dimanche 27 juin 2010

LUC 9.51-62 (1 Rois 19.16-21, Galates 5.1-18)











1 Lorsque approchèrent les jours où il devait être enlevé du monde, Jésus prit la décision de se rendre à Jérusalem.
52 Il envoya devant lui des messagers qui se mirent en route et entrèrent dans un village samaritain pour lui préparer un logement.
53 Mais on refusa de l'accueillir parce qu'il se dirigeait vers Jérusalem.
54 Voyant cela, ses disciples Jacques et Jean dirent: «Seigneur, veux-tu que nous ordonnions au feu de descendre du ciel et de les consumer [comme l'a fait Elie]?»
55 Jésus se tourna vers eux et leur adressa des reproches [en disant: «Vous ne savez pas de quel esprit vous êtes animés.
56 En effet, le Fils de l'homme n'est pas venu pour perdre les âmes des hommes, mais pour les sauver.»] Et ils allèrent dans un autre village. 57 Pendant qu'ils étaient en chemin, un homme lui dit: «[Seigneur,] je te suivrai partout où tu iras.»
58 Jésus lui répondit: «Les renards ont des tanières et les oiseaux du ciel ont des nids, mais le Fils de l'homme n'a pas un endroit où il puisse reposer sa tête.»
59 Il dit à un autre: «Suis-moi.» Il répondit: «Seigneur, permets-moi d'aller d'abord enterrer mon père.»
60 Mais Jésus lui dit: «Laisse les morts enterrer leurs morts et toi, va annoncer le royaume de Dieu.» 61 Un autre dit: «Je te suivrai, Seigneur, mais permets-moi d'aller d'abord faire mes adieux à ceux de ma maison.» 62 Jésus lui répondit: «Celui qui met la main à la charrue et regarde en arrière n'est pas fait pour le royaume de Dieu.»



Chers frères et soeurs,
chers amis,

On sent chez Jésus de l'impatience et peut-être même de l'irritation quand ces disciples reviennent de ce village samaritain qui a refusé de le recevoir. Une nouvelle fois, les disciples ne comprennent pas. Une nouvelle fois, ils ont échoué à saisir ce qui se passait devant leurs yeux. Des reproches, Jésus leur en a déjà adressés et il leur en adressera encore. Mais il est peut-être particulièrement saisi par la déception en ce moment où, comme le dit notre premier verset, il prend la ferme résolution de se rendre à Jérusalem. La traduction Darby, très littérale, donne une bonne idée du Grec « il dressa sa face résolument pour aller à Jérusalem ». Pensez aux visages de ces athlètes avant la course, concentrés, tendus vers l'effort à accomplir, déterminés. Jésus, comme le dit le prophète Esaïe, rend son visage semblable à du granit et s'en va vers son but ultime. Il nous faut comprendre que ce passage ouvre une nouvelle partie de l'Evangile de Luc. Jusque là, Luc nous a raconté le ministère de Jésus en Galilée (4.16-9.50). A partir de maintenant, nous n'avons plus ce minsitère circulaire en Galilée. Au contraire, Jésus va tout droit, vers Jérusalem, là où il sait qu'il va donner sa vie pour les péchés du monde et rendre ainsi témoignage de l'amour de Dieu pour nous tous.
Alors quand les disciples parlent d'envoyer le feu du Ciel sur ce village inhospitalier, Jésus leur répond qu'il ne savent de quel esprit ils sont animés. Bien sûr, le prophète Elie, des centaines d'années auparavant avait fait foudroyé plus d'une centaine d'hommes qui lui avaient manqué de respect et donc insulté Dieu. Mais Dieu n'a pas envoyé son Fils dans le monde pour juger le monde, mais pour que par lui le monde soit sauvé (Jean 3.17). Les disciples veulent une grande manifestation divine, un bon coup de napalm céleste sur ces mécréants. Ils ne comprennent pas que la puissance de Dieu va se mainfester dans la faiblesse de la Croix. Nous aussi, prenon bien garde, quand nous cherchons à défendre l'honneur de Dieu à ne pas le faire par des moyens ou des paroles qui insultent ce même honneur.

Et puis il y a ces « candidats disciples » qui disent qu'ils vont suivre Jésus. Eux non plus ne comprennent pas ce qui est déjà en train de se jouer. Leur promesses sont faites d'un coeur partagé. Ils traînent des pieds. Jésus, lui, « trace sa route » et va droit au but.

