lundi 30 mai 2011

Marc 5.25 à 34

Sermon du pasteur François Poillet, prononcé à Mulhouse le 29 mai 2011

Or il y avait là une femme atteinte d'une perte de sang depuis douze ans. 26Elle avait beaucoup souffert du fait de nombreux médecins, et elle avait dépensé tout ce qu'elle possédait sans en tirer aucun avantage ; au contraire, son état avait plutôt empiré. 27Ayant entendu parler de Jésus, elle vint dans la foule, par-derrière, et toucha son vêtement. 28Car elle disait : Si je touche ne serait-ce que ses vêtements, je serai sauvée ! 29Aussitôt sa perte de sang s'arrêta, et elle sut, dans son corps, qu'elle était guérie de son mal.
30Jésus sut aussitôt, en lui-même, qu'une force était sortie de lui. Il se retourna dans la foule et se mit à dire : Qui a touché mes vêtements ? 31Ses disciples lui disaient : Tu vois la foule qui te presse de toutes parts, et tu dis : « Qui m'a touché ? » 32Mais il regardait autour de lui pour voir celle qui avait fait cela. 33Sachant ce qui lui était arrivé, la femme, tremblant de peur, vint se jeter à ses pieds et lui dit toute la vérité. 34Mais il lui dit : Ma fille, ta foi t'a sauvée ; va en paix et sois guérie de ton mal.
 

