Chers
frères et soeurs,
chers
amis,
Nous
avons du mal à nous rendre compte de l'énorme importance du sel.
Pendant des siècles, le sel a été un des seuls moyens de conserver
les aliments, et il avait donc une importance vitale. C'est pourquoi
il était très taxé, comme dans le cas de la gabelle en France
avant 1789. Cela vous surprendra peut-être, mais on estime que le
sel a causé plus de guerres que l'or!
Aujourd'hui,
le sel est devenu un produit banal et peu cher. En fait, on s'est
même rendu des dangers d'une consommation excessive de sel (laquelle
n'existait pas auparavant). Mais, dans le même temps, il nous faut
du sel pour être en bonne santé: notre sang contient 0,9% de sel,
qui est nécessaire pour maintenir l'équilibre dans nos cellules.
Il
y a 2000 ans en Israël, au temps de Jésus, on ne se posait pas
toutes ces questions. Il n'y avait pas de produits sans sel et on
n'en avait pas besoin. En plus de sa fonction vitale dans la
conservation des aliments, on utilisait aussi le sel comme
médicament, pour lutter contre certaines bactéries. D'ailleurs, il
est probable que Jésus, quand il est né, a été comme les autres
enfants frotté avec du sel, car on croyait que cela aidait à les
garder en bonne santé. Les nombreux bergers que comptaient le pays
en donnaient aussi à leurs brebis. Et il y a encore une autre
dimension, que nous verrons tout à l'heure, et qui faisait que le
sel était omniprésent.
Il
n'est donc pas surprenant que Jésus ait utilisé le sel, cette chose
si présente et importante, comme métaphore d'une vérité
essentielle. Jésus dit à ses disciples, comme nous le rapporte
Matthieu « vous êtes le sel de la terre ». Mais il
rajoute un avertissement « Le sel est une bonne chose ;
mais si le sel perd sa saveur, avec quoi l'assaisonnerez-vous ?
Ayez du sel en vous-mêmes, et soyez en paix les uns avec les
autres ».
De
nos jours, le sel ne perd plus sa saveur. Mais le sel qu'on utilisait
dans le pays de Jésus venait de la Mer Morte, et il était mélangé
avec du sable. Et c'était un gros problème, parce que du sel
mélangé peut effectivement s'affadir, perdre sa saveur. Surtout, si
l'on mettait de la viande dans ce type de sel trop impur, elle allait
non pas se conserver, mais pourrir. Et c'est là la pointe de ce que
Jésus nous dit aujourd'hui: si vous êtes comme du sel impur,
mélangé, sans gôut et et sans réelle utilité, vous ne pourrez
pas servir à donner de la saveur autour de vous, vous ne pourrez pas
contribuer à sauvergarder ce qui est important. Nous devons être
comme du sel, du bon sel.
Le
sel est composé de deux éléments. Le premier, c'est le sodium, un
élément très actif qui, dans le domaine naturel, ne se retrouve
lié qu'avec d'autres éléments. Le deuxième élément, c'est la
chlorine, ce gaz empoisonné qui donné à l'eau de javel son odeur.
Et quand sodium et chlorine sont réunis, cela donne du sodium
chloride, notre « sel de tabel ».
L'amour
et la vérité sont deux des grand piliers de la foi chrétienne, et
je crois qu'on peut les comparer au sodium et à la chlorine.
L'amour
sans vérité risque de dégénérer rapidement; de ne plus être
l'amour mais un sentimentalisme mièvre et aveugle. D'un autre côté,
la vérité sans l'amour peut être empoisonnée, car trop dure.
Parfois même, elle peut devenir un véritable repoussoir. Mais quand
la vérité et
l'amour se trouvent unies dans une communauté chrétienne ou dans un
chrétien, alors nous sommes ce que Jésus appelle « le sel de
la terre »
A
l'époque de Jésus, il y avait trois caractéristiques associées au
sel.
Tout
d'abord, en raison de sa blancheur, la pureté. Un chrétien devrait
être pur, séparé des tendances mauvaises qui l'entourent. Notre
mode de vie et nos pensées devraient être libres de ce qui pourrait
les polluer.
Deuxièmement,
comme nous l'avons déjà vu, le sel était utilisé pour conserver
la nourriture. Dans la même façon, il faudrait que l'influence de
l'Eglise permette d'éviter la corruption de nos sociétés et ce à
tous les niveaux.
Troisièmement,
la chose peut-être la plus évidente: le sel donne du goût aux
aliments les plus fades. Notre monde est fade, et la vie a trop
souvent un goût de papier mâché. Je me souviens de cet homme qui,
désabusé par ces échecs personnels et la dureté du temps, me
disait: « ils nous ont même enlevé le goût du pain ».