Sincèrement, quand nous lisons ce passage, l'attitude de Jésus peut nous sembler dure, cassante.
C'est d'abord un homme qui vient vers Jésus et lui dit « Seigneur, je te suivrai partout où tu iras ». Matthieu nous dit que cet homme est un scribe, un membre de l'élite religieuse et intellectuelle et certainement pas pauvre non plus. On imagine déjà les disciples se frotter les mains: « regardez, les gens bien se tournent vers nous; ils suivent Jésus, on commence à percer ». La réponse, elle, est tranchante: «Les renards ont des tanières et les oiseaux du ciel ont des nids, mais le Fils de l'homme n'a pas un endroit où il puisse reposer sa tête.». Jésus prévient, il met en garde: es-tu sûr au moins de ce que tu veux faire? En réalises-tu toute la portée? Le disciples n'est pas plus grand que le maître, et l'opposition que je rencontre, ceux qui me suivent vraiment la rencontreront aussi. Je crois que Jésus savait qu'il y avait chez cet homme un manque de détermination, et il l'invite à s'examiner. Nous aussi, posons-nous la question: sommes-nous prêts à suivre Jésus sur le chemin et à en payer parfois le prix?
Le deuxième homme, c'est Jésus qui l'appelle. Il est a priori prêt à partir, mais demande une chose: pouvoir enterrer son père. Que veut-il dire par là au juste? Que son père vient de mourir et qu'il veut attendre la cérémonie qui avait lieu un an après le décès? Ou bien veut-il attendre jusqu'à la mort de son père, c'est à dire pour uen durée indéterminée avant de se mettre en route? En tout état de cause, cet homme veut bien partir, mais plus tard, quand ce sera plus commode. Le plan de Jésus lui, ne peut pas attendre. Il va à Jérusalem, maintenant et il ne peut pas faire une pause sur le chemin.
Laisse les morts enterrer leurs morts; c'est-à-dire, cesse de te laisser retenir par les affaires de ceux qui sont spirituellement morts car moi seul je peux donner la vie.
C'est alors qu'arrive le troisième disciple: « permets-moi d'aller d'abord faire mes adieux à ceux de ma maison. ».

Là aussi, la réponse fuse, directe, implacable presque « «Celui qui met la main à la charrue et regarde en arrière n'est pas fait pour le royaume de Dieu.». Il faut se souvenir qu'à l'époque, les charrues étaient traînées par des animaux et dirigées depuis l'arrière par le paysan, qui devait bien vérifier l'alignement de la charrue et de la bête pour tracer un sillon bien droit. Impossible à faire si l'on regarde en arrière. D'ailleurs la langue latine avait un mot pour désigner ces paysans qui regardaient en arrière. Il voulait littéralement dire « hors du sillon » et a donné notre mot « délire ». Oui c'est un délire que de prétendre avancer droit dans notre vie chrétienne et regardant toujours par dessus notre épaule, montrant ainsi nos regrets, nos désirs cachés de ménager la chèvre et le chou. Mais Jésus nous le dit: s'engager derrière lui, c'est aussi être prêt à couper des ponts avec notre vie passée et à porter nos regards et nos coeurs sur le chemin qu'il nous invite à prendre.

Aujourd'hui, cette question de ce que mener une vie de disciple de Jésus-Christ veut dire se pose encore à nous. Dans l'église, on a souvent été partagé entre un légalisme oppressant et un relâchement destructeur.
« Je viendrais bien au culte, mais le dimanche matin est le seul moment où je peux faire la grasse matinée ». C'est vrai pour beaucoup, et d'ailleurs nous avons créé des cultes de maison hebdomadaires pour adapter la vie de l'église au nouvelles évolutions. Il n'en demeure pas moins vrai que quand j'entends cette parole dans la bouche de ceux qui le samedi soir, loin de se coucher à 21h, passent la nuit devant la télé, je me dis qu'il y a aussi un problème de priorités.
« J'enverrai bien une cotisation plus importante à la paroisse, mais les temps sont durs » me dit celui qui vient de me présenter sa voiture flambant neuf et le téléphone portable de sa fille de 10 ans, le quatrième de la famille. Là aussi, question de priorités.

