samedi 27 mars 2010

PHILIPPIENS 2.5-11 (Dimanche des Rameaux)



Entrée de Jésus dans Jérusalem Enluminures de l’évangéliaire d’Egbert (10 ème siècle). Lire Luc 19.28-44


Phi 2:5 Tendez à vivre ainsi entre vous, car c'est ce qui convient quand on est uni à Jésus-Christ.Phi 2:6 Lui qui, dès l'origine,était de condition divine,ne chercha pas à profiter de l'égalité avec Dieu,
Phi 2:7 mais il s'est dépouillé lui-même,et il a pris la condition du serviteur.Il se rendit semblable aux hommes en tous points, et tout en lui montrait qu'il était bien un homme.
Phi 2:8 Il s'abaissa lui-même en devenant obéissant, jusqu'à subir la mort,oui, la mort sur la croix.
Phi 2:9 C'est pourquoi Dieu l'a élevé à la plus haute place et il lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom,
Phi 2:10 pour qu'au nom de Jésu tout être s'agenouille dans les cieux, sur la terre et jusque sous la terre,
Phi 2:11 et que chacun déclare: Jésus-Christ est Seigneur à la gloire de Dieu le Père.


Chers frères et soeurs,

Aujourd'hui, c'est le dimanche des Rameaux, qui ouvre la Semaine Sainte où nous allons revivre le drame des derniers jours et des dernières heures de Notre Seigneur.



Reconnaissons-le, parfois, ce temps de notre calendrier liturgique est quand même lourd, sombre. Le service de Vendredi Saint est là pour nous rappeler tout ce que Christ a souffert pour nous. Entre les acclamations joyeuses de l'entrée à Jérusalem et la gloire de la tombe vide du matin de Pâques, tout l'espace est occupé par une croix sanglante. Oui, souvent, nous préférons un roi triomphant à un serviteur souffrant ou à un agneau immolé.



St Paul a écrit aux Philippiens (et à nous) que Jésus a choisi de devenir un serviteur souffrant. Jésus aurait très bien rester ce qu'il était: le glorieux Fils de Dieu, pas limité par un corps humain et ne connaissant pas la douleur. Même après avoir pris forme humaine, Jésus est resté Dieu, et il aurait très bien pu ne pas souffrir et ne pas accepter de diminuer sa gloire. Mais il a choisi de devenir serviteur. Jésus a choisi le chemin de la faiblesse, de la douleur et de la mort, et il l'a fait pour nous.

Et c'est là une grande difficulté. Nous nous approchons du jour où Dieu est mort. C'est l'offense de la croix, parce que, cloué au bois, Jésus qui était Dieu a donné sa vie. Comment Dieu peut-il mourir, puisqu'il est éternel et immortel? Pourquoi devrait-il mourir, puisqu'il est bon et pur, aimable et admirable? La mort de Jésus est la mort de Dieu et c'est là pour nous un mystère et un scandale, et ça l'est encore plus lorsque nous nous rendons compte que le récit de la Passion nous dit que Dieu est mort pour nous.

Depuis des siècles, des gens ont essayé d'échafauder des théories qui permettraient d'adoucir l'histoire, de la rendre plus acceptable. Ainsi, certains ont dit que Jésus n'était pas mort sur la Croix, mais qu'il s'était juste évanoui. D'autres ont dit que Jésus n'était pas Dieu. Je parlais l'autre jour avec un très bon ami à moi de choses spirituelles. Il est féru d'histoire et m'a demandé ce que je pensais de l'Arianisme, l'hérésie très répandue dans les premiers siècles de l'Eglise qui disait que Jésus n'était qu'un homme mais pas Dieu. Il se demandait s'il était finalement très important de croire que Jésus était bien Dieu. Je lui ai répondu que si Jésus n'était qu'un homme, alors le vieil adage chrétien "dieu s'est fait homme pour que l'homme puisse devenir dieu" ne tient plus. Si ce n'est qu'un homme qui est mort sur une croix il y a 2000 ans, Jésus est au plus une sorte de Gandhi palestinien. Son histoire est triste, mais pas plus que beaucoup d'autres, et nous n'avons pas vraiment de raisons de nous y attarder. Nos péchés ne sont pas effacés!

Mais nous voyons Paul réaffirmer la vérité fondamentale de notre foi: Jésus était de condition divine, Jésus était Dieu. Il possédait la même gloire, la même sainteté, la même sagesse, la même puissance que le Père. Mais Jésus n'a pas regardé tout cela et il s'est abaissé, il s'est humilié. Il est devenu l'un de nous, il s'est fait homme. Son humanité n'était pas différente de la nôtre; sauf sur un point essentiel: c'est que Jésus était sans péché. Il n'a jamais commis un seul péché et pourtant il a payé pour les vôtres, pour les miens.

Jésus a vécu une vie comme la nôtre. Il a eu faim, il a eu soif, il a été fatigué. Pourtant Dieu n'a pas faim, il n'a pas soif, il n'est jamais fatigué. Dieu ne saigne pas, non plus. Il ne souffre pas. Il ne peut pas mourir. Mais Christ, qui était vrai Dieu et vrai homme a accepté de quitter le sein du Père pour venir souffrir et mourir à votre place pour que vos fautes soient effacés, en se faisant serviteur.