La vie est faite pour être appréciée, fêtée comme un bon repas.
C'est à nous de lui redonner du goût pour tous ceux qui veulent
retrouver les vraies saveurs.
Mais
ça veut dire quoi d'être « salé »? En Colossiens 4.6,
Paul dit par exemple « Que
votre parole soit toujours accompagnée de grâce, assaisonnée de
sel, afin que vous sachiez comment il faut répondre à chacun. ».
Notre discours doit être pur, c'est à dire libre de tout ce qui
pourrait le polluer: préjudices, agressivité. Mais pensez aussi à
nos yeux, à nos mains et à nos pieds que Jésus a évoqué plus
haut dans ce passage. Le Seigneur ne nous dit-il pas de faire
attention à la façon dont nous regardons le monde, à la façon
dont nous agissons, à la façon dont nous avançons dans la vie?
Tout cela doit avoir du sel...
Car
je suis persuadé que, pour avoir un avenir dans nos pays, l'Eglise
devra garder son goût. On nous a dit, il y a déjà quelques années,
que l'Eglise devait suivre toutes les tendances de la société, se
faire « moderne »...Le résultat? Des églises vides
partout en Europe. Pourquoi? Parce que si l'Eglise n'est pas
différente du monde, si elle a le même goût, les gens en concluent
(fort justement) que ce n'est pas sérieux et qu'il est inutile de
perdre du temps avec ça. Oui, vraiment, quand elle perd sa saveur,
l'Eglise n'a plus, comme Jésus le dit dans l'Evangile de Matthieu
qu'à « être jetée dehors, et foulée aux pieds par les
hommes. »
En
vous disant cela, je n'incite pas l'Eglise à adopter une attitude
impérialiste, qui chercherait à dominer la société. Pensez-y:
quand vous mettez une peu de sel sur votre steak, il disparaît, il
devient invisible et pourtant on sent la différence au goût et on
sait qu'il est là. De la même façon, nous ne sommes pas appelés à
être sel de la terre pour attirer l'attention sur nous-même, mais
pour simplement, discrètement, porter les signes du Royaume de Dieu
sur terre. Cela peut être par des actions de solidarité, la visite
des malades, la préservation de l'environnement, le témoignage de
notre foi dans nos familles et au travail. Cela se fait aussi et
surtout par l'annonce de la Bonne Nouvelle que ce soit lors des
cultes, les études bibliques, les actions diverses dans
l'évangélisation. Croyez-moi, même quelques petits grains peuvent
changer le goût de bien des choses.
Alors
entendons la mise en garde de Jésus. Prenons garde de ne pas nous
affadir. Vous connaissez peut-être le tableau de Léonard de Vinci
La dernière Cène. Il y a un détail frappant: si on regarde bien,
on voit que Léonard a représenté un Judas qui vient de renverser
un petit bol de sel. Juads, celui qui a trahi le Christ, était
devenu infidèle. Il avait perdu son sel. Et encore aujourd'hui, nous
risquons souvent de perdre notre saveur.
Pourtant
en Lévitique, il est dit: « Tu mettras du sel sur toutes tes
offrandes; tu ne laisseras point ton offrande manquer de sel, signe
de l’alliance de ton Dieu;
sur toutes tes offrandes tu mettras du sel. »
Le sel, signe de
l'alliance de ton Dieu...Voilà qui nous parle de fidélité. La
fidélité que nous devons à l'alliance de notre baptême. La
fidélité que Dieu nous promet et dont nous savons qu'elle nous
accompagnera toujours. La prochaine fois que vous prendrez du sel,
faites-en un mémorial de la fidélité de Dieu à votre égard, et
soyez encouragés.
Oui, cette histoire de
sel est une histoire de fidélité. Fidélité qui vient de la même
racine que « foi »... Notre Dieu fidèle nous appelle à
lui être fidèle dans un monde qui a terriblement besoin d'être
assaisonnée par sa présence et sa grâce.
Peut-être que notre vie
pourrait être plus « salée ». Alors tournons-nous vers
tout ce que Jésus nous donne pour que nous gardions notre saveur:
son Esprit Saint qui nous enseigne, sa Parole et ses sacrements, son
exemple surtout. Si nous suivons Jésus en disciples, notre vie sera
« assaisonnée de sel » et cette saveur donnera
peut-être envie à d'autres de s'approcher de Christ.
Dans les familles on
entend souvent autour de la table « tiens passe-moi le sel s'il
te plaît ». Jésus lui, nous demande de passer le sel à tous
ceux qui ont besoin de retrouver du goût dans leur existence. Il
sera là pour nous aider à garder notre saveur en marchant dans ses
voies.
Amen.
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