dimanche 15 novembre 2009

Esaïe 54, 6-14

6 ¶ L’Eternel te rappelle comme un époux rappelle la femme abandonnée, à l’esprit accablé, la compagne de la jeunesse qu’il aurait répudiée. C’est ce que déclare ton Dieu.
7 Pour un petit moment, je t’ai abandonnée, mais avec beaucoup de tendresse je vais te rassembler.
8 Dans le déchaînement de mon indignation, je t’ai caché ma face pour un petit instant, mais dans mon amour éternel, j’ai de la tendresse pour toi. C’est là ce que déclare ton libérateur, l’Eternel.
9 Car il en est pour moi comme au temps de Noé. J’avais juré alors que les eaux du déluge ne submergeraient plus la terre. De même, je fais le serment de ne plus m’irriter à ton encontre, et de ne plus t’adresser de reproches.
10 Même si les montagnes se mettaient à bouger, même si les collines venaient à chanceler, mon amour envers toi ne bougera jamais ; mon alliance de paix ne chancellera pas, déclare l’Eternel, rempli de tendresse pour toi.
11 ¶ O cité malheureuse, battue par la tempête, privée de réconfort : dans un mortier de jaspe, j’enchâsserai tes pierres et je te fonderai sur des saphirs.
12 Je sertirai tes tours de créneaux en rubis, je te ferai des portes en pierres d’escarboucle et je t’entourerai d’un rempart de pierres précieuses.
13 Tous tes enfants seront instruits par l’Eternel et la paix de tes fils sera très grande.
14 Tu seras affermie par la justice, à l’abri de toute oppression ; tu n’auras rien à craindre, car la terreur sera bannie et elle ne t’atteindra plus.





Frères et sœurs, nous voici arrivés aux trois derniers dimanches de l’Année ecclésiastique. Lectures, prières, cantiques élèvent nos regards vers la fin du monde, le retour du Christ et le Jugement dernier.
Tout le monde sait cela ! Voyez les affiches des cinémas ! On en précise même la date : c’est pour 2012 ; dans trois ans donc… Ce sera pour beaucoup un jour effroyable, - d’angoisse, de larmes et de pleurs. Le croyant, lui, attend ces événements avec impatience comme le jour de sa délivrance. Toute la Bible nous invite à regarder la fin du monde avec confiance. C’est le cas de ce passage, dans lequel Dieu parle à Israël. Il lui parle comme à une épouse et lui dit : Je t’aime et Tu seras très belle !



I
Ecoutons le Seigneur, par la bouche de son prophète : « L’Eternel t’a rappelée comme une femme abandonnée, à l’esprit abattu ; comme une femme des jeunes années qu’on a rejetée, dit ton Dieu. Pendant un court moment, je t’avais abandonnée, mais c’est avec une grande compassion que je t’accueillerai ».
Frères et sœurs, Israël ressemble à une épouse infidèle qui est rentrée au foyer – c’est la femme du boulanger, chez Pagnol. Alors Dieu lui pardonne et lui promet de l’aimer à nouveau d’un amour parfait. Qu’est-ce qu’elle avait à se faire pardonner ?
Israël avait suivi des dieux païens comme on prend un amant. Son infidélité était devenue si grande que son époux l’avait livrée à ses ennemis pour être déportée. Jérusalem, le temple et la nation entière avaient été détruits.
A Babylone pourtant, le peuple se repent. Et Dieu passe l’éponge. Il l’« accueille avec une grande affection » et lui déclare qu’il l’aime « d’un amour éternel ».
Messieurs, vous trouvez également, j’en suis sûr, de belles formules pour dire votre amour à votre femme ; je pense par exemple à ces médailles sur lesquelles on peut lire : « Je t’aime plus qu’hier et moins que demain. » C’est beau ! La formule exprime l’intention d’aimer sa femme chaque jour davantage.
Mais vous remarquerez que c’est aussi l’aveu d’un amour imparfait, puisqu’il est plus grand qu’hier mais aussi moins grand que demain ! Sans parler qu’il y a souvent loin de la médaille au cœur et que la belle promesse peut être aussi une parole sans lendemain.
L’amour de Dieu est différent. Lui aussi trouve de belles formules pour déclarer son amour : « Quand les montagnes s’éloigneraient, quand les collines chancelleraient, mon amour ne s’éloignera point de toi, et mon alliance de paix ne chancellera point, dit l’Eternel qui a compassion de toi ».