C'est bien la chair du Fils de Dieu qui a été clouée à la croix. Encore une fois, la mort d'un homme, même très bon, ne serait d'aucune utilité pour notre salut éternel. Mais Jésus a déposé la chair et le sang de Dieu sur la croix, et sa mort est tout pour nous. La mort de Jésus et sa résurrection sont les évènements centraux de l'histoire du monde, bien plus importants que la Première Guerre Mondiale ou la Chute du Mur de Berlin! La Croix est le véritable pivot de l'histoire humaine, celui par rapport auquel tous les humains sont amenés à se déterminer.

Sur la croix, Jésus a marqué sa solidarité avec une humanité pécheresse. Lui qui était saint et sans péché est devenu l'un d'entre nous, alors même que nous sommes pécheurs. Sur la croix, Jésus a embrassé toute l'humanité, parce que c'est lui qui a porté le poids de notre péché et de notre culpabilité.

Jésus est venu dans l'humilité pour porter ce qui était nos fardeaux: notre péché, notre mort, notre damnation. J'ai beaucoup pris le train à un certain moment de ma vie. J'ai toujours été surpris par les remerciements chaleureux des personnes dont j'avais mis les valises sur la galerie "Merci Monsieur, vous êtes bien aimable".
De la même façon, ce n'était pas à Jésus de porter nos fardeaux. Jésus n'avait pas à mourir. Il a choisi de mourir pour nous. Jésus-Christ, le seul homme qui n'avait pas à mourir, a choisi une mort terrible pour nous sauver.

Aujourd'hui, nous le voyons entrer à Jérusalem monté sur un simple ânon, lui qui aurait pu être porté par des myriades d'anges. Est-ce que vous croyez que les rois David et Salomon se promenaient sur des ânes?? Ce que nous avons en face de nous, c'est un serviteur. Jésus entre à Jérusalem pour se présenter à Dieu comme sacrifice expiatoire pour les péchés du monde entier. Oui, Jésus va à la boucherie pour nous. Et il le sait.

Et dans ce corps qui bientôt sera flagellé, roué de coups, couronné d'épines, cloué sur une croix se tient pourtant toute la force divine qui a créé notre univers et qui le soutient. Cette figure pathétique d'un fils de charpentier mourant, est en fait celle du grand Dieu qui protège et défend le monde même quand le monde se tourne contre lui. C'est ça, un serviteur.
Aujourd'hui encore, Jésus reste Dieu et homme. Mais il n'est plus serviteur. En théologie, on dit que son état d'abaissement (ou d'humiliation) a fait place à son état d'élévation (ou d'exaltation, si vous voulez creuser le sujet, voyez les pages 118 à 128 de votre catéchisme). A présent Christ siège à la droite du Père, entouré de la louange de Dieu et des saints.
A cette louange, nous nous joignons déjà, notamment quand nous chantons comme nous allons le faire tout à l'heure "Saint, saint, saint". Ce chant, c'est en fait un entraînement pour ce qui nous attend. Oui nous louons, dans nos chants, dans nos prières, le nom de Jésus, le nom par lequel nous sommes sauvés et par lequel la puissance du diable est défaite.
Un jour, tout genou fléchira dans le ciel, sur la terre ou sous la terre, que cela lui plaise ou non. Même Satan devra confesser de sa bouche que Christ est Seigneur. Ne vous laissez pas inquiéter par les oiseaux de mauvais augure qui nous disent que le christianisme est mort dans nos pays. Certes, l'église fidèle ne regroupe qu'un petit troupeau, mais ce n'est pas ça qui empêchera le plan divin de s'achever par la victoire de l'Agneau immolé; malgré les ruses du diable et la rébellion des hommes.
Alors, demeurons fidèles, gardons devant nous l'exemple d'humilité de notre Sauveur, puisque c'est ce que Paul nous invite à faire dans notre vie d'église. L'humilité, dans notre société, plus personne n'en a rien à faire. Dans les entreprises, parfois même dans les familles, on est prêt à tout pour ne pas "se laisser bouffer" (ou pour bouffer les autres autres?). il faut montrer les dents, bomber le torse et défendre son territoire!
Mais nous chrétiens, sommes appelés à quelque chose de différent dans les communautés au sein desquels l'Esprit nous réunit. "Ne faites rien par esprit de rivalité ou par désir d'une gloire sans valeur, mais avec humilité considérez les autres comme supérieurs à vous-mêmes. Que chacun de vous, au lieu de regarder à ses propres intérêts regarde aussi à ceux des autres." (2.3-4). Voilà notre feuille de route. Nous sommes appelés à suivre les pas de notre Sauveur. Bien sûr, cela peut faire peur. Quand on se rend humble, on se rend aussi vulnérable. Mais en prenant et en gardant ensemble toujours cette direction, nous pourrons créer dans l'église ces relations nouvelles que Dieu veut y développer, quand nous aurons un même amour, un même cœur, une même pensée (2.2). Jésus est venu dans l'humilité par amour pour nous. Marchons dans l'humilité par amour mutuel.

vendredi 26 mars 2010

PHILIPPIENS 3.4-14

Des problèmes sur notre plateforme Blogger ont retardé la publication du sermon de dimanche dernier. Acceptez nos excuses.