Mais nous refusons tout autant d'imposer des règles, d'enfermer les croyants dans un carcan. Alors que faire? Je crois que Paul nous aide dans son texte de ce matin à comprendre que la vie de disciple de Christ doit toujours être saisie dans la dimension de la liberté.
« Frères et soeurs, c'est à la liberté que vous avez été appelés. Seulement, ne faites pas de cette liberté un prétexte pour suivre les désirs de votre nature propre. Au contraire, soyez par amour serviteurs les uns des autres. »
Galates 5.13. Dans un texte fameux, Luther a exprimé cette idée de façon suivante

« Un chrétien est un libre seigneur sur tout et n'est soumis à personne. Un chrétien est un esclave asservi en tout et est soumis à tous. ».

Cette liberté parfaite, complète, cette liberté qui nous permet d'aimer, c'est Jésus qui nous l'a donnée. Si nous croyons en lui, nous sommes libres. Libres de toute inquiétude sur notre relation avec Dieu. Nous n'avons pas à faire de bonnes oeuvres pour avoir la paix avec Dieu. Les bonnes oeuvres, Jésus les a faites à notre place, et de façon parfaite, contrairement à nous. Dieu n'a pas besoin de vous bonnes oeuvres, vous n'avez pas besoin de vos bonnes oeuvres, votre prochain, en revanche, pourrait les apprécier.

C'est toujours aussi dur pour Jésus que de trouver des disciples consacrés. Je suis le premier à m'enfoncer dans la médiocrité. Souvent, nous devons nous forcer à faire ce que nous savons être juste. Et quand nous le faisons, notre orgueil est tel que nous en tirons une vaine gloire. Pour une chose bien que nous faisons, il y en a vingt que nous négligeons. La vérité, mes amis,c'est que nous sommes remplis de bonne volonté et encore plus remplis de bonnes excuses...
Pourtant, Dieu nous appelle, encore et toujours, à nous centrer sur la vie qu'il nous a donné en Jésus. Cette vie, elle n'est pas radicalement séparée de notre vie normale. Elle concerne aussi notre famille, notre travail et les collègues, nos amis, les copains à l'école. C'est un engagement total, un boulot à plein temps: on n'est pas chrétien que le dimanche matin de 10h à midi et les soirs d'étude biblique.

Alors, fixons nos regards sur Jésus, qui est le modèle même d'un amour qui sert les autres. Jésus a toujours eu le contrôle sur sa vie. Ne pensez pas que ceux qui l'ont condamné à la Croix étaient vraiment en charge de ce qui se passait. C'est Jésus lui même qui s'est engagé volontairement sur ce chemin que nous le voyons prendre aujourd'hui. Il a pris sa croix, et, plus important encore, il l'a prise pour vous. Il l'a fait pour vos péchés, pour vos échecs, pour tout ce qui vous pèse. Il l' a fait pour votre incapacité chronique à prendre votre propre croix. Voilà pourquoi Jésus a "dressé sa face" pour aller à Jérusalem. Voilà pourquoi rien n'allait pouvoir se dresser sur son chemin. Jésus a refusé de se laisser arrêter par quoique ce soit sur le chemin qui vous a rendus libres.

Dans notre deuxième lecture de ce matin, nous avons entendu Paul dire:
« C'est pour la liberté que Christ nous a affranchis. Tenez donc ferme dans cette liberté et ne vous placez pas de nouveau sous la contrainte d'un esclavage ». La liberté que Jésus nous a apportée n'est pas la « liberté » dont on parle trop dans notre société: liberté d'être égoïste, de mener une misérable vie nombriliste, liberté de marcher sur les autres parce que « j'fais c'que j'veux ». C'est au contraire la liberté d'aimer, non pas pour gagner quelque chose, mais parce que nous suivons celui qui sera toujours avec nous sur le chemin, qui nous relèvera quand notre pied aura buté, qui nous gardera toujours prêt de lui pour nous montrer la voie: Jésus-Christ.
Christ vous a déjà libérés. Marchez dans sa lumière. Que ceux qui sont spirituellement morts enterrent leurs morts, mais vous, suivez Jésus et avancez dans son Royaume. Amen
.

mardi 22 juin 2010

LUC 9.18-24



18 Un jour, Jésus priait à l'écart et ses disciples étaient avec lui. Il leur posa cette question: «Qui suis-je, d'après les foules?»
19 Ils répondirent: «D'après les uns, Jean-Baptiste; d'après certains, Elie; d'après d'autres, un des prophètes d'autrefois qui est ressuscité.»
20 «Et d'après vous, qui suis-je?» leur demanda-t-il. Pierre répondit: «Le Messie de Dieu.»
21 Jésus leur recommanda sévèrement de ne le dire à personne.
22 Il ajouta qu'il fallait que le Fils de l'homme souffre beaucoup, qu'il soit rejeté par les anciens, par les chefs des prêtres et par les spécialistes de la loi, qu'il soit mis à mort et qu'il ressuscite le troisième jour.
23 Puis il dit à tous: «Si quelqu'un veut être mon disciple, qu'il renonce à lui-même, qu'il se charge [chaque jour] de sa croix et qu'il me suive,
24 car celui qui voudra sauver sa vie la perdra, mais celui qui la perdra à cause de moi la sauvera.




« Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup et qu’il soit mis à mort ».
Jésus s’adresse aux disciples.
Pour la première fois, il leur annonce explicitement sa mort prochaine.
Surtout, il présente la croix et la souffrance qui l’accompagne comme une nécessité : « Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup ».
En qualifiant ainsi sa mort, Jésus semble bien loin de la bonne nouvelle que nous attendons.
Pire encore, c’est comme s’il venait confirmer nos pires soupçons.
Le christianisme, au fond, serait une religion morbide, où un Dieu pervers exigerait la souffrance d’un innocent pour pardonner aux hommes.
Nous connaissons l’indignation d’un Nietzsche devant un pareil message, Nietzsche qui écrit : « Dieu a offert son fils en sacrifice pour la rémission des péchés. D’un seul coup, c’en était fini de l’Evangile… Le sacrifice, et sous sa forme la plus répugnante, la plus barbare : le sacrifice de l’innocent pour les péchés des coupables. Quel effroyable paganisme ! ».

Bien sûr, nous ne partageons pas forcément la colère de Nietzsche.
Mais, soyons honnêtes, nous sommes souvent « gênés aux entournures » par cette mort et surtout par la signification qu’on lui donne habituellement.
Si Dieu est vraiment amour, alors avait-il besoin de sang et, pire encore, du sang de son propre fils ?
Et si ce n’était pas pour apaiser la colère de Dieu, pourquoi la croix était-elle nécessaire ? Pour quoi, ou plutôt : pour qui ?
Enfin, si Dieu est vraiment amour, alors a-t-il besoin de notre souffrance pour être réconcilié avec nous ?
Parce que nous ne trouvons pas de réponses vraiment satisfaisantes, nous ne savons plus trop quoi faire de la croix, alors qu’elle est, sans jeu de mots, le point crucial de l’Evangile.
Seulement, n’y aurait-il pas maldonne ?


« Quelle bonne nouvelle pour aujourd’hui ? », nous demandons-nous.
« Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup et soit mis à mort », répond Jésus.
Et nous allons voir que, paradoxalement, il s’agit bien d’une bonne nouvelle.

Dans sa lettre aux Romains, Paul nous met sur la piste.
Il nous dit que Jésus doit mourir sur la croix, moins pour changer quelque chose en Dieu que pour changer quelque chose en nous.
Plus précisément, Jésus doit mourir sur la croix pour nous aider à changer de logique, à passer de la logique du sacrifice à la logique de la grâce.

Voici à quoi ressemble la logique du sacrifice :
Je suis soumis à cette logique lorsque je crois que l’essentiel se mérite et que tout a un coût, même l’amour de Dieu.
A l’origine, pourtant, le sacrifice n’était pas un marchandage, mais une recherche de communion.
En offrant le sacrifice d’une bête ou d’une partie de la récolte, le croyant invitait symboliquement Dieu à partager un repas avec lui.
Mais, peu à peu, le sacrifice a pris un tout autre sens.
« Je veux obtenir quelque chose de mon dieu : le pardon de mes fautes, le salut, la santé ou la prospérité. Pour l’obtenir, je paie, je paie en offrant un sacrifice : le sacrifice de mes richesses, mais aussi le sacrifice de mes envies, de mes désirs.
En échange, le dieu me donnera ce que je désire… du moins en principe ».

Cette logique sacrificielle a imprégné la foi chrétienne… y compris dans sa compréhension de la croix.
Pourtant, tout au long de sa vie, Jésus a essayé de montrer un autre chemin.
Il a proposé une vie plus ouverte, plus respectueuse des autres et de soi-même, une vie réconciliée avec Dieu.
Jésus a même proposé de remplacer le sacrifice par l’amour de Dieu et du prochain. Mais les hommes ont persisté dans leur logique ; ils l’ont même appliquée à Jésus. Parce qu’il dérangeait trop, il valait mieux qu’il meure.
Comme le dit Caïphe : « Votre avantage, c’est qu’un homme meure pour tout le peuple et que la nation ne périsse pas tout entière » (Jean 11/50).
Quant à sa mort, les chrétiens y ont souvent vu le règlement d’une dette envers Dieu.