Frères et soeurs, dimanche dernier, nous avons suivi le Seigneur dans la maison de Jaïrus. Là, un miracle extraordinaire s’est produit : Jésus a ressuscité une petite fille. Je suis « la résurrection et la vie » dit-il ; c’est pourquoi, à trois reprises au cours de son ministère, il prouvera son autorité sur la mort. Cependant, nous avons appris qu’au moment où Jaïrus vient trouver le Seigneur, sa fille est encore vivante. Vivante, mais à l’agonie. Jésus prend aussitôt la route. Pourtant, en chemin, quelque chose ou quelqu’un le retarde, et la petite meurt entre temps. Que s’est-il passé ? Qui l’a retardé ? C’est ce que je vous propose de découvrir ce matin, dans « La guérison secrète du Seigneur ! » Découvrons ses circonstances ; méditons ses conséquences !
I
Jésus est chez Matthieu. L’apôtre est converti depuis peu, alors il invite ses amis. Quand on a de la joie au coeur, on a envie de la partager. Les Pharisiens condamnent ce repas. Pensez donc ! Le rabbi de Nazareth mange avec des « péagers », des gens de mauvaise vie, des pécheurs notoires… Matthieu, en effet, fait partie de ces gens qui travaillent pour l’occupant romain ; il prélève les impôts ! C’est dans ce milieu que le Seigneur choisit un apôtre !
Ce déjeuner n’a pas été de tout repos. Il y a les convives de Matthieu, les disciples de Jean qui ont pénétré dans la maison parce qu’ils avaient une question à poser, et sans doute une délégation du sanhédrin pour manifester sa réprobation ; ajoutez les inévitables curieux : bref, quand Jaïrus exprime sa détresse et que Jésus se lève, la foule se lève aussi, pour voir ce qui va se passer. C’est pourquoi, quand Jésus demandera plus tard : qui a touché mes vêtements ? Les disciples lui diront : comment ? Tu demandes « qui m’a touché » ? Mais enfin ! Tout le monde te touche ! Tu es entouré d’un tas de gens !
C’est dans ce contexte que survient un nouveau miracle. Au milieu de cette foule compacte se trouve une femme atteinte d’hémorragies depuis douze ans. On notera l’ironie de Marc : « Elle avait beaucoup souffert entre les mains de nombreux médecins. Elle avait dépensé tout ce qu’elle possédait, mais cela n’avait servi à rien ; au contraire, son état avait plutôt empiré ». Molière ou Jules Romains auraient aimé cette description du triomphe de la médecine ! Douze longues années de soins, en vain.
Sous couvert de la foule, raconte les évangiles, cette femme s’approche de Jésus, se glisse derrière lui et touche son manteau. Elle a entendu parler des miracles de Jésus ; l’histoire se passe en Galilée, la plus petite des provinces de Palestine. Peut-être a-t-elle vu Jésus accomplir un miracle, mais elle ne veut pas l’aborder. Elle ne veut pas raconter publiquement de quoi elle souffre. Ce sont des choses qu’on ne dit pas facilement… Elle craint sans doute que Jésus ne lui pose des questions. Elle espère une « guérison secrète ».
Les versets suivants présentent le raisonnement de cette femme. Elle se dit en effet : « Même si je ne touche que ses vêtements, je serai guérie. » Voyez sa détermination : elle est certaine d’échapper enfin à la maladie si elle parvient au minimum à toucher Jésus du bout de sa tunique.
Frères et soeurs, ces deux miracles sont d’autant plus frappants, étonnants, que - de part et d’autre - ils nous rapportent une situation désespérée : la fille de Jaïrus était mourante, nous dit le texte ; quant à la femme, cela faisait douze ans qu’elle souffrait et aucun médecin n’avait pu la guérir. On l’avait soulagée de ses économies, mais pas de sa maladie…
A l’instant même, écrit Marc, ses pertes de sang s’arrêtent et elle ressent qu’elle est délivrée de son mal. Jésus aussi s’aperçoit immédiatement que quelqu’un a fait appel à sa puissance de guérison. Cela ne s’est pas passé à son insu.
Il se retourne et dit aux gens qui l’entourent : « Qui a touché mes vêtements ? » Et il promène son regard autour de lui pour découvrir qui a fait cela… Jésus s’arrête… alors que la fille de Jaïrus est mourante ! C’était une affaire de minutes, de secondes peut-être ! Ce pauvre père aurait certainement voulu accélérer le pas. Pourtant, Jésus prend le temps d’interpeller cette femme.
Il ne se laisse pas gagner par l’angoisse de Jaïrus. Pourquoi ? Parce qu’il sait qu’il n’a pas à s’inquiéter pour la fillette. Un peu plus tard, il ne se précipitera pas non plus pour guérir Lazare ; il s’attardera même trois
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jours en chemin… Notre sauveur a souvent dû mettre les nerfs de ses amis à rude épreuve ! Mais pour lui, il n’y a pas de différence entre un malade et un mort : il peut agir dans les deux cas.
Marc témoigne d’une guérison à la fois immédiate… et totale puisque cette femme se rend compte aussitôt qu’elle est guérie : « A l’instant même, son hémorragie s’arrêta, et elle sentit dans son corps qu’elle était guérie de son mal »… Elle portait le fardeau de son infirmité depuis des années… et Jésus la guérit en un clin d’oeil. Ou plutôt : elle obtient sa guérison en un clin d’oeil, car cette guérison, d’une certaine façon, se fait « au corps défendant » de Jésus. Comme nous le disions dimanche dernier, le miracle lui a été « arraché ».
Jésus aurait pu la laisser repartir incognito, heureuse d’avoir trouvée la guérison. Eh bien non ! Il veut que cette femme comprenne que ce miracle n’a pas eu lieu sans sa volonté !
II
La guérison secrète de Jésus. Méditons à présent ses conséquences !
Il est bon de se souvenir ici que c’est une femme qui prend l’initiative et qui agit. Secrètement, sans doute, car son statut lui interdisait d’accoster un homme en public. Et sa maladie le lui interdisait doublement. Tout l’enseignement des rabbins se résumait à la cloîtrer chez elle, à la réduire à l’inactivité, à la passivité. Eh bien non ! Elle surmonte ce handicap et passe à l’action. Elle a compris que Jésus offre son aide et son salut sans distinction. Et que les femmes n’ont pas besoin de passer par les hommes pour avoir part au salut ! Dans le temple de Jérusalem, il y avait un parvis qui leur était réservé : elles pouvaient aller jusque-là et pas plus loin ! Dans les synagogues, il y avait – et de nos jours encore – un treillis séparant les femmes des hommes. L’instruction religieuse – et l’instruction tout court – était réservée aux hommes. Donc il y avait des barrières érigées entre les deux sexes et ces barrières, ce n’est pas Dieu qui les avait dressées.
Cette femme comprend que ces barrières n’existent pas pour le Christ. Elle est impure depuis douze ans ; l’accès au temple lui est interdit, ainsi que les relations conjugales. Peut-être – c’est une hypothèse vraisemblable – a-t-elle été répudiée pour cela par son mari. Dans ce cas-là, la loi exigeait qu’il lui restitue sa dot, ce qui expliquerait qu’elle ait disposé d’argent pour se faire soigner. En bravant la foule, elle avait fait quelque chose que toutes les règles et coutumes interdisaient.
Cette femme touche Jésus dans un but bien précis : retrouver la santé. C’est un acte de foi. Et Jésus a répondu à ce geste par la guérison. Ne croyons surtout pas que les vêtements de Jésus étaient des vêtements magiques, dotés d’un pouvoir miraculeux. Ce serait de la superstition. Les vêtements de Jésus, en temps normal, n’avaient pas plus de pouvoir que ceux de n’importe qui. Mais voilà qu’une femme le touche pour avoir la guérison et Dieu la lui accorde. Le contact n’était pas obligatoire ; Jésus aurait pu la guérir autrement. Dans son omniscience, il connaissait sa maladie incurable. Il aurait pu la guérir même à distance, comme il l’a fait en d’autres circonstances. Non, Jésus veut que cette guérison devienne un signe. Et pour cela, il faut qu’elle devienne visible, qu’elle soit connue.
Jésus entame donc un dialogue. Il veut rendre le miracle public. C’est pourquoi il demande : qui a touché mes vêtements ? Avec la surprise des disciples, que l’on connaît. Alors, raconte Marc, sachant ce qui s’est passé en elle, la femme se met à trembler de peur. Elle vient se jeter aux pieds de Jésus et lui avoue toute la vérité.
Le Seigneur ne veut pas culpabiliser cette femme ; il ne lui en veut pas de l’avoir touché ! Mais il veut la délivrer d’une interprétation superstitieuse de sa guérison. Il veut surtout lui faire confesser sa foi, et manifestement lui montrer aussi que sa maladie n’avait rien de honteux… Elle aurait sans doute voulu garder l’anonymat. Devoir avouer publiquement qu’elle souffrait d’hémorragie et qu’elle était sortie de chez elle, qu’elle avait évolué au milieu d’une foule et qu’elle avait touché le vêtement de Jésus, cela n’allait pas de soi. Et pourtant, la discussion que Jésus entame avec elle et la confession à laquelle il la contraint vont se révéler bienfaisantes pour sa foi. Elle lui avoue toute la vérité et Jésus lui dit : ma fille, ta foi t’a sauvée ; pars tranquille et sois libérée de ton mal !
Aucun reproche dans les paroles de Jésus. Il aurait pu lui dire : tu n’as pas le droit de faire ça ! Tu m’as
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souillé ! Imaginez ce qu’aurait été la réaction des Pharisiens et des scribes… Vous savez que la parabole du bon Samaritain dénonçait déjà ce ritualisme : c’est pour ne pas être souillés par le sang du blessé que les prêtres et les religieux ne lui prêtent aucune assistance…
Eh bien, il n’y a rien de cela chez le Christ. Chez lui, il n’y a que des paroles consolantes.
Les évangiles n’ont pas retenu le nom de la miraculée, mais Jésus l’appelle « ma fille ». Il y a beaucoup d’affection dans ce mot. Et puis cette affirmation : ta foi t’a sauvée – et non les franges de mon manteau, ni même l’argent que tu as dépensé auprès des médecins.
« Ta foi t’a sauvée », c’est-à-dire que ta foi a été l’instrument de ta guérison.
En fait, c’est mon pouvoir sur la maladie et la mort qui t’a donné la guérison ; et cette puissance t’a été communiquée parce que tu as cru en moi.
« Demandez, et l’on vous donnera ; cherchez et vous trouverez ; frappez, et l’on vous ouvrira ». Il y avait dans le geste de cette femme une intense demande. Une demande peut-être maladroite, mais respectueuse, humble et faite de foi. Elle a obtenu ce qu’elle demandait.
Bien plus : une guérison du corps est présentée aussi comme guérison de l’âme. Jésus ne dit pas : ta foi t’a guérie, mais : ta foi t’a sauvée. Il emploie un mot extrêmement fort, qui nous rappelle que la guérison fait partie du salut qu’il est venu nous apporter. Là où il y a péché, il y a maladie. La maladie est l’une des conséquences du péché originel. Elle ne faisait pas partie du plan de Dieu pour nous. Etre guéri d’une maladie signifie être délivré de l’une des conséquences du péché. En attendant la guérison parfaite, bien sûr, qui aura lieu au dernier jour, à la résurrection des morts. Notre corps est lui aussi pris dans l’engrenage du péché et de la mort. Et notre corps est appelé, lui aussi, à participer à la délivrance finale, à la rédemption.
Jésus console cette femme. Elle a droit au salut en lequel elle croit. L’amour du Christ lui était plus grand que les entraves dressées par les hommes.
Frères et soeurs, cette histoire annonce aussi ce que Jésus a fait pour chacun d’entre nous ! Jésus se laisse « souiller » et atteindre par nos offenses pour nous offrir le salut. Il se charge de nos impuretés pour nous offrir sa guérison. Il prend sur lui nos péchés pour nous accorder son pardon. Voilà la grandiose vérité qui transparaît, en filigranes, dans notre texte. Et un miracle était nécessaire pour authentifier cette vérité. Le miracle devient le signe tangible de cette vérité.
« Pars dans la paix », lui dit Jésus. La paix est très importante dans l’enseignement de la Bible ; elle est le fruit de la foi. C’est ce qui m’est offert, ce que je ressens, ce que j’expérimente quand je reconnais en Jésus mon sauveur.
Il lui dit enfin : « Sois guérie de ton mal » ! En fait, elle était déjà guérie ; elle l’avait senti dans son corps. Mais Jésus scelle, en quelque sorte, la guérison accordée, en prononçant ces paroles. Il affirme clairement qu’il voulait cette guérison et qu’elle était son oeuvre !
Marc ne nous dit pas ce que cette femme ressentit, mais il est facile de l’imaginer. Son coeur devait être rempli de joie et de gratitude. L’amour renverse tous les obstacles. Et cet amour apporte la délivrance et la joie.
Que l’exemple de cette femme anonyme, qui « arracha » un miracle au Seigneur vous encourage à prier avec foi ! Que sa joie en ce jour, soit aussi la vôtre ! Amen !