4 Pourtant, moi-même je pourrais mettre ma confiance dans ma condition. Si quelqu'un croit pouvoir se confier dans sa condition, je le peux plus encore:5 j'ai été circoncis le huitième jour, je suis issu du peuple d'Israël, de la tribu de Benjamin, hébreu né d'Hébreux; en ce qui concerne la loi, j'étais pharisien;6 du point de vue du zèle, j'étais persécuteur de l'Eglise; par rapport à la justice de la loi, j'étais irréprochable.7 Mais ces qualités qui étaient pour moi des gains, je les ai regardées comme une perte à cause de Christ.8 Et je considère même tout comme une perte à cause du bien suprême qu'est la connaissance de Jésus-Christ mon Seigneur. A cause de lui je me suis laissé dépouiller de tout et je considère tout cela comme des ordures afin de gagner Christ9 et d'être trouvé en lui non avec ma justice, celle qui vient de la loi, mais avec celle qui s'obtient par la foi en Christ, la justice qui vient de Dieu et qui est fondée sur la foi.10 Ainsi je connaîtrai Christ, la puissance de sa résurrection et la communion à ses souffrances en devenant conforme à lui dans sa mort11 pour parvenir, d'une manière ou d'une autre, à la résurrection des morts.12 Ce n'est pas que j'aie déjà remporté le prix ou que j'aie déjà atteint la perfection, mais je cours pour tâcher de m'en emparer, puisque de moi aussi, Jésus-Christ s'est emparé.13 Frères et soeurs, je n'estime pas m'en être moi-même déjà emparé, mais je fais une chose: oubliant ce qui est derrière et me portant vers ce qui est devant,14 je cours vers le but pour remporter le prix de l'appel céleste de Dieu en Jésus-Christ.



Chers frères et sœurs,

Le carême est un temps de repentance. La repentance, nous l'avons vu la semaine dernière, c'est avant tout un changement radical de direction. Durant le carême, nous sommes invités à réfléchir à la réalité de notre péché et à nous en détourner. Mais ce n'est pas tout. Car s'il est important de nous détourner de nos fautes, il faut aussi que nous apprenions à nous détourner de nos bonnes actions. C'est seulement ainsi que nous pourrons pleinement entrer dans la vie chrétienne, en nous centrant seulement sur Christ.

C'est ce que Paul cherche à faire comprendre aux chrétiens de l'église de la ville de Philippe dans notre texte. Il y avait des problèmes dans cette église. Des gens étaient venus dire aux chrétiens qu'en plus de croire en Jésus, il fallait qu'ils suivent les prescriptions de la Loi juive, la loi de Moïse. Pour être sauvé, il ne suffisait pas de croire en Christ, il fallait aussi obéir aux commandements. Alors Paul met en garde les gens de Philippe, et il utilise l'histoire de sa propre vie comme illustration.
"Attendez, dit l'apôtre, on vous dit de suivre la Loi juive et ses commandements? Je suis bien placé pour vous dire que ça ne sert à rien, que c'est même dangereux parce qu'à partir de ce moment-là, vous êtes sur une pente glissante qui vous éloigne de Jésus au lieu de vous en rapprocher".
Paul, comme il l'explique, était un Juif de pure race, un membre du peuple que Dieu s'était choisi dans l'Ancienne Alliance. Bien plus, il appartenait au groupe religieux le plus strict au sein du judaïsme, le plus focalisé sur l'obéissance aux commandements: les Pharisiens. Nous savons par ailleurs que Paul avait été l'élève d'un grand maître juif, Galamiel. Nous savons aussi que Paul a tout d'abord cherché à tout prix à détruire l'Eglise naissante et à persécuter les chrétiens par tous les moyens. S'il y avait un homme qui pouvait mettre ces espoirs dans la religion juive, c'était bien Paul.
Et le voilà qui dit que toutes ces choses, il les considère comme des ordures (v.8), ce qui est d'ailleurs une traduction encore bien du terme grec original.

Son pédigrée impeccable, son CV immaculé de Pharisien, le prestige que tout cela lui apportait, le brillant avenir qui lui était assuré, Paul dit que c'est zéro, rien, nada, c'est quelque chose qui sent mauvais. Pourquoi? Comment est-ce que cette révolution complète a pu avoir lieu? Il y a eu une rencontre, un bouleversement dans la vie de Paul et qui doit se produire aussi dans la nôtre si nous voulons vraiment vivre.
Un jour, sur le chemin de Damas, Jésus s'est révélé à Paul (Actes 9). Celui qui était un ennemi acharné de l'Eglise a compris qui était Jésus.
"C'est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c'est le don de Dieu" (Eph 2.8). Ces paroles tirées de la lettre aux Ephésiens, elles sont devenues le cœur de la vie de Paul. Il est devenu un paria, un homme pourchassé et balloté
C'est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Nous les connaissons ses paroles. Mais le plus difficile, c'est de bien les avoir à l'esprit dans notre marche quotidienne. La société autour de nous insiste sur les performances, sur les accomplissements. Cela ne nous aide pas, d'autant plus que notre vieille nature cherche toujours à reprendre le dessus et à nous faire croire que nos œuvres ont de la valeur.
Alors, bien sûr, je ne suis pas en train de vous dire de ne pas, par exemple, faire les courses pour une voisine qui s'est cassé la jambe, de ne pas prêter une oreille attentive à quelqu'un qui a besoin de parler, de ne pas vous engager dans les diverses associations qui font vivre nos villes et nos villages. Je ne suis pas en train de vous dire de vous sentir coupable quand on vous dit merci.