Bien sûr, on a creusé un tunnel sous le Mont-Blanc et percé d’autoroutes la plupart des massifs européens, mais quoi de plus imposant et difficile à déplacer qu’une montagne ? Montagnes et collines semblent bien éternelles.
Pourtant, je lisais dans la presse cette semaine que le Mont-Blanc a perdu 45cm en deux ans, et que les neiges éternelles du Kilimandjaro ne seront bientôt plus qu’un souvenir ! Au Dernier Jour, Pierre dit que collines et montagnes disparaîtront dans le feu ; mais je vous rassure : rien ne parviendra jamais à faire fondre l’amour de Dieu !
L’amour de Dieu est plus élevé que le Kilimandjaro, il ne subit pas les effets du dérèglement climatique ; l’amour de Dieu dure à toujours. C’est cette hauteur, cette permanence de l’amour de Dieu qu’exprime aussi ce célèbre verset : Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique ; tandis que Jean exprime sa perfection de la manière suivante : Dieu est amour.
Mais quel est cet amour qui présente tout de même quelques failles ? Dieu ne vient-il pas d’admettre : « Pendant un court moment, je t’avais abandonnée … Dans un débordement de colère, je m’étais un instant caché à toi ? » Dieu a même l’air de s’excuser et d’exprimer ses regrets !
Esaïe revient ici sur l’exil en terre étrangère. Le Seigneur a été contraint d’infliger à sa bien-aimée une sanction exemplaire. Peut-on qualifier cela de manque d’amour ? Sa justice et sa sainteté l’exigeaient ; et Israël en avait bien besoin, car sans ce châtiment, elle ne se serait pas repentie.
On relèvera à la décharge du mari trompé toutes les manifestations d’une grande patience. Malgré des infidélités répétées, Dieu n’a pas cessé d’aimer.
Il l’a montré en multipliant les prophètes et les déclarations d’amour enflammées. Les avertissements aussi, pour appeler sa promise à la repentance… Aucune indifférence donc, rien qu’un attachement obstiné à son alliance. Et maintenant qu’elle est revenue, Dieu lui redit ces paroles qui font tellement de bien : « Je t’aime ! »