dimanche 22 mai 2011

JEAN 14.4-14




4 »Que votre coeur ne se trouble pas! Croyez en Dieu, croyez aussi en moi. 2 Il y a beaucoup de demeures dans la maison de mon Père. Si ce n'était pas le cas, je vous l'aurais dit. Je vais vous préparer une place.
3 Et puisque je vais vous préparer une place, je reviendrai et je vous prendrai avec moi afin que, là où je suis, vous y soyez aussi.
4 Vous savez où je vais et vous en savez le chemin.»
5 Thomas lui dit: «Seigneur, nous ne savons pas où tu vas. Comment pouvons-nous en savoir le chemin?» 6 Jésus lui dit: «C'est moi qui suis le chemin, la vérité et la vie. On ne vient au Père qu'en passant par moi.
7 Si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père. Et dès maintenant vous le connaissez et vous l'avez vu.»
8 Philippe lui dit: «Seigneur, montre-nous le Père, et cela nous suffit.»

9 Jésus lui dit: «Il y a si longtemps que je suis avec vous et tu ne me connais pas, Philippe! Celui qui m'a vu a vu le Père. Comment peux-tu dire: 'Montre-nous le Père'? 10 Ne crois-tu pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi? Les paroles que je vous dis, je ne les dis pas de moi-même; c'est le Père qui vit en moi qui fait lui-même ces oeuvres.
11 Croyez-moi: je suis dans le Père et le Père est en moi. Sinon, croyez[-moi] au moins à cause de ces oeuvres!
12 »En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit en moi fera aussi les oeuvres que je fais, et il en fera même de plus grandes, parce que je vais vers mon Père.
13 Tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai afin que la gloire du Père soit révélée dans le Fils.
14 Si vous [me] demandez quelque chose en mon nom, je le ferai
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Chers frères et soeurs,
chers amis,

Ce passage contient deux des versets les plus connus de la Bible.
Que votre coeur ne se trouble pas!
C'est moi qui suis le chemin, la vérité et la vie. On ne vient au Père qu'en passant par moi
Ces paroles, Jésus les adresse à des disciples déconcertés et craintifs. L'atmosphère est lourde. C'est le dernier repas du Seigneur avec ses amis. Bientôt, il va être arrêté, jugé et mené à la croix. Alors Jésus leur adresse, ainsi quà nous, des paroles de réconfort. Pas ce réconfort trop facile de la petite tape dans le dos, mais le vrai réconfort qui amène la consolation et soulage. Jésus va droit au coeur: « que votre coeur ne se trouble pas » ce qu'on peut aussi traduire plus simplement par « n'ayez pas peur ». « Que votre coeur ne se trouble pas »: le coeur, ce sont nos émotions les plus profondes. C'est là que Jésus veut agir. Jésus veut bannir la crainte, Jésus veut nous donner le réconfort. Mais comment?
Croyez en Dieu, croyez aussi en moi.
On peut aussi traduire « vous croyez en Dieu: croyez aussi en moi ». Peu importe en fait. L'important est de voir ici les implications de ces paroles. Croire en Dieu à l'époque de Jésus, c'était presqu'une évidence pour les juifs de Palestine. Mais quand Jésus rajoute en parallèle « croyez aussi en moi », il affirme clairement quelque chose de révolutionnaire: lui aussi est Dieu et nous devons mettre notre foi en lui.
C'est d'ailleurs un des thèmes centraux de ce passage: la relation de Jésus avec le Père et surtout le fait que nous ne pouvons entrer dans une relation avec le Père que par Jésus-Christ. Jésus ne nous dit pas de ne pas avoir peur parce que tout va s'arranger comme par enchantement. Il ne nous dit pas que ce qui nous effraie n'est qu'un croque-mitaine inoffenssif.
Jésus nous dit de ne pas avoir peur parce qu'il est le chemin vers le Père. « Quel est le chemin? » demande Thomas. Si, comme les autres disciples, il avait été un peu moins long à comprendre, il aurait saisi que la bonne question était « qui est le chemin » et que la seule bonne réponse est « Jésus ».
C'est ce que le Seigneur affirme: « Je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient au Père que par moi »
Est-ce que ces paroles vous semblent radicales, exclusives? C'est normal: elles sont radicales et exclusives. Nous avons parfois du mal, dans notre société pluraliste, à accepter ces paroles de Jésus. Ils sont si nombreux ceux qui pensent que toutes les religions mènent à Dieu. Ils sont encore plus nombreux à penser que, même si l'on est incroyant mais qu'on est « bon », Dieu nous fera bien une petite place dans son paradis. Et bien non. Ce n'est pas vrai. Il y a, nous dit la Bible,  « un seul Dieu, et aussi un seul médiateur entre Dieu et les humains, l'humain Jésus-Christ » (1 Timothée 2.5).
Mettons les choses au clair. Ces paroles ne disent pas qu'il n'y a rien de vrai, de beau, de juste dans la vie des autres croyants ou celle des incroyants. Ce serait faux, et nous le voyons bien.
Elles ne justifient pas non plus les baptêmes forcés, la répression des hérésies par l'Inquisition et toutes ces choses qui ont entachées l'histoire de l'Eglise.
La question reste encore et toujours la même: l'homme peut-il prétendre s'approcher de Dieu par ses bonnes oeuvres ou doit-il placer sa confiance en ce que Jésus a fait pour lui? Jésus dit « je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient au Père que par moi ». Voilà ce que Jésus dit de lui-même: qu'allez vous faire de ces paroles?? Allez vous dire « oui, je crois que c'est vrai. Je crois que mon salut ne vient que de Jésus-Christ  et c'est en lui et en lui seul que je mets ma confiance, pour tous les jours de ma vie, et pour l'éternité »?
Méditez sur ces paroles du Seigneur. Et prenez position. Prenez parti. Elles ne tolèrent pas la neutralité. Comme le dit si bien Thomas à Kempis dans L'Imitation de Jésus-Christ: « on ne peut marcher sans chemin, on ne peut connaître sans vérité, on ne peut vivre sans vie. » Voulez-vous le chemin, la vérité et la vie? C'est en Christ seul que vous les trouverez.