Mais il est important, non, fondamental de nous souvenir encore et toujours que toutes ces "bonnes actions" sont absolument incapables de nous ouvrir la porte des cieux. Aucune d'entre elles ne vous rapprochera de notre Père céleste. En fait, notre orgueil va nous pousser à dire "oh, finalement, je ne suis pas si mauvais que ça. En fait il y a bien pire que moi. On peut même dire que je suis un brave type dans le fond". A partir de ce moment-là, nous nous comportons comme ses malades qui refusent d'admettre qu'ils le sont et qui se dispensent de traitement.
Nous devons comprendre que nous n'avons pas besoin d'un code moral (les incroyants sont souvent plus "moraux" que nous); nous n'avons pas besoin d'une religion, nous avons besoin d'un Sauveur, parce que notre situation est tellement désespérée que nous ne pouvons pas nous en sortir tout seuls. Ce sauveur, c'est Jésus-Christ, qui vécu une vie parfaite à notre place et a expié nos fautes à la croix.
Voilà pourquoi Paul dit qu'il veut être trouvé "avec (sa) justice, celle qui vient de la loi, mais avec celle qui s'obtient par la foi en Christ, la justice qui vient de Dieu et qui est fondée sur la foi." Le problème de la Loi, c'est qu'elle exige de nous une obéissance parfaite, impeccable, dont nous sommes incapables. Alors, pour que nous puissions pardonnés, purifiés de nos fautes, Dieu a envoyé son Fils pour que dans sa mort nous obtenions sa justice. Si vous croyez en Jésus, Dieu voit sa vie sainte et pure quand il vous regarde: tous vos péchés sont oubliés, effacés, vous êtes libre! Vous n'avez plus besoin de chercher désespérement à gagner votre salut par vos œuvres: il vous a déjà été par Jésus acquis à la croix!

Voilà pourquoi Paul dit que rien n'a de valeur à côté de la connaissance de Christ. Est-ce que vous vous êtes rendu compte qu'il y a une grande différence entre croire en Dieu et connaître Dieu? On peut croire en Dieu comme en une grande force cosmique anonyme. On peut croire en Dieu comme en une sorte de grand vieillard barbu trônant dans les cieux et qui ne se soucie pas de nous. En fait, ne pas croire en Dieu et s'en faire une fausse image sont deux erreurs finalement assez proches l'une de l'autre.
Mais nous pouvons connaître Dieu, parce que nous pouvons connaître Jésus-Christ. Etre Chrétien, c'est connaître Christ. Pas connaître des choses le concernant, mais le connaître comme on connaît un ami, un frère. Mais être Chrétien, c'est aussi savoir que Jésus nous connaît aussi de façon personnelle. Je suis le Bon Berger a dit Christ, je connais mes brebis et mes brebis me connaissent.
Et cette idée de connaître Christ, dans le Nouveau Testament, équivaut à "être sauvé". Mais, dans le même temps, nous sommes appelés à toujours connaître de plus en plus, de mieux en mieux. Regardez Paul: ce n'est pas parce qu'il est apôtre, fondateur d'églises, qu'il croit qu'il peut se reposer sur ses lauriers. Ce serait tomber dans un pharisaïsme chrétien tout aussi trompeur que le juif. Paul veut "gagner" Christ, le connaître encore plus. Il ne se considère pas comme arrivé et il utilise l'image de la course, où, oubliant "qui est derrière" il va de l'avant, centré sur le but.

Nous aussi nous sommes appelés à laisser derrière nous notre excédent de bagages, notre péché, notre orgueil, nos doutes et nos craintes aussi parce que tout cela n'est rien à côté de la chose la plus précieuse au monde: connaître le Seigneur Jésus Christ, notre sauveur et notre Dieu.






