole, vous êtes vraiment mes disciples; vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres.

Pour nous qui vivons en France en 2010, la notion de liberté a un sens bien particulier. Nous jouissons depuis longtemps de libertés politiques fondamentales (droit de vote, droit de grève, liberté de conscience). Nous jouissons aussi de la liberté qui vient avec la prosperité: aucun d'entre nous ne va retourner chez lui en se demandant ce qu'il va mettre dans son assiette à midi. Ces libertés, nous les devons à des hommes et des femmes qui se sont battus pour que nous puissions en jouir. Alors pour nous aussi la question se pose: « libres? Mais libres de quoi? ». Et je crois que les paroles de Jésus nous invitent à regarder en nous-mêmes et à nous demander « de quoi suis-je esclave? Qu'est-ce qui domine ma vie au point d'obstruer ma relation avec Dieu et avec les autres? ». Oui, frères et soeurs, savons-nous reconnaître qu'il peut y avoir des choses dans nos vies qui peuvent se dresser comme un mur entre nous et Dieu? Elles sont nombreuses.
L'image que nous nous faisons de nous-mêmes peut devenir un tyran. Certains sont prêts à tout pour la mainenir. Cette image, elle peut être faite de ce que nous sommes (ou croyons être), notre bagage intellectuel, le quartier où nous habitons (je m'en suis rendu compte lors de mon déménagement: à deux rues près, nous sommes à présent beaucoup plus chic!!), notre apparence physique ou vestimentaire...Pensez à la façon dont vous présentez à quelqu'un que vous rencontrez pour la première fois: quelle image de vous cherchez-vous à transmettre? Tout cela n'est pas neutre, bien au contraire. Chez les jeunes, la question de l'apparence physique est même devenue centrale, après des décennies de matraquage publicitaires. Il n'y a qu'à penser aux nombre de jeunes filles atteintes de troubles de l'alimentation parce qu'elles sont obsédées par leur poids, par leur corps...
D'autres vont tout miser sur leur carrière et son évolution. Devenir cadre avant tel âge et, surtout, avant tel autre motive un nombre incroyable de gens. Plus nombreux encore sont ceux qui accordent la plus grande importance à combien ils gagnent, à comment ils vont pouvoir s'acheter ces choses qui vont leur permettre de conserver un certain « standing ».

Arrêtons-nous là, et résumons: à chaque fois que quoi que ce soit qui n'est pas Dieu devient le centre de nos vies, nous sommes dans l'esclavage et nous avons besoin de la vérité pour être libres. Et parfois, cet esclavage est tellement subtil que nous ne nous rendons pas compte qu'au lieu de dépendre du Dieu qui veut notre bonheur, nous sommes asservis à des choses parfois importantes mais sans doute pas essentielles. Dans ce cas, des choses qui pourraient être source de joie deviennent des fardeaux qui nous pèsent.

Pour nous, dès lors, la seule issue de secours se trouve dans la révélation de Dieu en Jésus-Christ, le Fils qui est venu auprès de nous.
Nous célébrons aujourd'hui le mouvement de Réforme qui a débuté par l'action de Martin Luther. Celui-ci a décrit le chrétien comme quelqu'un qui est la fois « juste et pécheur ». Parce que nous sommes humains, il y a toujours quelque chose dans nos vies qui nous emprisonnent et dont nous ne pouvons nous libérer nous-mêmes: le péché. Mais, parce ce que Jésus est mort pour nous, nos péchés sont pardonnés et nous pouvons retrouver notre communion avec Dieu.

Pour paraphraser ce que dit Paul en Romains 3:

Nous avons tous péché et nous sommes sortis de ce que Dieu voulait nous donner; mais nous sommes guéris et rétablis complètement par le don que Dieu nous fait en Jésus-Christ.

Frères et soeurs, les églises luthériennes se préparent déjà à célébrer le 500ème anniversaire de la Réforme en 2017. J'espère que, sans attendre cette commémoration, nous saurons nous rappeler que la Réforme du 16ème n'a eu qu'un enjeu: rétablir au sein de l'Eglise le véritable message de Jésus, qui avait été obscurci par plusieurs siècles de doctrines et de pratiques douteuses. Et si les Réformateurs ont dû aller jusqu'à la rupture (contre leur volonté première), c'est bien parce qu'ils savaient qu'on ne peut pas faire de concessions ou de compromis sur l'Evangile. Mais justement, cet Evangile, ce message de Jésus, comment l'annoncer et le vivre aujourd'hui?

Nous ne sommes plus au 16ème siècle, nous ne sommes même plus il y a 100 ans, alors que le christianisme était encore au moins le cadre moral de la majeure partie des Européens. Nous ne pouvons plus faire semblant de croire que rien ne s'est passé, et que les hommes et les femmes de 2010 se posent les mêmes questions que ceux de 1517 ou de 1850! Voilà pourquoi j'invite à se méfier de certaines « fidélités » qui ne sont en fait que des conservatismes frileux qui, si ils triomphent nous mèneront au désastre.
Il est inutile de penser que nous pourrons encore longtemps continuer de faire comme si rien n'avait changé. Si nous devions tomber dans ce travers, nous ressemblerions à un homme qui s'engagerait sur une autoroute avec un char à boeufs.
La grande chance de l'Eglise de la Réforme, c'est que nous ne confondons pas la forme et le fonds. Ce qui compte, c'est que l'autorité de la Bible soit reconnue, le reste est suceptible de modifications. Au 16ème siècle, une des grandes questions a été « qu'est-ce que l'Eglise ». Du côté de Rome, on affirmait que l'Eglise c'était ce qui était soumis au Pape, ce qui suivait certaines formes liturgiques. Du côté de la Réforme, on a pu grâce à Dieu rétablir la vérité: l'Eglise se trouve partout où la Parole est fidèlement prêchée et les sacrements droitement administrés. Rien de plus, rien de moins.

Aujourd'hui, nous sommes nous aussi réunis autour de la Parole et des sacrements. Nous sommes Eglise, appelés tous ensemble à être témoins de Jésus-Christ, la vérité qui rend libre. Comment? C'est à nous de répondre à cette question, avec l'aide du Saint Esprit.

Aucun commentaire: