dimanche 30 septembre 2012

MARC 9.38-50

Chers frères et soeurs,
chers amis,

Nous avons du mal à nous rendre compte de l'énorme importance du sel. Pendant des siècles, le sel a été un des seuls moyens de conserver les aliments, et il avait donc une importance vitale. C'est pourquoi il était très taxé, comme dans le cas de la gabelle en France avant 1789. Cela vous surprendra peut-être, mais on estime que le sel a causé plus de guerres que l'or!
Aujourd'hui, le sel est devenu un produit banal et peu cher. En fait, on s'est même rendu des dangers d'une consommation excessive de sel (laquelle n'existait pas auparavant). Mais, dans le même temps, il nous faut du sel pour être en bonne santé: notre sang contient 0,9% de sel, qui est nécessaire pour maintenir l'équilibre dans nos cellules.
Il y a 2000 ans en Israël, au temps de Jésus, on ne se posait pas toutes ces questions. Il n'y avait pas de produits sans sel et on n'en avait pas besoin. En plus de sa fonction vitale dans la conservation des aliments, on utilisait aussi le sel comme médicament, pour lutter contre certaines bactéries. D'ailleurs, il est probable que Jésus, quand il est né, a été comme les autres enfants frotté avec du sel, car on croyait que cela aidait à les garder en bonne santé. Les nombreux bergers que comptaient le pays en donnaient aussi à leurs brebis. Et il y a encore une autre dimension, que nous verrons tout à l'heure, et qui faisait que le sel était omniprésent.

Il n'est donc pas surprenant que Jésus ait utilisé le sel, cette chose si présente et importante, comme métaphore d'une vérité essentielle. Jésus dit à ses disciples, comme nous le rapporte Matthieu « vous êtes le sel de la terre ». Mais il rajoute un avertissement « Le sel est une bonne chose ; mais si le sel perd sa saveur, avec quoi l'assaisonnerez-vous ? Ayez du sel en vous-mêmes, et soyez en paix les uns avec les autres ».

De nos jours, le sel ne perd plus sa saveur. Mais le sel qu'on utilisait dans le pays de Jésus venait de la Mer Morte, et il était mélangé avec du sable. Et c'était un gros problème, parce que du sel mélangé peut effectivement s'affadir, perdre sa saveur. Surtout, si l'on mettait de la viande dans ce type de sel trop impur, elle allait non pas se conserver, mais pourrir. Et c'est là la pointe de ce que Jésus nous dit aujourd'hui: si vous êtes comme du sel impur, mélangé, sans gôut et et sans réelle utilité, vous ne pourrez pas servir à donner de la saveur autour de vous, vous ne pourrez pas contribuer à sauvergarder ce qui est important. Nous devons être comme du sel, du bon sel.

Le sel est composé de deux éléments. Le premier, c'est le sodium, un élément très actif qui, dans le domaine naturel, ne se retrouve lié qu'avec d'autres éléments. Le deuxième élément, c'est la chlorine, ce gaz empoisonné qui donné à l'eau de javel son odeur. Et quand sodium et chlorine sont réunis, cela donne du sodium chloride, notre « sel de tabel ».
L'amour et la vérité sont deux des grand piliers de la foi chrétienne, et je crois qu'on peut les comparer au sodium et à la chlorine.
L'amour sans vérité risque de dégénérer rapidement; de ne plus être l'amour mais un sentimentalisme mièvre et aveugle. D'un autre côté, la vérité sans l'amour peut être empoisonnée, car trop dure. Parfois même, elle peut devenir un véritable repoussoir. Mais quand la vérité et l'amour se trouvent unies dans une communauté chrétienne ou dans un chrétien, alors nous sommes ce que Jésus appelle « le sel de la terre »

A l'époque de Jésus, il y avait trois caractéristiques associées au sel.

Tout d'abord, en raison de sa blancheur, la pureté. Un chrétien devrait être pur, séparé des tendances mauvaises qui l'entourent. Notre mode de vie et nos pensées devraient être libres de ce qui pourrait les polluer.

Deuxièmement, comme nous l'avons déjà vu, le sel était utilisé pour conserver la nourriture. Dans la même façon, il faudrait que l'influence de l'Eglise permette d'éviter la corruption de nos sociétés et ce à tous les niveaux.

Troisièmement, la chose peut-être la plus évidente: le sel donne du goût aux aliments les plus fades. Notre monde est fade, et la vie a trop souvent un goût de papier mâché. Je me souviens de cet homme qui, désabusé par ces échecs personnels et la dureté du temps, me disait: « ils nous ont même enlevé le goût du pain ». La vie est faite pour être appréciée, fêtée comme un bon repas. C'est à nous de lui redonner du goût pour tous ceux qui veulent retrouver les vraies saveurs.