jeudi 18 mars 2010

LUC 15.1-3,11-32

15 Tous les collecteurs d'impôts et les pécheurs s'approchaient de Jésus pour l'écouter.
2 Mais les pharisiens et les spécialistes de la loi murmuraient, disant: «Cet homme accueille des pécheurs et mange avec eux.»
3 Alors il leur dit cette parabole: 4 «Si l'un de vous a 100 brebis et qu'il en perde une, ne laisse-t-il pas les 99 autres dans le désert pour aller à la recherche de celle qui est perdue jusqu'à ce qu'il la retrouve?
11 Il dit encore: «Un homme avait deux fils. 12 Le plus jeune dit à son père: 'Mon père, donne-moi la part de l'héritage qui doit me revenir.' Le père leur partagea alors ses biens.
13 Peu de jours après, le plus jeune fils ramassa tout et partit pour un pays éloigné, où il gaspilla sa fortune en vivant dans la débauche.
14 Alors qu'il avait tout dépensé, une importante famine survint dans ce pays et il commença à se trouver dans le besoin.
15 Il alla se mettre au service d'un des habitants du pays, qui l'envoya dans ses champs garder les porcs.
16 Il aurait bien voulu se nourrir des caroubes que mangeaient les porcs, mais personne ne lui en donnait.
17 Il se mit à réfléchir et se dit: 'Combien d'ouvriers chez mon père ont du pain en abondance et moi, ici, je meurs de faim!
18 Je vais retourner vers mon père et je lui dirai: Père, j'ai péché contre le ciel et contre toi,
19 je ne suis plus digne d'être appelé ton fils, traite-moi comme l'un de tes ouvriers.'
20 Il se leva et alla vers son père. Alors qu'il était encore loin, son père le vit et fut rempli de compassion, il courut se jeter à son cou et l'embrassa.
21 Le fils lui dit: 'Père, j'ai péché contre le ciel et contre toi, je ne suis plus digne d'être appelé ton fils.'
22 Mais le père dit à ses serviteurs: 'Apportez [vite] le plus beau vêtement et mettez-le-lui; passez-lui un anneau au doigt et mettez-lui des sandales aux pieds.
23 Amenez le veau qu'on a engraissé et tuez-le! Mangeons et réjouissons-nous,
24 car mon fils que voici était mort et il est revenu à la vie, il était perdu et il est retrouvé.' Et ils commencèrent à faire la fête.
25 »Or le fils aîné était dans les champs. Lorsqu'il revint et approcha de la maison, il entendit la musique et les danses.
26 Il appela un des serviteurs et lui demanda ce qui se passait.
27 Le serviteur lui dit: 'Ton frère est de retour et ton père a tué le veau engraissé parce qu'il l'a retrouvé en bonne santé.'
28 Le fils aîné se mit en colère et il ne voulait pas entrer. Son père sortit le supplier d'entrer,
29 mais il répondit à son père: 'Voilà tant d'années que je suis à ton service sans jamais désobéir à tes ordres, et jamais tu ne m'as donné un chevreau pour que je fasse la fête avec mes amis.
30 Mais quand ton fils est arrivé, celui qui a mangé tes biens avec des prostituées, pour lui tu as tué le veau engraissé!'
31 Mon enfant, lui dit le père, tu es toujours avec moi et tout ce que j'ai est à toi,
32 mais il fallait bien faire la fête et nous réjouir, parce que ton frère que voici était mort et il est revenu à la vie, il était perdu et il est retrouvé.'»




Tous les fils prodigues s'approchaient de Jésus pour l'écouter. Mais les fils aînés murmuraient, disant "Cet homme accueille les pécheurs et mange avec eux".
Vous voudrez bien excuser cette fusion du début et de la fin de notre texte, mais le parallèle est clair et les Pharisiens l'avaient bien compris. Ces Pharisiens reprochent à Jésus de laisser venir à lui les pécheurs notoires, de passer du temps avec les gens de mauvaise vie, de dialoguer avec ceux que tout le monde pointe du doigt.
Alors Jésus réplique par trois paraboles. La première et la deuxième sont presque identiques: l'histoire du berger qui laisse ses 99 brebis pour retrouver la centième et celle de cette femme qui retourne sa maison pour retrouver la dixième pièce d'argent qui lui manque. Ces deux histoires sont destinées à redonner l'espoir à ceux qui se reconnaissent pécheurs et à leur montrer que non seulement Dieu les accepte, mais qu'en plus, il les cherche! Elles sont aussi destinées à agacer prodigieusement les Pharisiens, cette pure élite, en donnant à Dieu les traits d'un berger et d'une femme, les deux catégories que justement les Pharisiens considèrent comme impures et inférieures!

Et puis il y a la troisième parabole, qui est un peu différente puisque nous y trouvons "deux pour le prix d'un". Ce que je veux dire, c'est que dans cette parabole, Jésus veut nous enseigner deux choses. Nous connaissons bien l'histoire: un père, deux fils. L'histoire du cadet apporte le réconfort, l'histoire de l'aîné apporte un avertissement.

Souvent le récit des paraboles utilise des comportements étranges, on pourrait même dire aberrant. Dans notre texte, c'est le père qui est bizarre. Voilà un homme qui est humilié, bafoué de tant de façons! Et bien, ce père est l'image de Dieu qui est prêt à souffrir l'humiliation pour venir nous chercher et nous ramener à la maison.

L'humiliation elle commence quand le jeune fils choisit de partir et demande sa part d'héritage. En fait, c'était une façon de montrer à son père qu'il mettait un peu trop de temps à mourir et qu'il serait peut-être temps de la laisser vivre. Est-ce que le père remet ce blanc-bec insolent à sa place? Non. Il accepte de partager ses biens. C'est une réponse incroyable. Tout le monde dans le village a dû penser qu'il était devenu complètement fou.