Ne croyez surtout pas que c’est de l’histoire ancienne.
Aujourd’hui encore, beaucoup de croyants pensent qu’il est nécessaire de se sacrifier, de donner à Dieu son bonheur ou sa joie de vivre, non par amour mais pour lui arracher un verdict favorable.
« Tu souffres, Dieu te le rendra ».

Ne croyez pas non plus que notre société, prétendument moderne et laïque, ne soit pas concernée. Elle a éliminé les dieux, mais n’a pas changé de logique.
Il faut toujours offrir des sacrifices.

Ce peut-être le sacrifice de son temps.
Aujourd’hui, toute personne active doit courir sans cesse, passer du travail au club de gym, sans oublier d’aller chercher les enfants pour les conduire au judo.
Quant à ces derniers, ils doivent meubler tous leurs temps libres: « Vacances remplies, vacances réussies », martèle l’Education Nationale.
Même les retraités exhibent fièrement un agenda surchargé.
Le sacrifice est aussi de mise dans la vie professionnelle.
Les entreprises sont même des divinités exigeantes.
Elles demandent à l’employé de lui sacrifier, non seulement son temps, mais aussi son énergie et ses capacités. Tout doit lui être offert. Et si ce sacrifice n’est pas suffisant, alors c’est l’entreprise, elle-même, qui vous sacrifie.

Enfin, comme le 20° siècle l’a malheureusement démontré, le sacrifice peut être collectif. Dès que la situation d’un pays devient trop mauvaise, alors, nous le savons bien, ce sont les peuples voisins, les pauvres, les étrangers ou les marginaux ou les minoritaires qui sont sacrifiés.
Sacrifier ou se sacrifier : pour la paix sociale, pour la prospérité économique, pour se sentir aimé, pour être sauvé.
Par la croix, le Christ montre, en pleine lumière, les conséquences de la logique sacrificielle. Il nous oblige à constater qu’elle conduit à la mort et qu’il faut donc y renoncer.
Surtout, par sa vie et par sa mort, le Christ nous fait découvrir que cette logique ne sert à rien.
Depuis ce jour, en effet, depuis la croix, Dieu sait que nous sommes capables du pire. Il sait que, si le Christ venait aujourd’hui, il serait réduit au silence de la même façon.

Pourtant, il confirme son alliance et l’étend même à toute l’humanité.
Pourtant, il pardonne aux hommes.
Pourtant, il redouble dans son amour.
Pourtant, il ressuscite Jésus et nous ouvre les portes de la résurrection.
Tout cela, par grâce.
Vous le voyez, la croix barre un chemin pour en ouvrir un autre, un chemin de vie, un chemin de grâce.


Oui, il fallait que le « Fils de l’homme souffre beaucoup et soit mis à mort ».
Il le fallait, non pour Dieu, mais pour toi ; non pour changer les sentiments de Dieu à ton égard mais pour que tu changes de sentiments à l’égard de Dieu ; non pour t’enfermer dans une logique du sacrifice et de la dette, mais pour que justement tu en sois libéré.

Parce que le Christ est mort, tu peux changer de logique et vivre maintenant sous celle de la grâce.
Tu n’as plus besoin de te sacrifier dans l’espoir d’être aimé.
Tu n’as plus besoin de souffrir afin d’être pardonné.
Tu n’as plus besoin de te nier pour aimer les autres.
Tu n’as plus besoin de te perdre dans le travail pour te croire performant.

Tu es libre.
Libre de rendre un culte à ton Dieu parce que tu l’aimes.
Libre de servir ton prochain sans régler par là une dette.
Libre d’aimer tes enfants sans les rendre débiteurs.
Libre de travailler sans y perdre ta vie.
Libre de te donner gratuitement.

Oui, la croix contient une bonne nouvelle paradoxale : le Christ s’offre en sacrifice pour que tu n’aies plus besoin, ni de te sacrifier ni de sacrifier les autres.
« Il faut que le Fils de l’homme souffre », dit Jésus.
« C’est pour que vous soyez vraiment libres que le Christ vous a libérés », répond Paul, comme en écho.

vendredi 18 juin 2010

Au programme du dimanche 20 juin

Chers membres et amis de notre église,

Nous vous invitons à nous retrouver tous ensemble dimanche 20 juin pour un repas tiré des sacs à midi, dans la petite salle de La Couarde.

par ailleurs, la radio d4b diffusera le même jour dans le cadre de Chrétiens Aujourd'hui une émission tirée des archives de l'Heure Luthérienne. (de 9h à 10h, 90.4 à Melle et 101.4 à Niort, disponible aussi sur Internet).