Des paroles d’amour font toujours du bien. Surtout quand c’est Dieu qui les prononce. Quand il dit : ‘Je t’aime’, il faut traduire : ‘Je veillerai sur toi comme un mari attentionné ; je te protègerai de tes ennemis, je te comblerai de mes bénédictions, je te consolerai’.
Chers amis, j’espère que vous avez tous l’occasion d’entendre ces mots si doux : ‘Je t’aime’ ! Elles font tellement de bien quand elles viennent de notre conjoint, d’un ou d’une fiancée, de nos parents ou de nos enfants, ou même d’un ami. Paroles trop rares en vérité, parce qu’elles demandent d’avoir la simplicité d’exprimer ses sentiments, de se lâcher un peu dans sa pudeur, ou tout simplement parce que l’amour n’est pas toujours ce qu’il devrait être… Alors une déclaration de Dieu : avouez qu’il y a de quoi être retourné !
Mais au fait : que nous apporte l’amour du Seigneur ?
Quelqu’un a dit un jour : l’amour n’existe pas s’il n’y a pas de preuve d’amour. Comment ce passage de l’Ancien-Testament a-t-il trouvé son accomplissement ? Paul écrit : « Dieu prouve son amour envers nous, en ce que, lorsque nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous » (Rm6, 8). Et Jean, dans son Evangile, rapporte ces mots du Seigneur Jésus : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. Vous êtes mes amis » ! « Je vous appelle ainsi – déclare Jésus - parce que je vous ai fait connaître tout ce que j’ai appris de mon Père » (Jn 15, 13) Le Messie annoncé par les prophètes est venu en la personne de Jésus : c’est lui qui purifie son peuple de ses péchés par l’offrande de sa vie sur la croix. Non pas que les hommes méritaient cela, mais par pure grâce : il brise la malédiction entrée dans le monde avec Adam. Comme c’était annoncé également, la mort n’a pas pu le retenir et, le troisième jour, il est ressuscité pour remplir toute chose et régner sur son Eglise. Quelle constance dans une promesse !
Ensuite, cet amour nous apporte la sérénité : quand la terre tremble sous nos pieds et que le sol se dérobe – quand surviennent la maladie, les problèmes familiaux, les déceptions professionnelles – nous avons l’amour de Dieu qui se traduit par une aide constante et efficace.
Rappelez-vous : « Quand les montagnes s’éloigneraient, quand les collines chancelleraient, mon amour ne s’éloignera point de toi ». Car le diable profite de ce genre d’occasions pour nous dire : ‘Tu vois bien que ton Dieu ne t’aime plus. Il en a assez de tes péchés ; tu n’as que ce que tu mérites’ ! Gare à ce menteur ! Dieu nous aime toujours autant, mais il permet parfois que notre foi soit éprouvée. Il veut nous apprendre à nous rapprocher davantage de lui. Il dit que « la détresse produit la persévérance, la persévérance la victoire dans l’épreuve, et cette victoire l’espérance » ! (Rm 5, 4)
Que nous apporte encore l’amour de Dieu ?
Nous avons dit en introduction qu’un drame était imminent, même si ce n’est pas pour 2012. La Bible nous avertit : quand les signes de la fin paraîtront dans le ciel, quand le soleil et la lune commenceront à s’obscurcir, quand réellement les montagnes s’écrouleront et que les collines chancelleront, que des raz-de-marée et des ouragans dévasteront définitivement la terre, il règnera une panique indescriptible dans le monde. A quoi nous accrocherons-nous en ce jour-là ?
A notre certitude d’être aimé de Dieu ! Dans son amour, Christ nous sauvera. « A plus forte raison donc, maintenant que nous sommes justifiés par son sang, serons-nous sauvés par lui de la colère » écrit Paul aux Romains (5, 9).
Vous entendrez le Seigneur vous dire : Venez, vous qui êtes bénis de mon Père ; prenez possession du royaume qui vous a été préparé dès la fondation du monde.
Je t’aime, dit Dieu à l’Israël des croyants. Il lui dit aussi : je te rendrai belle !



II
A l’époque du prophète, le peuple de Dieu s’incarnait en sa capitale : Jérusalem. Or, la ville sainte est complètement ruinée : plus une maison intacte ; que des demeures calcinées ! Le temple lui-même est éventré ; les remparts ont été renversés ; des ronces ont tout envahi. C’est la conséquence d’une catastrophe survenue 6 siècles avant notre ère. Quel drame pour le peuple ! Quelle honte pour la cité de David, anéantie, rasée, abandonnée !
Mais Dieu lui promet : ‘Je te reconstruirai ; je te ferai belle’. Et il est vrai qu’historiquement, Jérusalem s’est relevée de ses ruines de par la volonté de Dieu. Cependant, la Jérusalem qui nous est décrite ici est tellement belle, construite avec un matériau si précieux, elle est si éclatante et si lumineuse qu’il ne peut pas s’agir d’une ville de ce monde : c’est l’image de la Jérusalem spirituelle et céleste, c'est-à-dire de l’Eglise chrétienne.