Cette action du père est d'autant plus extraordinaire que les deux fils font preuve d'un cœur mauvais. Bien sûr, on parle souvent du plus jeune qui ne se soucie que de quitter son vieux père et sa terre pour aller faire les 400 coups. Mais le fils aîné aussi a accepté le partage des biens après tout. Et, quand on y pense, c'est lui qui a reçu double part et qui est devenu le maître de la maison. Ce que le jeune frère demande, ce que l'aîné accepte, montre en fait à quel point ils sont tous deux éloignés de leur père.

Pourtant, c'est bien ainsi que Dieu fonctionne. Comme l'a dit Jésus "il fait se lever son soleil sur les méchants et sur les bons, il fait pleuvoir sur les justes et les injustes". Dieu étend une forme de sa grâce sur tous les habitants de la Terre, ne serait-ce qu'en leur permettant de vivre. Et notre belle France, qui s'est tellement éloignée de Dieu n'en demeure pas moins un des pays les plus riches au monde.

La deuxième humiliation se produit quand le cadet revient à la maison et que son père se met à courir vers lui. C'est la violation d'un tabou social: un homme de cet âge et de ce rang ne court pas dans la Palestine du temps de Jésus: c'est presque indécent!! Et au lieu de garder sa sombre réserve, le père se précipite vers son fils, l'embrasse, remplace ses haillons par des vêtements luxueux, lui met au doigt l'anneau des maîtres et invite le ban et l'arrière-ban pour une grande fête.
De plus, le père a vu son fils arriver de loin. Cela montre qu'il l'attendait, le guettait. Avant même que le fils ne décide de revenir chez lui, le père espérait son retour. A travers le père, Jésus décrit la grâce complète et totale de Dieu, son amour inconditionnel envers nous.

Le prophète Esaïe a dit "nous sommes devenus comme des objets impurs et toute notre justice est comme un habit taché de sang, nous sommes tous aussi fanés qu'une feuille et nos fautes nous emportent comme le vent" (Es 64.5). Et malgré cela, comme le père de la parabole, Dieu est prêt à s'humilier pour nous ramener à la maison. Il nous purifie dans le baptême et nous revêt de la justice que Christ nous a acquise à la croix. Il s'abaisse vers nous pour nous inviter à devenir ses enfants. Il nous invite à sa table pour nourrir notre foi avec le pain et le vin de l'eucharistie. Nous devenons ses héritiers dans la nouvelle alliance de la grâce qui surpasse l'ancienne alliance de la Loi.

L'humiliation finale pour le père est amenée par la réaction du fils aîné, par sa colère, par son refus de se joindre à la fête. Le père insiste, plaise pour s'entendre répondre qu'il traite son aîné injustement. Alors qu'il est tout à la joie d'avoir retrouvé un fils, le père se voit rejeté par un autre, qui, il faut le noter, ne l'appelle pas "père" et qui se réfère à son frère en disant "ton fils".

Et pourtant, pourtant, une nouvelle fois, sans se lasser, le père renouvelle son invitation. Son fils est furieux envers lui mais il reste son enfant. Il est toujours bienvenu à la fête. Là encore, le père est l'image d'une grâce et d'un amour incroyables.

Jésus ne nous a pas dit ce qui est arrivé au fils aîné. C'est très approprié, parce que les Pharisiens et les scribes allaient se reconnaître en lui. Ils devaient se rendre compte que l'histoire n'était pas encore finie pour eux, que Dieu les invitait encore et toujours à la fête. Allaient-ils réaliser qu'eux aussi pouvaient s'y joindre? Quelle fin allaient-ils donner à l'histoire? Pour nous en tout cas, prenons bien garde de ne pas être des fils aînés, des Pharisiens, des religieux tellement préoccupés par leur religion qu'ils en oublient la foi et qu'ils restent à la porte de la maison de fête, et veulent empêcher les autres d'y entrer.

Notre Dieu est un Dieu de grâce, qui nous aime tellement qu'il a sacrifié son Fils unique. Jésus s'est humilié lui-même, en faisant preuve d'obéissance jusqu'à la mort, même la mort sur la croix (Phil 2.8). Cette histoire, la merveilleuse histoire du salut et de la libération que Dieu nous donne, beaucoup de ceux qui vivent autour de nous ne l'ont jamais entendue, ou jamais acceptée. C'est à nous de la leur dire, avec douceur et persuasion. C'est à nous de les inviter au repas de fête que donne le Père pour tous ces enfants qui reviennent à lui. Quant à nous, que ce carême soit le temps où nous allons revenir auprès du Père, que nous ayons été des fils aînés ou des cadets



samedi 6 mars 2010

Luc 13.1-9


1 ¶ En ce même temps, quelques personnes qui se trouvaient là racontaient à Jésus ce qui était arrivé à des Galiléens dont Pilate avait mêlé le sang avec celui de leurs sacrifices.
2 Il leur répondit : Croyez–vous que ces Galiléens aient été de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, parce qu’ils ont souffert de la sorte ?
3 Non, je vous le dis. Mais si vous ne vous repentez, vous périrez tous également.
4 Ou bien, ces dix–huit personnes sur qui est tombée la tour de Siloé et qu’elle a tuées, croyez–vous qu’elles aient été plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem ?
5 Non, je vous le dis. Mais si vous ne vous repentez, vous périrez tous également.
6 ¶ Il dit aussi cette parabole : Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint pour y chercher du fruit, et il n’en trouva point.
7 Alors il dit au vigneron : Voilà trois ans que je viens chercher du fruit à ce figuier, et je n’en trouve point. Coupe–le : pourquoi occupe–t–il la terre inutilement ?
8 Le vigneron lui répondit : Seigneur, laisse–le encore cette année ; je creuserai tout autour, et j’y mettrai du fumier.
9 Peut–être à l’avenir donnera–t–il du fruit ; sinon, tu le couperas.