à bientôt!

renseignements: 05.49.32.83.47.

dimanche 6 juin 2010

1 ROIS 17.8-24 (LUC 7.11-17)





8 Alors la parole de l'Eternel lui fut adressée: 9 «Lève-toi, va à Sarepta, qui appartient au territoire de Sidon, et installe-toi là. J'y ai ordonné à une femme veuve de te nourrir.»
10 Il se leva et partit à Sarepta. En arrivant à l'entrée de la ville, il y vit une femme veuve en train de ramasser du bois. Il l'appela et dit: «Je t'en prie, va me chercher un peu d'eau dans une cruche, afin que je boive.» 11 Et elle alla en chercher. Il l'appela de nouveau et dit: «Je t'en prie, apporte-moi un morceau de pain dans ta main.» 12 Et elle répondit: «L'Eternel, ton Dieu, est vivant! Je n'ai rien de cuit, je n'ai qu'une poignée de farine dans un pot et un peu d'huile dans une cruche. Je suis en train de ramasser deux morceaux de bois, puis je rentrerai et je préparerai cela pour mon fils et pour moi. Nous le mangerons, après quoi nous mourrons.» 13 Elie lui dit: «N'aie pas peur, rentre et fais comme tu l'as dit. Seulement, prépare-moi d'abord avec cela un petit gâteau et apporte-le-moi. Ensuite, tu en feras pour ton fils et pour toi. 14 En effet, voici ce que dit l'Eternel, le Dieu d'Israël: 'La farine qui est dans le pot ne manquera pas et l'huile qui est dans la cruche ne diminuera pas, jusqu'au jour où l'Eternel fera tomber de la pluie sur le pays.'»
15 Elle partit et se conforma à la parole d'Elie. Et pendant longtemps elle eut de quoi manger, ainsi que sa famille et Elie.
16 La farine qui était dans le pot ne manqua pas et l'huile qui était dans la cruche ne diminua pas, conformément à la parole que l'Eternel avait prononcée par l'intermédiaire d'Elie.
17 Après ces événements, le fils de cette maîtresse de maison tomba malade. Sa maladie fut si violente qu'il cessa de respirer. 18 La femme dit alors à Elie: «Que me veux-tu, homme de Dieu? Es-tu venu chez moi pour rappeler le souvenir de ma faute et pour faire mourir mon fils?»
19 Il lui répondit: «Donne-moi ton fils.» Et il le prit des bras de la femme, le monta dans la chambre à l'étage où il logeait et le coucha sur son lit.
20 Puis il fit appel à l'Eternel et dit: «Eternel, mon Dieu, est-ce que tu vas faire du mal, au point de faire mourir son fils, même à cette veuve qui m'a accueilli chez elle?»
21 Puis il s'étendit trois fois sur l'enfant, fit appel à l'Eternel et dit: «Eternel, mon Dieu, je t'en prie, que l'âme de cet enfant revienne en lui!»
22 L'Eternel écouta Elie: l'âme de l'enfant revint en lui et il retrouva la vie.
23 Elie prit l'enfant, le descendit de la chambre jusque dans la maison et le donna à sa mère en lui disant: «Vois, ton fils est vivant.» 24 La femme dit alors à Elie: «Je reconnais maintenant que tu es un homme de Dieu et que la parole de l'Eternel dans ta bouche est vraie.»



Chers frères et soeurs,

Pour comprendre ce qui se passe, il faut se rappeler les circonstances historiques. Nous sommes dans la première moitié du neuvième siècle avant Jésus-Christ. Le roi Akhab règne en Israël, le Royaume du Nord. Mais c’est un roi infidèle. Il a épousé une étrangère païenne et cruelle, Jézabel. Il introduit le paganisme dans le pays, il construit un temple pour les dieux païens. Il importe la religion de Baal. Dans la croyance du temps, Baal est le dieu de l’orage et de la pluie : on le représente tenant un éclair de foudre dans la main. On l’invoque pour obtenir la pluie et de bonnes récoltes.