Mais ça veut dire quoi d'être « salé »? En Colossiens 4.6, Paul dit par exemple « Que votre parole soit toujours accompagnée de grâce, assaisonnée de sel, afin que vous sachiez comment il faut répondre à chacun. ». Notre discours doit être pur, c'est à dire libre de tout ce qui pourrait le polluer: préjudices, agressivité. Mais pensez aussi à nos yeux, à nos mains et à nos pieds que Jésus a évoqué plus haut dans ce passage. Le Seigneur ne nous dit-il pas de faire attention à la façon dont nous regardons le monde, à la façon dont nous agissons, à la façon dont nous avançons dans la vie? Tout cela doit avoir du sel...

Car je suis persuadé que, pour avoir un avenir dans nos pays, l'Eglise devra garder son goût. On nous a dit, il y a déjà quelques années, que l'Eglise devait suivre toutes les tendances de la société, se faire « moderne »...Le résultat? Des églises vides partout en Europe. Pourquoi? Parce que si l'Eglise n'est pas différente du monde, si elle a le même goût, les gens en concluent (fort justement) que ce n'est pas sérieux et qu'il est inutile de perdre du temps avec ça. Oui, vraiment, quand elle perd sa saveur, l'Eglise n'a plus, comme Jésus le dit dans l'Evangile de Matthieu qu'à « être jetée dehors, et foulée aux pieds par les hommes. »
En vous disant cela, je n'incite pas l'Eglise à adopter une attitude impérialiste, qui chercherait à dominer la société. Pensez-y: quand vous mettez une peu de sel sur votre steak, il disparaît, il devient invisible et pourtant on sent la différence au goût et on sait qu'il est là. De la même façon, nous ne sommes pas appelés à être sel de la terre pour attirer l'attention sur nous-même, mais pour simplement, discrètement, porter les signes du Royaume de Dieu sur terre. Cela peut être par des actions de solidarité, la visite des malades, la préservation de l'environnement, le témoignage de notre foi dans nos familles et au travail. Cela se fait aussi et surtout par l'annonce de la Bonne Nouvelle que ce soit lors des cultes, les études bibliques, les actions diverses dans l'évangélisation. Croyez-moi, même quelques petits grains peuvent changer le goût de bien des choses.


Alors entendons la mise en garde de Jésus. Prenons garde de ne pas nous affadir. Vous connaissez peut-être le tableau de Léonard de Vinci La dernière Cène. Il y a un détail frappant: si on regarde bien, on voit que Léonard a représenté un Judas qui vient de renverser un petit bol de sel. Juads, celui qui a trahi le Christ, était devenu infidèle. Il avait perdu son sel. Et encore aujourd'hui, nous risquons souvent de perdre notre saveur.

Pourtant en Lévitique, il est dit: « Tu mettras du sel sur toutes tes offrandes; tu ne laisseras point ton offrande manquer de sel, signe de l’alliance de ton Dieu; sur toutes tes offrandes tu mettras du sel. »

Le sel, signe de l'alliance de ton Dieu...Voilà qui nous parle de fidélité. La fidélité que nous devons à l'alliance de notre baptême. La fidélité que Dieu nous promet et dont nous savons qu'elle nous accompagnera toujours. La prochaine fois que vous prendrez du sel, faites-en un mémorial de la fidélité de Dieu à votre égard, et soyez encouragés.

Oui, cette histoire de sel est une histoire de fidélité. Fidélité qui vient de la même racine que « foi »... Notre Dieu fidèle nous appelle à lui être fidèle dans un monde qui a terriblement besoin d'être assaisonnée par sa présence et sa grâce.

Peut-être que notre vie pourrait être plus « salée ». Alors tournons-nous vers tout ce que Jésus nous donne pour que nous gardions notre saveur: son Esprit Saint qui nous enseigne, sa Parole et ses sacrements, son exemple surtout. Si nous suivons Jésus en disciples, notre vie sera «  assaisonnée de sel » et cette saveur donnera peut-être envie à d'autres de s'approcher de Christ.

Dans les familles on entend souvent autour de la table « tiens passe-moi le sel s'il te plaît ». Jésus lui, nous demande de passer le sel à tous ceux qui ont besoin de retrouver du goût dans leur existence. Il sera là pour nous aider à garder notre saveur en marchant dans ses voies.

Amen.

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