Ecoutez la radio, regardez la télévision, lisez le journal et Internet et chaque semaine vous annoncera son lot de catastrophes. Seuls les lieux et les circonstances changent. Il y a à peine deux mois, c'était le tremblement de terre dans la lointaine Haïti. La semaine dernière, c'était la tempête qui a ravagé notre région et a laissé derrière elle une cinquantaine de morts et des dégâts matériels colossaux. Et puis il y a les catastrophes qui ne se remarquent pas. Mercredi dernier, 30000 enfants sont morts de faim. Tout comme lundi, mardi jeudi vendredi samedi et aujourd'hui, puisque c'est le nombre moyen d'enfants qui meurent de famine chaque jour. Et toutes ces tragédies laissent des gens dans la peine et le deuil, qui se demandent sans doute "pourquoi?". Haïti, pays déjà le plus pauvre de la planète frappé de façon terrible. Ce qui devait être le week-end tranquille de familles niortaises sans histoire qui se terminent par la mort si brutale… C'est tellement injuste.


A l'époque de Jésus, la question de la justice ne se posait même pas. La maladie, la souffrance et la mort étaient vues comme étant liées de façon directe au péché des humains. Si quelque malheur vous arrivait, c'était forcément pour vous punir de quelque chose. Et bien sûr, plus le malheur était grand, plus ce dont on pouvait vous soupçonner aussi…Cette mentalité n'a pas disparu. Lors du cyclone Katrina qui a ravagé le sud des Etats-Unis, on a bien trouvé de bonnes âmes chrétiennes pour dire que La Nouvelle-Orléans était quand même une ville connue pour ses mœurs légères et sa pratique du vaudou et que Katrina pouvait être vue comme un châtiment de Dieu. Bien sûr, on ne m'a pas expliqué pourquoi cette vengeance divine sur la ville de La Nouvelle-Orléans a aussi affecté une zone grande comme un pays européen. Sans doute une erreur de tir…

Mais même si nous nous éloignons de cette pseudo-théologie insignifiante, nous nous rendons compte que nous avons souvent tendance à voir l'épreuve comme une punition: "mais qu'est-ce que j'ai fait au Bon Dieu pour mériter ça?". Comme l'a dit une psychanalyste "la calamité frappe et nous nous demandons ce que nous avons fait de mal". Nous nous mettons à examiner notre attitude, nos relations, nos croyances, dans le cas de certaines maladies même notre régime…Nous cherchons la cause qui a produit l'effet pour pouvoir arrêter ce qui va mal. Et ce n'était pas différent au temps de Jésus. Les gens cherchaient aussi à comprendre et à contrôler le malheur. Et ils sont venus poser à Jésus une question sur deux affaires qui faisaient grand bruit à l'époque: le massacre de Galiléens par le gouverneur romain Pilate et la chute d'une tour à Siloé.

Très honnêtement, la réponse de Jésus lui ferait perdre des points dans un exercice de théologie pastorale:
2 Il leur répondit : Croyez–vous que ces Galiléens aient été de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, parce qu’ils ont souffert de la sorte ?
3 Non, je vous le dis. Mais si vous ne vous repentez, vous périrez tous également.
4 Ou bien, ces dix–huit personnes sur qui est tombée la tour de Siloé et qu’elle a tuées, croyez–vous qu’elles aient été plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem ?
5 Non, je vous le dis. Mais si vous ne vous repentez, vous périrez tous également.

Jésus refuse d'enter dans l'équation si populaire en son temps du péché et de la mort. Ce qu'il insiste pour dire, c'est que la mort n'est jamais bien loin, qu'elle n'est pas contrôlable ou explicable. La mort est là. Elle peut vous toucher alors que vous êtes en train de prier et que les soldats romains viennent vous rafler comme ils l'ont fait avec les Galiléens. Elle peut vous toucher alors que vous marchez tranquillement dans la rue et qu'un bâtiment s'écroule sur vous comme à Siloé. Jésus rejette la spéculation malsaine des gens et leur dit de façon très franche "mais qu'est-ce que vous avez à vous occuper de ça? à vous croire meilleurs que ces gens qui sont morts? Vous savez, vous aussi vous allez mourir, un jour ou l'autre, d'une façon ou d'une autre, alors ne perdez pas de temps à sonder ce qui arrive aux autres mais repentez-vous dès aujourd'hui".
Oui, ces paroles de Jésus ne sont pas très réconfortantes. Mais c'est bien ce qu'il veut: non pas apporter un réconfort facile à ceux qui l'écoutent, mais les bousculer, les amener à un profond questionnement, à la repentance.