Alors intervient le prophète Elie, le champion de la foi. Son nom signifie : “Le Seigneur est mon Dieu”. C’est tout un programme ! Au nom de ce Dieu unique et vivant, il annonce au roi une longue période de sécheresse : elle durera trois ans. On aura beau adorer Baal et le prier, il ne pleuvra pas. Ce sera la démonstration de l’impuissance de ce Baal, de ce faux dieu, la preuve qu’il n’existe pas et qu’on a tort de lui rendre un culte.

A la suite de cette parole, une situation de détresse s’installe. Il ne pleut pas, ce qui est dramatique pour un pays aussi sec que la Palestine, qui n’a pas de réserves d’eau. On ne peut plus cultiver, les produits agricoles deviennent rares. Un peu plus tard, le roi enverra son ministre parcourir les campagnes à la recherche de fourrage pour les bêtes. On en est là, à peu près dans les mêmes conditions que dans le Sahel dans les années 80.

Au milieu de cette misère, Dieu préserve le prophète Elie. Il l’abrite au bord d’un torrent, pour qu’il puisse boire. Des corbeaux, à moins que ce ne soit des Arabes, lui apportent de la nourriture. Petit détail, en effet, en hébreu le mot qui veut dire “corbeau” ressemble à une voyelle près au mot qui veut dire “Arabe”. Mais le torrent sèche, Elie est obligé de partir. Dieu lui dit de se réfugier à l’étranger, dans le territoire de Sidon, la ville qui s’appelle maintenant Saïda, sur la côte du Liban. Cette époque là à dû être difficile à vivre pour le prophète. Parce que Dieu l'envoie dans le pays même d'où vient Jézabel; chez les païens! Et puis Dieu lui dit qu'il a demandé à une veuve de le nourrir. Rendez vous compte: une veuve, une des personnes les plus faibles et vulnérables en temps normal et bine plus encore en temps de famine!
Pourtant, cette femme accueille Elie. De toute façon, d'un point de vue humain, elle n'a plus grand-chose à perdre: le soleil brûle toujours autant, les vivres sont épuisés: c'est la fin. C'est à ce moment qu'Elie apporte à cette femme cette phrase qui traverse l'Ecriture: « n'aie pas peur! ». N'aie pas peur, Dieu va pourvoir et nous n'allons pas mourir de faim, ni toi, ni ton fils, ni moi. Et la promesse est tenue.

Voilà qui serait déjà assez merveilleux à considérer, mais l'histoire continue, et de façon tragique. Le fils de la veuve, qui représente tout ce qu'elle a au monde, tombe malade et meurt. Horrible tragédie. Avoir survécu à la famine pour succomber à la maladie. Et pour la mère, passer ainsi de la joie du miracle au coup de massue de la cruauté de la mort qui frappe sans prévenir, être ainsi frappée alors même qu'elle venait de s'ouvrir à la possibilité de l'espérance. C'est comme si tout avait été trop beau pour être vrai.

La femme est furieuse envers Elie, elle l'accuse d'avoir apporté la mort et non pas la vie. On sent une vraie urgence dans la prière du prophète: "Dieu, tu ne peux pas laisser faire ça". Elie est l'homme d'une foi solide, d'une foi qui n'hésite pas à affronter les ennemis de Dieu, mais il apprend à ce moment-là à se mettre à genoux et à avouer sa faiblesse et se détresse devant son Seigneur. Elie, d'une certaine façon met Dieu au défi «cette étrangère m'a si bien traité, tu ne peux pas faire moins qu'elle » et en même temps on sent une prière remplie de confiance, contre toute évidence, une prière dont l'exemple peut nourrit la nôtre. L'enfant revient à la vie. De la disette Dieu a tiré l'abondance et de la mort il tire la vie. C'est la grande leçon de cette histoire. L'autre leçon, premièrement adressée à Elie, est que Dieu agit là où on ne l'attend pas d'une façon entièrement libre. Qui aurait pu croire que Dieu manifesterait sa gloire en donnant à manger à son prophète par le biais d'êtres considérés comme impurs (corbeaux et païens). Qui aurait pu croire que Dieu ferait naître la foi dans le coeur d'une femme païenne de Sarepta alors même qu'Israël, le peuple élu avait apostasié?
Elie ne s'attendait sans doute à cela. Dieu lui adit de partir, sans rien prendre, et c'était pour moi marquer que tout ce qui allait arriver allait être par sa puissance. Nous aussi, Chrétiens, en cette saison de Pentecôte, nous devons nous rappeler que la puissance sur laquelle nous pouvons compter est celle de l'Esprit Saint qui, à travers nous, témoigne de la grandeur et de l'amour de Dieu.