Mais cela amène la deuxième question de notre passage, qui est en fait une requête. Philippe demande « Seigneur, montre-nous le Père ». Thomas n'avait pas compris que Jésus lui-même était le chemin. Philippe, lui, n'a pas encore compris que voir Jésus, c'est voir le Père. Et on sent de l'étonnement, peut-être même un peu de déception dans la réponse de Jésus: Il y a si longtemps que je suis avec vous et tu ne me connais pas, Philippe!...Ne crois-tu pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi? »
Ici, faisons bien attention. Philippe avait vécu durant des mois à côté de Jésus, et pourtant, il était passé à côté de l'essentiel. Nous aussi, je crois que nous pouvons avoir Dieu à nos côtés, tout proche, et ne pas nous en rendre compte. Voyons-nous Dieu dans notre vie? Voyons-nous Jésus?
C'est ce que Jean nous dit, dès le début de son Evangile: « Personne n'a jamais vu Dieu. Mais le Fils unique, qui est Dieu et demeure auprès du Père, lui seul l'a fait connaître. » (Jean 1.18) Dans ce verset, Jean utilise le mot grec qui a donné le terme exégèse dans notre langue. Quand votre pasteur fait l'exégèse d'un texte biblique, il vous en donne le sens, il vous l'explique. Jésus nous explique qui est Dieu.
Les enfants peuvent poser les questions les plus désarmantes. Une petite fille m'a demandé un jour « c'est comment, le Ciel? » J'ai été bien embarassé: c'est difficile de dire à quoi ressemble exactement le Ciel. Il n'y pas vraiment de description dans la Bible! Par contre, quelques semaines après, la même petite fille m'a demandé « Il est comment, Dieu? »
Là, la réponse a été simple: Dieu, il est comme Jésus.
Est-ce que votre Dieu a bien le visage de Jésus? Si ce n'est pas le cas, vous en avez une fausse image.
Car si Dieu est comme Jésus, cela veut dire qu'il est amour, compassion, grâce. Cela veut dire qu'il vient vers nous. Cela veut dire qu'il veut que nous revenions à lui.
Voilà pourquoi Jésus peut nous dire « que votre coeur ne se trouble pas ». Jésus sait nos épreuves, il connaît nos peurs: la maladie, le chomage, la vieillesse, les querelles familiales. Mais toutes ces choses, nous n'avons pas à les affronter seuls. Dieu est avec nous et Dieu est pour nous. Il nous le dit en Christ. Croyez en moi a dit Jésus au début de notre texte.
En fait, il faudrait mieux traduire « ayez confiance en moi ».

Oui, alors que ces disciples vont être durement secoués, Jésus les appelle à la confiance. Foi, confiance, c'est la même chose. On peut savoir des choses sur Dieu, sur Jésus. On peut être même théologien. Mais ce n'est pas pour autant que l'on a placé toute sa confiance en Christ. La confiance est une relation, et c'est bien là ce que Dieu veut établir avec nous.
A l'ombre de la Croix, Jésus appelle ses amis à la confiance, parce que c'est cette confiance en lui, fondée sur l'expérience de la résurrection, qui est la clé de l'avenir. De votre avenir.
C'est cette confiance en Christ qui fera que notre coeur ne se troublera pas, que nous pourrons avancer sur le chemin, en connaissant la vérité et en nous réjouissant de la vie.
Amen.



dimanche 15 mai 2011

EPHESIENS 2;20-22

Méditation présentée pour l'Assemblée Générale de l'Eglise Luthérienne en Poitou, 15 mai 2011


20Vous avez été construits sur les fondations constituées par les apôtres et prophètes, Jésus-Christ lui-même étant la pierre de l'angle. 21C'est en lui que toute construction bien coordonnée s'élève pour être, dans le Seigneur, un sanctuaire saint. 22C'est en lui que, vous aussi, vous êtes construits ensemble pour être une habitation de Dieu, dans l'Esprit. 

 



Le Capitole de Washington est un des plus imposants monuments de la capitale américaine. C'est aussi lieu très symbolique de la vie publique des USA. Et bien figurez-vous qu'on ne sait pas où est passée la pierre d'angle du Capitole. Oh, elle est toujours là bien sûr, mais le bâtiment a subi tellement de modifications et d'agrandissements qu'on ne sait plus où elle est...

La pierre d'angle (ou pierre angulaire) est celle qu'on pose au début d'une construction et sur laquelle repose tout l'édifice qu'on va bâtir. C'est sur elle que repose la maison. Sans elle, tout s'acroule. Dans notre passage, Paul explique que Jésus est la pierre d'angle de l'Eglise. L'Eglise est bâtie sur Jésus. Sans Jésus, l'Eglise s'effondre.

J'entends parfois à la radio ou sur Internet des émissions qui se veulent chrétiennes. Je dis « se veulent » parce que souvent, trop souvent, le nom de Jésus n'est même pas prononcé. Pourtant, la foi chrétienne affirme clairement qu'on ne peut connaître Dieu qu'en Jésus-Christ. Et justement: si nous arrivons à nous débarasser de Christ, nous pouvons alors faire de Dieu ce que nous voulons. En Allemagne dans les années 30, de distingués théologiens disaient « Le Dieu tout-puissant ne peut pas être contenu dans la personne d'un Juif de Nazareth. Non, Dieu est ce qu'il y a de plus grand et de meilleur,le Surhomme!! » Et tout s'écroula.