Repentance, voilà un mot qui évoque la pénitence, un sentiment de honte et de regret pour le mal commis. C'est un mot auquel une certaine spiritualité a imposé un sens qui n'était pas le sien. Le mot grec traduit par "repentance" signifie "changer d'avis, d'opinion". Rien de plus, rien de moins. La repentance, ce n'est pas se flageller parce qu'on est conscient d'avoir fait le mal. La repentance c'est un changement radical de perspective, et c'est à cela que Jésus nous appelle. Luther a dit un jour que la repentance était un changement du cœur qui s'opérait par le moyen de la grâce de Dieu. Se repentir, c'est nous détourner de notre chemin pour rejoindre la route que Jésus nous trace. C'est croire que seul Jésus peut nous offrir les portes de la maison du Père parce qu'il est mort pour nos fautes et que la grâce de Dieu nous accueille en lui.

Et, pour bien appuyer, Jésus raconte une parabole. Elle non plus n'est pas très douce. C'est une parabole qui parle du jugement de Dieu et du besoin de repentance. C'est l'histoire d'un figuier qui ne produit pas de fruit et dont le propriétaire devient impatient. Il veut couper l'arbre, mais le jardinier lui obtient un sursis: "laisse-moi y travailler encore un an, et après s'il ne donne pas de fruit, nous le couperons". Cette histoire, c'est celle d'une conversation entre le jugement de Dieu et sa grâce.
La grâce de Dieu, sa patience, son amour, on les voit dans le don d'une année supplémentaire. On voit là une différence entre Jean-Baptiste et Jésus. Jean-Baptiste disait "Déjà même la cognée est mise à la racine des arbres : tout arbre donc qui ne produit pas de bons fruits sera coupé et jeté au feu" (Luc 3.9). Dans la parabole de Jésus, par contre le jardinier demande et obtient une année supplémentaire, cette "année de grâce du Seigneur" que Jésus a dit être venu annoncer, un temps de pardon, de restauration, un temps pour les secondes chances.
Et nous comprenons bien que le jardinier, c'est Jésus. La vigne dans laquelle est plantée le figuier, c'est peut-être le monde entier, peut-être l'église, peut-être nos propres vies. En fait, Jésus ne désespère de personne: de vous, de l'église, du monde entier. Dans cette parabole il y a de l'espoir: "ne coupe pas l'arbre", mais il y a aussi une urgence "plus qu'un an".

Et pour nous, qu'allons-nous faire de cette année, de ce temps que Dieu nous laisse? Il ya une méthode d'évangélisation qui concerne à demander "où iriez-vous si vous mouriez ce soir?". Il n'est peut-être pas mauvais de poser cette question, mais il faut le faire en n'oubliant pas que dans la parabole, la promesse est plus forte que la menace. "Je vais faire tout ce que je peux pour que cet arbre vive et porte du fruit, je veux agir sur ce sol desséché" dit Jésus. Alors que nous nous demandons pourquoi certains sont morts entre les mains de Pilate ou écrasés par une tour, Jésus travaille nos cœurs. Il se sert de ces histoires véritablement tragiques qui avaient touchées ceux qui l'écoutaient pour leur rappeler que leur propre vie était marquée par la finitude, qu'il y a des choses qu'on ne peut pas remettre tout le temps au lendemain.
Mais Jésus ne veut pas nous pousser au désespoir "on va tous mourir de toute façon". Le jardinier s'avance, pour donner encore une chance au figuier, pour qu'il vive. Jésus veut que nous ayons la vie, tout de suite et il nous dit "n'attendez pas!". Cette parabole est dure en ce qu'elle nous fait nous poser des questions dures: est-ce que je me suis ouvert à l'amour de Dieu? Est-ce que je marche dans l'amour? Est-ce que les choses de la vie ne m'empêchent pas de vivre? Comme la parabole, ces questions nous amènent à une véritable repentance.
Sommes-nous prêts à entrer dans cette démarche? A entrer dans l'année que Dieu nous donne, dans le temps de sa grâce? Jésus n'a pas cherché à apporter de réponses faciles aux questions compliquées que se pose l'esprit humain devant la tragédie. D'ailleurs, le propre d'une foi adulte est de reconnaître, d'accepter qu'il n'y ait pas de réponses simples aux questions compliquées. Les réponses, toutes les réponses, seul Dieu les connaît, et nous ne sommes pas Dieu.
La seule vraie question qui se pose en fait est "comment pouvons-nous nous tenir devant ce Dieu très saint?". La seule réponse est un nom, Jésus-Christ, en qui nous rencontrons un Dieu aimant, dont la présence va nous permettre de vivre notre existence sans connaître toutes les réponses, un Dieu qui donne son Fils pour nous et nous invite à revenir à lui, un Dieu qui nous libère pour l'aimer et le servir et servir aussi les autres. Alors laissons le jardinier s'occuper de nous, pour que nous puissions enfin porter du fruit.