samedi 9 octobre 2010

Luc 17.11-19





Autres lectures: 2 Rois 5.14-17, 2 Timothée 2.8-13


17.11
Jésus, se rendant à Jérusalem, passait entre la Samarie et la Galilée.
17.12
Comme il entrait dans un village, dix lépreux vinrent à sa rencontre. Se tenant à distance, ils élevèrent la voix, et dirent:
17.13
Jésus, maître, aie pitié de nous!
17.14
Dès qu'il les eut vus, il leur dit: Allez vous montrer aux sacrificateurs. Et, pendant qu'ils y allaient, il arriva qu'ils furent guéris.
17.15
L'un deux, se voyant guéri, revint sur ses pas, glorifiant Dieu à haute voix.
17.16
Il tomba sur sa face aux pieds de Jésus, et lui rendit grâces. C'était un Samaritain.
17.17
Jésus, prenant la parole, dit: Les dix n'ont-ils pas été guéris? Et les neuf autres, où sont-ils?
17.18
Ne s'est-il trouvé que cet étranger pour revenir et donner gloire à Dieu?
17.19
Puis il lui dit: Lève-toi, va; ta foi t'a sauvé.





Chers frères et soeurs,
chers amis,



Il y a de cela quelques semaines déjà, nous avions médité ensemble sur le sens de la parabole du Bon Samaritain. Nous retrouvons un Samaritain dans notre histoire d'aujourd'hui.

En plus d'appartenir à un peuple détesté et méprisé, le Samaritain souffre d'un malheur supplémentaire: il est lépreux, comme neuf autres compagnons d'infortune, qui eux sont juifs.
Même si ,dans la Bible, le terme désigne toute maladie sérieuse de la peau, la lèpre était une maladie terrible, synonyme d'exclusion. Relisez Lévitique 13, et vous verrez que la Loi de Moïse exigeait que les lépreux habitent à l'écart, en étant bien sûr privés de vie sociale et religieuse. Exclus, sans soutien, les lépreux étaient dans une situation misérable. Pour eux, la vie n'était déjà plus qu'une antichambre de la mort.
C'est alors que ces 10 hommes vont rencontrer Jésus. D'emblée, ils vont manifester leur foi en lui. Tout d'abord, ils l'appellent « maître », epistates en grec, un terme que Luc ne met normalement que dans la bouche des disciples, de ceux qui suivent Jésus. En donnant ce titre à Jésus, les lépreux témoignent d'une foi profonde en son autorité: sans nul doute, la réputation de guérisseur de Christ est arrivée jusqu'à eux.
Les mots qui suivent le montrent bien: « aie pitié de nous!! ». Les lépreux implorent la guérison. Jésus a alors un comportement étonnant. Il s'en tient aux prescriptions de la Loi de Moïse que les lépreux avaient respectée en se tenant « à distance ». Il les envoie vers les prêtres, ce qui signifie qu'ils doivent déjà se considérer comme guéris. Les prêtres, en effet, ne guérissaient pas: ils constataient la guérison, accomplissaient les sacrifices d'usage et réintégraient l'ex-malade dans la communauté.
En obéissant à l'ordre de Jésus, les dix lépreux manifestent une deuxième leur foi. Luc nous dit en effet que c'est alors qu'ils étaient en chemin qu'ils furent guéris. Au moment donc où Jésus leur dit d'aller vers le prêtre, ils sont encore lépreux.

Et nous, savons-nous imiter ces hommes? Savons-nous, avec notre lèpre, quelque qu'elle soit, aller vers Jésus, implorer son pardon et; quand nous l'avons reçu, y croyons-nous assez pour qu'il nous transforme et change radicalement notre vie?
C'est, je crois, une des grandes causes de la faiblesse du christianisme actuel que de ne plus voir en Jésus celui qui veut avoir pitié de nous, qui veut nous restaurer dans notre être, qui veut nous pardonner.
Les lépreux ont osé crier à Jésus, ils ont osé implorer son aide. Et nous, est-ce que nous osons faire appel à lui, pour qu'il puisse délivrer sa puissance de guérison dans nos vies?

En parlant de guérison, je voudrais faire sur ce thème une parenthèse qui me semble nécessaire compte-tenu de notre texte. Foi et guérison; le sujet est très délicat et il est difficile de l'aborder. D'une part, depuis longtemps et sous l'influence d'une pensée qui n'a rien de biblique, on a séparé l'âme du corps. L'Eglise s'occupe de la première, la Faculté de Médecine du second et c'est très bien comme ça. Cependant, de plus en plus d'études médicales montrent que les personnes croyantes ont plus de chances de guérison que les athées: auto-suggestion? Peut-être...
D'autre part, nous devons faire face au sein de l'Eglise à une courant très dangereux, dit de « l'Evangile de la Prospérité ». Répandu dans des milieux charismatiques, il affirme que le chrétien est forcément riche et en bonne santé. C'est bien sûr une hérésie complète, élaborée en tordant le sens de certains textes soigneusement tirés de leur contexte. Ceux qui la propagent ne « dispensent pas droitement la parole de vérité » (2 Timothée), comme l'exige Paul des serviteurs de Dieu. Du coup, dans les Eglises bibliques, on n'ose plus parler d'un lien possible entre foi et guérison.
Pourtant, quand je lis ma Bible, il me semble impossible de ne pas reconnaître qu'un lien est fait. La puissance de Christ est aussi une puissance de guérison physique et mentale. Pas premièrement, mais aussi. Nous disons parfois à une personne malade: « je vais prier pour toi ». Croyons-nous vraiment que Dieu peut agir dans le cas de cette personne? Croyons-nous vraiment qu'il peut la guérir?