Mais Jésus est toujours là: « je suis la chemin, la vérité et la vie, nul ne vient au Père que par moi. »

Etre chrétien, c'est tout simplement vivre sa vie à la lumière de Jésus-Christ. C'est croire qu'il est la source de notre salut. C'est écouter sa Parole et suivre son enseignement. C'est l'aimer et se savoir aimé de lui.

Disons le clairement, frères et soeurs, une église où Jésus-Christ, son oeuvre et son message ne sont plus au centre est condamnée à s'effondrer sur elle-même. Elle pourra devenir une association de bienfaisance, une ligue de vertu, une sorte de Rotary, une annexe de parti politique, mais elle ne sera plus « la colonne et l'appui de la vérité » car la vérité ne se trouve qu'en Christ.

L'Eglise ne peut donc être fondée que sur le Christ. Mais, de plus, l'Eglise ne peut grandir, s'édifier qu'en Christ:
C'est en lui que toute construction bien coordonnée s'élève pour être, dans le Seigneur, un sanctuaire saint. 22C'est en lui que, vous aussi, vous êtes construits ensemble pour être une habitation de Dieu, dans l'Esprit.

Avant de quitter ses disciples, Jésus leur a dit « je bâtirai mon église. »

Si nous sommes réunis ce matin, c'est pour faire le point sur la vie de notre communauté. Celle-ci, comme toute communauté locale, a des forces et des faiblesses; elle a des projets et des envies. Nous voulons être fidèles à l'appel que Dieu nous a adressé.
Mais là encore, soyons conscients d'une chose capitale: c'est seulement en Christ qu'une église peut véritablement « grandir ». Nous vivons à une époque qui a le culte de la quantité: plus c'est gros, plus c'est meilleur (et, au passage, périssent les « petits »!) En tant que chrétiens, nous ne pouvons pas adopter cette façon de voir et de juger. L'important pour nous, c'est la qualité, et cette dernière ne peut se mesurer qu'à l'aune de Christ.

Seul Jésus, par son Esprit, pourra faire qu'une église connaisse une croissance saine. Et cette croissance n'est pas tant une croissance numérique qu'une croissance en amour mutuel, en fidélité, en conformité avec la personne de Jésus-Christ.

Vous remarquerez que Paul dit que les chrétiens sont « construits ensemble pour être une habitation de Dieu ». Ensemble. Nous parlons de communauté ici.
Dans sa première lettre, Pierre dit « en tant que pierres vivantes, laissez-vous édifier pour former une maison spirituelle, un groupe de prêtres saints, afin d'offrir des sacrifices spirituels que Dieu peut accepter par Jésus-Christ »
Chaque chrétien est appelé à devenir une pierre vivante qui va s'intégrer dans la construction de la maison de Dieu. Chacun de nous reçoit pour cela au moins un don de l'Esprit, qu'il doit utiliser pour l'édification commune. Mais, nous dit Pierre, nous ne pouvons être pierres vivantes que parce que Christ lui-même est « pierre vivante rejetée par les hommes mais choisie et précieuse devant Dieu »

Jésus demeure la seule pierre d'angle de l'église. Jésus est la seule raison d'être de l'église. Il est la raison de notre espérance et le motif de nos actions. Nous allons vers lui parce qu'il continue, chaque jour, à venir vers nous, dans la Parole et les sacrements qu'il nous donne.

Jésus-Christ lui-même est la pierre de l'angle...




Dieu tout-puissant, rassemblés devant toi, nous te rendons grâces pour les bénédictions que tu as accordées à notre église. Nous te prions te guider nos délibérations par la lumière de ton Esprit Saint pour que ton église vive en paix et accomplisse le dessein de celui qui l'a aimée et s'est donnée pour elle, ton Fils notre Sauveur Jésus-Christ. Amen.

mardi 10 mai 2011

Méditations sur les psaumes des montées, d'Eugene Peterson



Un grand merci doit être rendu aux Editions Farel pour avoir mis à la disposition du public francophone une traduction de cet excellent livre.

Né en 1932, Peterson est pasteur de l'Eglise Presbytérienne aux USA (PC-USA, équivalent de l'Eglise Réformée de France). Spécialiste en langues sémitiques, il a fait paraître une paraphrase des Ecritures très appréciée dans le monde anglophone: The Message (Le Message). Il a aussi enseigné durant de longues années la théologie spirituelle à Regent College (Canada).

Méditations sur les psaumes des montées est cela: un ouvrage de théologie spirituelle. Comme le titre l'indique, le lecteur y trouvera des méditation sur les Psaumes des montées (120 à 134) qui étaient chantés par les pélerins juifs qui "montaient" à Jérsusalem. Comme le dit la quatrième de couverture, pour Peterson: "Chanter les Psaumes des montées est une  manière d’exprimer la grâce merveilleuse de Dieu et d’apaiser nos craintes. Il n’existe aucun ‘‘chant pour la route’’ qui soit plus approprié que ceux-ci pour effectuer le voyage de la foi en Christ".

N'hésitez pas à lire ce livre au style simple mais profondément enrichissant spirituellement. On y trouve une rafraichissante "troisième voie" qui montre que la réflexion n'exclue pas la piété...et inversement! 

T.C.

PS: j'ai failli ne pas écrire ce compte-rendu à cause du déplorable sous-titre de l'édition française: La vraie connaissance de Dieu naît de l'obéissance. Tel n'est pas le propos de Peterson dans ce livre où il réfléchit plutôt sur la longue marche quotidienne du disciple de Jésus dans une société centrée sur l'instantanéité. Nous sommes encore nombreux à croire que la vraie connaissance de Dieu vient de la foi en Jésus-Christ et en ce qu'il a accompli pour nous: le salut gratuit de nos fautes, par la grâce de Dieu.
Espérons qu'une prochaine édition corrigera cette bourde théologique. 

Pour commander, c'est ici



dimanche 8 mai 2011

PSAUME 16.5-11


Autres lectures: Actes 2.14-33, 1 Pierre 1.17-21, Luc 24.13-35

5Le SEIGNEUR est mon partage et ma coupe ; c'est toi qui assures mon lot ;
6la part qui me revient est un lieu de délices ; c'est un patrimoine magnifique pour moi.
7Je bénis le SEIGNEUR qui me conseille ; même la nuit, les profondeurs de mon être m'instruisent.
8Je contemple le SEIGNEUR constamment devant moi, quand il est à ma droite, je ne vacille pas.
9Aussi mon cœur se réjouit, ma gloire est dans l'allégresse, ma chair même repose en sécurité.
10Car tu ne m'abandonneras pas au séjour des morts, tu ne permettras pas que ton fidèle voie la fosse.
11Tu me feras connaître le sentier de la vie ; il y a abondance de joies devant toi, des délices éternelles à ta droite.