Voici quelques détails qui ne manqueront pas d’intéresser les architectes et les maçons : « Je garnirai tes pierres d’antimoine » déclare le Seigneur : la nouvelle Jérusalem va avoir des murs magnifiques. L’antimoine était un cosmétique noir dont les femmes se servaient pour cerner leurs yeux, pour les embellir et en souligner les contours. Il est donc possible que l’allusion à l’antimoine soit une référence à un ciment ou à un joint coloré destiné à mettre les pierres en valeur. « Je te donnerai des fondements de saphir » dit encore le Seigneur : la base des murs sera donc plus bleue que le ciel. « Je ferai tes créneaux de rubis » : l’enceinte sera donc rehaussée d’un rouge éclatant, peut-être pour rappeler le sang de son salut. « Je ferai tes portes d'escarboucles » : l’escarboucle est également une pierre précieuse, d’un rouge foncé. « Et de toutes parts, il y aura des pierres précieuses » dit Dieu.
La Jérusalem céleste sera donc construite avec des matériaux qui évoquent à la fois l’éternité et une valeur extrêmement élevée. On a déjà du mal à se représenter le prix d’une parure de diamants (et l’on dit bien que les diamants sont éternels !), alors essayez d’imaginer une ville tout en pierres précieuses, magnifique, colorée, étincelante, une ville totalement lumineuse !
Cette ville ne sera pas l’œuvre des hommes : Dieu en sera le constructeur : « JE te donnerai … », « JE ferai … », dit-il. Aucune construction humaine ne lui ressemble…
Saint Jean se souviendra de la description d’Esaïe. Dans l’Apocalypse, il écrit : « Un des anges … me montra la ville sainte, Jérusalem, qui descendait du ciel d’auprès de Dieu, ayant la gloire de Dieu. Son éclat était semblable à celui d’une pierre précieuse, d’une pierre de jaspe transparente comme du cristal ... La muraille était construite en jaspe et la ville était d’or pur, semblable à du verre pur ».
Cette nouvelle cité n’est pas seulement très belle : elle est aussi un refuge absolu. Personne ne pourra plus brutaliser ses habitants, aucun ennemi ne pourra s’en emparer. Ses remparts sont imprenables, ses créneaux inaccessibles. Les murs et leurs fondations sont impénétrables, comme le diamant.



Voilà pourquoi Dieu peut dire au croyant : Bannis l’inquiétude, car tu n’as rien à craindre. Oublie ta peur, laisse-la dehors, à l’extérieur !
Cette ville splendide, c’est l’Eglise chrétienne qui réunit tous les croyants.
Dans l’Epître de Paul aux Ephésiens, elle apparaît sous les traits de l’épouse du Christ, mais y on retrouve les mêmes allusions à la sainteté, à la pureté et à la beauté : « Christ a aimé l’Eglise et s’est livré lui-même pour elle – écrit Paul -afin de la sanctifier par la parole, après l’avoir purifiée par le baptême d’eau, afin de faire paraître devant lui cette Eglise glorieuse, sans tache, ni ride, ni rien de semblable, mais sainte et irréprochable ».
Et tandis qu’Esaïe annonçait les fondations en saphir, Paul explique : Vous avez été édifiés sur le fondement des apôtres et des prophètes, Jésus Christ lui-même étant la pierre angulaire. Voilà pourquoi Jésus peut dire de l’Eglise que les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle : l’enfer et tous les diables réunis ne pourront pas renverser l’Eglise, la nouvelle Jérusalem. Car c’est Dieu lui-même, en la personne de son Fils, qui l’a construite. Elle repose sur la Parole qu’ont annoncée les prophètes, les apôtres et les évangélistes. Elle porte les couleurs du sang que le Christ a versé sur la croix. Voici pourquoi nous en sommes déjà des résidents, par la foi.
Que ces paroles de Dieu à Israël – ‘Je t’aime’ et ‘Je te rendrai belle’ – bannissent toute crainte de nos cœurs dans l’attente des choses de la fin ; qu’elles créent en nous une joyeuse impatience d’entrer un jour dans la cité céleste. Amen !


Claude Ludwig, Eglise Luthérienne du Christ, Mulhouse

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