Bien sûr, il ne s'agit pas d'ordonner à Dieu de faire des miracles. L'apôtre Paul a prié pour être guéri, et cela n'est pas arrivé parce que Dieu avait un autre plan pour lui. Toutes nos prières, y compris pour une guérison, doivent être faites dans l'esprit du Notre Père « que TA volonté soit faite ». Dieu est Souverain, mais cela ne doit pas nous empêcher de nous approcher de lui dans la foi et de lui demander une guérison du corps ou de l'esprit.
Je crois que nous pourrons ainsi retrouver un sain équilibre biblique, éloigné des fadaises des fanatiques et du doute destructeur des incroyants.

Une dernière remarque sur l'autre grand thème de notre texte: la reconnaissance. D'une certaine façon, l'évangile de ce dimanche nous permet de continuer notre réflexion que nous avons eu la semaine dernière lors de la Fête d'actions de grâce.
Nous avons vu que le groupe des dix était hétéroclite: 9 juifs, 1 Samaritain. En fait, ce qui les avait réuni, c'est la maladie. Quand on a la lèpre, les querelles religio-ethniques passent au second plan.Unis dans la maladie, les dix hommes le sont aussi dans la guérison.
C'est là qu'une différence apparaît: seul le Samaritain, l'étranger, revient vers Jésus pour lui dire merci. Luc se sert de cet incident pour souligner un thème qui lui est cher: en Jésus, le chemin vers Dieu est ouvert à tous, quelque soit leur race, leur origine, leur couleur, mais il y a sans doute plus à voir ici.
Seul le Samaritain s'entend dire « Lève toi, ta foi t'a sauvé ».
Bien sûr, on peut dire qu'en tant que Samaritain, même guéri, il serait resté impur aux yeux des prêtres du Temple de Jérusalem. Mais notre homme aurait aussi bien pu aller accomplir les rituels appropriés chez un prêtre de son propre peuple.

Pourtant, il ne le fait pas. Il retourne directement vers celui qui l'a guéri. Et c'est bien ce que Jésus reproche aux neuf autres: d'en être restés là, de s'être contentés d'aller au Temple, d'être retournés, non pas à lui, mais à la norme banale d'une religion toute faite.
Leur problème est qu'ayant été rendus à la normalité sociale, ils sont aussitôt retournés dans le circuit religieux traditionnel. Le Samaritain, peut-être parce qu'il avait conscience d'être un marginal, va vers Jésus et accède à ce qu'il faut bien appeler une réalité supérieure de la foi.
Je parle ici d'un niveau supérieur sans tomber dans l'élitisme. Il s'agit simplement de se rendre compte que les neuf lépreux qui ne sont pas revenus vers Jésus sont passés à côté de quelque chose de central, et que nous pouvons courir le même risque.

Oui, le danger est toujours là, même si nous avons la foi, de ne pas placer Jésus en premier, de ne pas le mettre au centre de nos vies. Ce qui me frappe dans ce texte, c'est que c'est bien la religion qui a empêché les neuf lépreux de revenir à Christ: le Temple, ses rituels. La religion, dont Karl Barth a pu dire qu'elle était la vêtements usés de la foi.
La religion qui court toujours le risque de passer avant ce que Jésus veut vraiment offrir à chacun de nous: une relation. La religion, qui n'est que l'ombre de la foi, et qui nous faire courir le risque de tomber dans une tranquilité ronronnante ou un traditionalisme craintif, plus attachés à la forme (la liturgie, les habitudes) qu'au fond (Jésus-Christ lui-même). Dans ce cas, quelle tragique inversion de valeurs, quand la personne du Sauveur passe au second plan par rapport à des choses qui, n'en déplaisent à certains, n'ont rien d'essentiel!!
Alors, défions nous de toute religiosité qui risquerait de se placer entre nous et Dieu. « Il y a un seul Médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme, qui s'est donné lui-même » (1 Tim. 2 : 5) . Un seul médiateur: Jésus.
Le reste (la tradition, le pasteur, l'appartenance à telle ou telle église) ne nous rapprochera jamais de Dieu. Alors, courons vite vers Jésus et vers Jésus seul! C'est en lui que nous trouverons tout ce dont nous avons besoin.

En effet, la foi vécue comme une relation vivante et personnelle avec Christ est quelque chose qui vient non pas nous faire stagner, mais nous faire avancer. « Lève-toi » dit Jésus au Samaritain guéri. « Lève toi » comme un homme ou une femme libre. « Lève toi » comme quelqu'un prêt à se mettre en marche.

Voilà le message que nous adresse ce matin celui qui est venu pour nous apporter la guérison et l'espérance, le Seigneur Christ. C'est en lui seul que nous pourrons donner gloire à Dieu pour son amour et pour sa grâce.

Amen.

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