Chers frères et soeurs,
chers amis,



Avez-vous déjà entendu parler de la Mer d'Aral? C'était une mer intérieure d'Asie Centrale. En 1960, encore alimentée par les puissants fleuves Amou-Daria et Syr-Daria, elle couvrait 68 000 km2 et était la quatrième surface d'eau salée intérieure du monde. Je dis bien « était ». En effet, les économistes soviétiques décidèrent, pour irriguer les cultures de coton, de détourner les deux fleuves qui se déversaient dans la Mer d'Aral. S'ensuivit une des plus grandes catastrophes écologiques de notre temps. En effet, le manque d'apport en eau douce a peu à peu fait baisser le niveau de la mer et augmenté sa salinité, détruisant l'écosystème. Aujourd'hui, la Mer d'Aral a perdu 75% de sa surface et 90% de son volume. Les 24 espèces qu'elle abritait ont toutes disparues. L'évaporation des insecticides qui y avaient été déposés depuis des décennies y a amené le plus fort taux de mortalité infantile du monde et nombre de cancers et d'anémies.
Le symbole le plus frappant de cette catastrophe se trouve dans ces photos très connues qui montrent les anciens bateaux de pêches soviétiques échoués au milieu de l'immense désert qu'est devenu la mer. On a l'impression de voir des chalutiers qui auraient été jetés depuis la Lune en plein coeur du Sahara. Ils sont là, rouillés et dévorés par le sel, écrasés de soleil, semblant attendre un déluge qui les remettraient à flot. Ils sont l'image de la bêtise humaine et de l'exploitation éhonté de la Création. Mais, plus profondément encore, je pense qu'ils sont aussi le symbole même de l'abandon.


Est-ce que vous vous êtes déjà senti comme un bateau seul en plein milieu d'un désert? Est-ce que vous vous êtes déjà senti abandonné, enfoncé dans les sables? Est-ce que vous vous êtes déjà senti abandonné dans un désert, sans aucun espoir de pouvoir faire les grandes choses que vous avez le pouvoir de faire? Est-ce que vous vous êtes déjà senti abandonné?


L'abandon, c'est ce sentiment que l'on peut ressentir tout petit quand Papa et maman vous laissent pour votre premier jour d'école. Il y a cette panique d'être perdu que l'on peut encore ressentir adulte, quand vous cherchez votre chemin sur une petit route de campagne en pleine nuit.
Mais au-delà de ça, il y a aussi l'abandon que nous ressentons quand l'être que nous aimons nous néglige; le sentiment de cet enfant dont le père et la mère se déchirent à grands cris, celui de l'ado devenu le souffre-douleur de tout le collège et qui ne peut en parler à personne, celui de l'adulte qui n' pas trouvé un compagnon ou une compagne. Le sentiment aussi de celui qui apprend que le chef du personnel veut le voir à midi ou dont le médecin appelle parce qu'il veut absolument parler du résultat des dernières analyses. Dans tous ces cas, comme dans bien d'autres, nous pouvons nous sentir comme des bateaux dans le désert. Abandonnés dans la fournaise.


Lorsqu'il a été crucifié, Jésus a crié « mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as tu abandonné? » Pourquoi m'as tu laissé sur cette croix? Pourquoi m'as tu abandonné comme un bateau dans le désert? Pourquoi m'as tu abandonné comme un enfant malheureux, comme un malade? Pourquoi m'as tu abandonné de cette façon horrible?


Jésus a connu l'abandon ultime. Il a été séparé de Dieu son Père parce qu'il portait le poids de notre péché à notre place. Et pourtant, au coeur même de cette terrible expérience d'abandon, Jésus a quand même fait confiance en disant « Père, entre tes mains je remets mon esprit »: « Père, je te donne mon esprit, je le laisse entre tes mains, j'ai confiance en toi pour que tu prennes soin de moi .» Il me semble que « je remets mon esprit entre tes mains » est déjà un écho d'une parole de notre psaume:
tu ne m'abandonneras pas au séjour des morts


Et c'est bien ce qui s'est produit. Dieu n'a pas laissé la mort vaincre Jésus mais il l'a ressuscité au matin de Pâques. Voilà pourquoi Pierre a pu utiliser le Psaume 16 dans son « sermon » du jour de la Pentecôte: parce que, poussé par l'Esprit qu'il venait de recevoir, il pouvait proclamer que les promesses de l'Ancien Testament s'étaient accomplies pour Jésus et en Jésus.


Jésus n'est pas resté comme un bateau abandonné en plein désert. Il n'est pas resté dans sa tombe mais le Père l'a relevé des morts.

Et pour nous, le psaume 16 veut dire que nous aussi, nous ne serons pas abandonnés. Si nous croyons en Jésus comme notre seul Sauveur, nous pouvons être sûrs que nous vivrons éternellement. Et même dans cette vie, nous pouvons avoir l'assurance que Dieu sera toujours avec nous. Car ce psaume décrit ce qui peut être l'expérience du croyant, il décrit en fait la vie que Dieu veut donner à chacun d'entre nous par la bonne nouvelle du salut gratuit en Christ.
Nous sommes dans la saison de Pâques, et nous parlons beaucoup de la joie de la Résurrection du Seigneur.
Mais avons-nous conscience que la vie du chrétien est toute entière une vie de joie? De façon très frappante, quand il écrit aux Galates, qui étaient des croyants qui s'éloignaient de la vérité de l'Evangile, Paul demande: « Où donc est votre bonheur ? » (Gal 4.15). L'Evangile est une question de bonheur. Au coeur de la relation que Dieu veut nouer avec chacun d'entre nous ne se trouve pas de grandes questions métaphysiques, mais notre bonheur.
Examinez bien le vocabulaire de notre psaume: lieu de délices, patrimoine magnifique, mon cœur se réjouit, ma gloire est dans l'allégresse, abondance de joies, délices éternelles.


Le message est clair, je pense. Ce psaume nous décrit la provision abondante de notre Dieu, tout ce qu'il veut donner à chacun de nous et qui seul pourra remplir le vide de nos coeurs.
Le drame de nos contemporains est qu'ils cherchent le plus souvent le bonheur là où ils ne peuvent le trouver: dans le matérialisme, dans les fausses sagesses de certaines philosophies fumeuses ou d'un ésotérisme de bazar, dans la « réalisation d'eux-mêmes ». Tout cela est vain.
Il n'y a de « délices éternelles » qu'à la droite de Dieu, là où Jésus lui-même se trouve (1 Pierre 3.22, Actes 2.33).
L'enjeu pour nous est de comprendre que Dieu ne nous a pas abandonnés, qu'il ne nous abandonnera jamais. Même si nous sommes comme les bateaux de la Mer d'Aral, pitoyablement échoués dans le sable, Dieu va faire couler sur nous les courants d'eau vive qui viennent de Jésus pour nous remettre à flot. 