Il est clair que notre texte de l'Ancien Testament a un écho dans le récit de Luc que nous avons lu ce matin. Là encore, nous voyons une veuve partir enterrer son fils unique. Pour elle aussi, en plus de la perte de l'être cher, s'ouvre une période d'incertitude et de manque: elle n'a plus personne pour s'occuper d'elle. Son fils unique est mort et une lignée va s'éteindre: double mort. Luc place ici le premier récit d'une résurrection par Jésus. Surtout, cet épisode nous permet de mieux saisir le coeur de Christ.
On peut penser que Jésus apprend les détails de l'histoire de cette femme et de son fils par les participants au cortège funéraire. Luc nous dit que le Seigneur fut ému de compassion pour elle. On pourrait traduire littéralement le Seigneur fut pris aux tripes pour elle.
Croyez-vous, frères et soeurs, en un Dieu qui est pris aux tripes quand il vous voit confrontés à la peine et à l'épreuve? Ce Dieu, c'est celui dont Jésus nous montre le visage. Jésus compatit avec vous, Jésus souffre avec vous. Jésus s'identifie avec vous, mais il fait aussi plus que cela.
Quand Christ dit à la femme « ne pleure pas », ce n'est pas un parole légère « allons, faut pas pleurer comme ça ». Non, ce « ne pleure pas » est comme le « n'aie pas peur » d'Elie, un appel à l'espérance, un appel à l'attente de l'action de Dieu dans une vie, même dans la plus grande souffrance.

Nous n'avons pas un Dieu trop haut perché dans les étoiles pour se soucier de nous. Nous avons un Dieu qui veut toucher nos vies. J'emploie volontairement ce terme de « toucher »: c'est ce que Jésus fait.
Il touche le cercueil du jeune homme. Ce geste n'est pas nécessaire: Jésus n'a pas besoin, comme le reste des Evangiles nous le montre, de toucher qui que ce soit pour le guérir ou le ressusciter. Mais surtout ce geste est profondément scandaleux: d'une part, on peut imaginer que Jésus stoppe le convoi funèbre:c'est déjà choquant! Mais nous devons aussi réaliser qu'en touchant un cadavre, Jésus enfreint complètement les règles de pureté rituelle de la Loi: il devient impur, et il n'en a rien à faire.
Ce récit nous montre un Jésus qui est prêt à intervenir dans les circonstances les plus dramatiques, auprès des plus faibles, alors que tout espoir semble banni. Jésus a eu compassion de cette parfaite inconnue tout comme il nous a tout pris en pitié et qu'il est mort à notre place pour que nous soyons pardonnés. Il y a là une bonne nouvelle, une espérance qui concerne chacun de nous.
D'ailleurs, les témoins de la scènene s'y trompent pas: ils ne disent pas « un grand prophète a paru parmi nous et Dieu a visité son peuple ». Ce n'est pas « Dieu a visité cette femme » mais « nous ». Même si c'est de façon confuse et incomplète, ils comprennent que cette grâce de Dieu, cette faveur divine que Jésus apporte sont disponibles pour chacun d'entre eux. Ils reconnaissent instinctivement une compassion et un amour authentique venus de Dieu lui-même.

Ces deux histoires de ce matin, nous pouvons les laisser résonner dans nos vies.
Comme au temps d'Elie, nous vivons dans une période d'apostasie effrayante. Les gens n'adorent plus Baal, mais les faux dieux pullullent autour de nous: licence, argent, matérialisme. Nous devons, comme le prophète l'a fait accepter de ne pas suivre la masse informe et conformiste et marquer notre différence en tant qu'enfants de Dieu.
Mais, dans cette fidélité, nous devons aussi comme Elie être les messagers et les témoins de notre Dieu auprès de ceux qui ne le connaissent pas, même si nous sommes différents d'eux, même s'il ne nous sont pas a priori sympathiques. A tous nous devons pouvoir dire « n'aie pas peur, Dieu t'aime ».
Et puis nous pouvons aussi nous joindre à ces gens de Naïn et glorifier Dieu parce que Jésus son Fils est venu toucher nos vies. Nous pouvons nous réjouir de sa compassion, de sa grâce qui est offerte à chacun d'entre nous. Jésus nous aime. Il prend soin de nous. Il sait la cruauté du monde dans lequel nous vivons, la cruauté ou la dureté des situations auxquelles nous devons faire face. Il veut nous toucher, dès maintenant, nous donner l'espérance qui espère contre tout. Il veut nous donner une nouvelle vie, la vie éternelle