 
Pensez à ces deux disciples sur la chemin d' Emmaüs dont nous avons lu le récit ce matin. Eux aussi se sentaient abandonnés, défaits, après la mort de Jésus. Un étranger se met à marcher avec eux. C'est le Seigneur, mais, nous dit la Bible, « étaient empêchés (litt. retenus) de le reconnaître »
Empêchés pas quoi? Ils y voyaient pourtant clair, eux qui marchaient droit sur une chemin caillouteux! Non, ici, c'était un problème de vision spirituelle. C'était leur chagrin, leur peur, leur sentiment d'abandon qui les empêchait de reconnaître Jésus, qui était pourtant tout près d'eux.
Je crois que cela peut encore nous arriver: ne pas arriver à reconnaître la présence de Christ à nos cotés alors qu'il est tout près de nous. Mais le Seigneur ne veut pas nous laisser dans l'aveuglement. Il veut que nous puissions le voir, que nous puissions voir les bénédictions qu'il donne à ses fidèles et dont le Psaume 16 nous a parlées.


Comme il l'a fait pour ses disciples à Emmaüs, Jésus veut nous ouvrir le sens des Ecritures, qui sont notre seul guide sûr, la lumière véritable sur notre sentier.
Nous pouvons lui faire confiance, comme le dit le dernier verset de notre psaume, il nous fera « connaître le chemin de la vie » et, ce qui est encore plus précieux, il nous accompagnera toujours sur ce chemin. Il est ressuscité. Il ne nous abandonnera jamais.


Amen.

dimanche 1 mai 2011

Jean 20.19-31

19 Le soir de ce même dimanche, les portes de la maison où les disciples se trouvaient [rassemblés] étaient fermées car ils avaient peur des chefs juifs; Jésus vint alors se présenter au milieu d'eux et leur dit: «Que la paix soit avec vous!»
20 Après avoir dit cela, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur. 21 Jésus leur dit de nouveau: «Que la paix soit avec vous! Tout comme le Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie.»
22 Après ces paroles, il souffla sur eux et leur dit: «Recevez le Saint-Esprit! 23 Ceux à qui vous pardonnerez les péchés, ils leur seront pardonnés; ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus.»
24 Thomas appelé Didyme, l'un des douze, n'était pas avec eux lorsque Jésus vint.
25 Les autres disciples lui dirent donc: «Nous avons vu le Seigneur.» Mais il leur dit: «Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je n'y mets pas mon doigt et si je ne mets pas ma main dans son côté, je ne croirai pas.»
26 Huit jours après, les disciples de Jésus étaient de nouveau dans la maison et Thomas se trouvait avec eux. Jésus vint alors que les portes étaient fermées, se tint au milieu d'eux et dit: «Que la paix soit avec vous!»
27 Puis il dit à Thomas: «Avance ton doigt ici et regarde mes mains. Avance aussi ta main et mets-la dans mon côté. Ne sois pas incrédule, mais crois!»
28 Thomas lui répondit: «Mon Seigneur et mon Dieu!» Jésus lui dit: 29 «Parce que tu m'as vu, tu as cru. Heureux ceux qui n'ont pas vu et qui ont cru!»

30 Jésus a accompli encore, en présence de ses disciples, beaucoup d'autres signes qui ne sont pas décrits dans ce livre.
31 Mais ceux-ci ont été décrits afin que vous croyiez que Jésus est le Messie, le Fils de Dieu, et qu'en croyant vous ayez la vie en son nom.


Into the Wound © Jan L. Richardson


Chers frères et soeurs,
chers amis


La semaine dernière, lors du dimanche de Pâques, nous avons pu remarquer que les Evangiles ne nous décrivent pas la Résurrection de Jésus. Ils ne nous la racontent pas, nous ne savons pas comment les choses ses sont passées.
Ce que nous avons dans notre Nouveau Testament, ce sont en revanche des rencontres avec le Christ ressuscité. Notre texte de ce matin nous rapporte la rencontre entre ce Christ revenu à la vie et son apôtre Thomas.

Pauvre Thomas! Devenu depuis si longtemps le symbole même de l'incrédulité. « Doubting Thomas » disent les anglo-saxons: Thomas qui doute. Mais même dans notre langue, cet épisode biblique a laissé des traces. N'avez-vous jamais entendu quelqu'un dire: « moi, je suis comme Saint Thomas: je ne crois que ce que je vois! »? Cette phrase, qui exprime en général le matérialisme le plus rigide (on a envie de dire « obtus ») est inacceptable. Tout d'abord, parce qu'elle ne rend pas vraiment compte de ce qui se passe dans ce récit entre Thomas et Jésus. Ensuite, c'est une phrase qui me rend triste pour ceux qui la prononcent. Par cette phrase, dont ils sont généralement assez fiers, ils confessent en fait leur infirmité à voir autant qu'à croire, ils confessent leur incapacité à saisir la moindre chose du réel.

Oh, certes, il y a des choses que nous voyons. Nous voyons, par exemple, des arbres, des vaches, des rochers. Mais est-ce que pour autant nous « croyons » aux arbres, aux vaches, aux rochers? Voilà, chers amis, ce que nous « voyons ». Il n'y a là rigoureusement rien à croire.
Il n'y a qu'à voir et à nommer, et si nous avons le temps, à comprendre comment ça fonctionne, à quoi ça sert, etc… C'est du matérialisme pur et dur : encore une fois, rien à croire.
Mais même ce qu'il voit n'est pas le tout des choses. Voit-il tous les fils et le serveur qui lui permettent d'envoyer un mail? Voit-il l'enchevêtrement de son ADN? Voit-il les confins de notre galaxie? Voit-il l'histoire humaine? Non, évidemment. Il voit des choses. Il essaie de les analyser et en tire des théories qui sont peut-être les siennes, mais qui peuvent être contredites.

Il lui faut donc bien croire que l'esprit humain est capable d'appréhender efficacement ce qu'il ne voit pourtant pas directement. Notre personnage qui refuse de « croire autre chose que ce qu'il voit » n'est pas même un animal, car il n'a pas même d'instinct ; il est une plante !
Enfin, même s'il admettait de croire à des hypothèses scientifiques sur ce qu'il ne voit pourtant pas, il est certain qu'il exclurait de sa croyance tout ce qui échappe à une observation de type scientifique, et qui pourtant tisse tant de liens entre les gens et les sociétés.
Au sens strict, on ne « voit » pas l'amour, la tendresse, le partage. Personne n'a jamais vu ce qui a permis à l'esprit de Tolkien d'écrire Le Seigneur des Anneaux et à celui de Montaigne d'écrire Les Essais. Malheureux est-il donc celui qui affirme (faussement) ne croire que ce qu'il voit. Qu'il est limité, parce qu'en fait aveugle à ce que notre monde peut réserver de plus beau. Pauvre homme ! Ne lui ressemblez pas, par pitié…

D'ailleurs, Thomas ne lui ressemble pas non plus. Thomas ne fait pas partie de ces matérialistes hautains qui déclarent que le dossier « Dieu » est classé. Thomas nous parle parce que nous voyons en lui le doute qui est souvent le nôtre, même si nous sommes « croyants ». Son surnom « Dydime » signifie jumeau. Jumeau de qui?? De nous je pense, car Thomas ressemble à chacun d'entre nous et nous pouvons nous reconnaître en lui ce matin. Son doute ressemble tant au nôtre.

Nous vivons dans une société qui n'est pas tendre envers les croyants, vus comme des gens un peu naïfs et immatures. Cela crée une pression sur certains: quand la majeure partie de notre élite intellectuelle s'affirme agnostique ou athée, peut-on sérieusement être chrétien? Il y a aussi ces prières auxquelles nous avons parfois l'impression que Dieu n'a pas répondu; il y a les drames de notre monde (guerres, injustices, désastre écologique): tout cela peut nous faire douter de la réalité d'un Dieu d'amour.

Et Thomas, justement, ne croit pas. Oh, il a cru bien sûr en ce Jésus si extraordinaire par ses paroles et ses actes. Mais Jésus est mort, et tout est fini. Quand Jésus a annoncé qu'il partait vers Jérusalem, Thomas a dit aux autres disciples: «Allons-y, nous aussi, afin de mourir avec lui. » (Jean 11.16). Paroles magnifiques de détermination, mais qui n'ont pas empêché Thomas d'abandonner Jésus, comme tous les autres. Voilà peut-être pourquoi, à présent, Thomas se sent encore plus triste, encore plus mal que les autres disciples. J'imagine que quand Jésus apparaît une première fois à ses compagnons, Thomas est en train de se terrer on ne sait où, rongé par la tristesse, la crainte et le remords.
Et quand les disciples lui disent « nous avons vu le Seigneur! », Thomas refuse de croire. Ou plutôt, il pose des conditions: trois conditions:«Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous (et d'une), si je n'y mets pas mon doigt (et de deux) et si je ne mets pas ma main dans son côté (et de trois), je ne croirai pas.» Quand on sait que ce chiffre de 3 symbolise souvent dans la Bible ce qui est complet, parfait (2 Co 12.7-8, Jn 21.15-17) on voit que Thomas exige d'être pleinement et complètement convaincu par des preuves irréfutables.

Faut-il y voir de l'entêtement? Je ne le pense pas. J'aurai plutôt tendance à voir aussi dans ces paroles une forme de prière, une façon de dire: « je ne peux pas y croire, je suis trop défait, c'est trop incroyable. Il va vraiment m'en falloir beaucoup ».
Peut-être cette idée nous aidera-t'elle à combattre cette fausse image du chrétien idéal, vivant dans la pure sérénité d'une foi sans nuages, cette foi qui, bien sûr, ne se poserait jamais de questions.
Oui, nous nous rendons compte de plus en plus que ce Thomas nous ressemble vraiment beaucoup, avec nos craintes, nos doutes. Et cette ressemblance est une bonne nouvelle pour nous.
Car, absent, silencieux, Jésus a entendu celui qu'il aime. Huit jours après, il réapparaît en sa présence. Qu'est-ce que cela veut dire, si ce n'est nos doutes, nos incrédulités ne seront jamais un obstacle pour Jésus, qu'ils n'empêcheront pas le Seigneur de venir vers nous?
Et pour Thomas, Jésus fait quelque chose de véritablement inouï. Une à une, avec une précision étonnante, il réalise les conditions posées par Thomas:
«Avance ton doigt ici et regarde mes mains. Avance aussi ta main et mets-la dans mon côté. Ne sois pas incrédule, mais crois!».
L’incrédule a beau se retrancher dans la forteresse de son doute, Jésus est vivant ; Jésus est puissant ; Jésus est le plus fort ; Jésus balaie ses résistances et l'amène à ce qui a dû être la plus grande joie de la vie de Thomas qui peut enfin pousser ce cri de foi véritable, c’est-à-dire de confiance et de consécration : “Mon Seigneur et mon Dieu” (v. 28). Plus tard, Jésus va quitter ses disciples. Thomas ne le verra plus, mais il ne deviendra pas incroyant pour autant. Car la foi n'est pas tant une question de vue qu'une question de vie: une vie changée par la rencontre avec Jésus.

Jésus est venu à la rencontre de Thomas.Fera-t-il la même chose pour nous ?

La réponse est un « oui » clair et net. Oui, il fera la même chose, mais il la fera autrement. Il ne nous vaincra et ne nous convaincra pas par des apparitions, du moins en règle générale. Il le fera en nous renvoyant au témoignage de ceux qui ont vu. Il le fera en nous renvoyant à la Parole reçue, à la Bible lue dans la communauté des frères. “Heureux sont ceux qui croient sans m’avoir vu”, dit Jésus à Thomas reconquis, et l’évangéliste ajoute : « 30 Jésus a accompli encore, en présence de ses disciples, beaucoup d'autres signes qui ne sont pas décrits dans ce livre.31 Mais ceux-ci ont été décrits afin que vous croyiez que Jésus est le Messie, le Fils de Dieu, et qu'en croyant vous ayez la vie en son nom. »

Voyez-vous, frères et soeurs, la Bible n'est pas un recueil de belles histoires, elle n'est pas un livre de morale. La Bible est un témoignage rendu à Jésus-Christ, le Fils de Dieu afin que nous placions notre confiance en lui. Elle nous explique qui il est, ce qu'il a fait en mourant pour nos fautes sur la croix afin que nous puissions être pardonnés de toutes nos fautes. Nous pouvons voir Jésus dans ce témoignage et apprendre que la volonté du Père c'est que « toute personne qui voit le Fils et croit en lui ait la vie éternelle ».