samedi 19 septembre 2009

Marc 9.30-37


Mar 9:30 Ils partirent de là, et traversèrent la Galilée. Jésus ne voulait pas qu'on le sût.
Mar 9:31 Car il enseignait ses disciples, et il leur dit: Le Fils de l'homme sera livré entre les mains des hommes; ils le feront mourir, et, trois jours après qu'il aura été mis à mort, il ressuscitera.
Mar 9:32 Mais les disciples ne comprenaient pas cette parole, et ils craignaient de l'interroger.
Mar 9:33 Ils arrivèrent à Capernaüm. Lorsqu'il fut dans la maison, Jésus leur demanda: De quoi discutiez-vous en chemin?
Mar 9:34 Mais ils gardèrent le silence, car en chemin ils avaient discuté entre eux pour savoir qui était le plus grand.
Mar 9:35 Alors il s'assit, appela les douze, et leur dit: Si quelqu'un veut être le premier, il sera le dernier de tous et le serviteur de tous.
Mar 9:36 Et il prit un petit enfant, le plaça au milieu d'eux, et l'ayant pris dans ses bras, il leur dit:
Mar 9:37 Quiconque reçoit en mon nom un de ces petits enfants me reçoit moi-même; et quiconque me reçoit, reçoit non pas moi, mais celui qui m'a envoyé.



Chers frères et sœurs,

La semaine dernière, nous avons entendu Jésus annoncer à ses disciples sa mort et sa résurrection "il commença alors à leur apprendre qu'il fallait que le Fils de l'homme souffre beaucoup, qu'il soit rejeté par les anciens, els grands prêtres et les scribes, qu'il soit tué et qu'il ressuscite le troisième jour" (Marc 8.31). Nous avons entendu la réaction de Pierre qui, nous dit Marc, se mit à rabrouer le Seigneur pour avoir parlé ainsi, ce qui amène Jésus à le remettre à sa place (8.32-33).
Dans l'Evangile d'aujourd'hui, nous voyons Jésus continuer à expliquer le sens de sa mission: "le Fils de l'homme sera livré entre les mains des hommes: ils le feront mourir, et, trois jours après, il ressuscitera". (9.31). Jésus fait bien d'insister, parce que les disciples se montrent incapables de comprendre ce dont Jésus parle.

En revanche, il y a un grand sujet qui les occupe alors qu'ils font route avec Jésus: qui est le plus grand d'entre eux? Qui est le meilleur? Qui est au top? Qui est le plus spirituel? Le plus consacré à Jésus?
Et cela amène forcément la question conjointe: qui est le plus mauvais? Qui est franchement pathétique? Qui n'arrive pas à faire venir les gens dans son église pour qu'elle grandisse? Qui est incapable de remettre sa vie en ordre? Qui n'arrive pas à payer les factures?
Qui est le meilleur? Qui est le pire? Bienvenue dans le grand jeu des comparaisons et des classements.

Notre société capitaliste et marchande a réussi à imposer un véritable culte de la performance: dans les entreprises, malheur à celui qui n'arrive pas à rester au top niveau! Et cette mentalité détestable va jusqu'à imprégner notre foi: combien de temps ai-je prié (surtout, ai-je prié plus que ma sœur qui est assise à côté de moi? Combien de pages de la Bible lues cette semaine? Combien de membres ajoutés ou perdus dans la paroisse? (je ne plaisante pas: certaines églises ont même adopté des méthodes directement issues du marketing pour leur croissance numérique et la gestion de leur groupes).

Les apôtres ont commencé à entrer dans le petit jeu du classement. Le Top 12 des apôtres, du premier au dernier, avec toute la gamme entre! Qu'est-ce qui peut les pousser à agir ainsi? C'est peut-être, je crois, le fait que récemment, Pierre, qui faisait quand même un peu office de n°1 s'est fait rabrouer par le patron. Peut-être que ça a pu réveiller certains appétits, comme cela se fait dans certains partis lorsqu'un présidentiable possible chute dans les sondages et que ses petits camarades s'empressent de se mettre en avant. Surtout, je crois que le désir de se classer, ou d'être classé appartient à la nature humaine. Il y a ceux qui sont persuadés qu'ils méritent la première place et qui feront tout pour l'avoir. Il y a ceux qui sont conscients de leurs limites mais qui se consoleront largement en se disant qu'il y en a beaucoup qui sont en dessous d'eux. Car ne vous y trompez pas, frères et sœurs, quand les apôtres se demandent "qui est le plus grand?" ils disent "qui est le chef?". Ca sent la testostérone de grand mâle dominant plus que l'huile sainte cette histoire!

Jésus va ramener ces amis sur terre. Gentiment, mais fermement, parce qu'il sait qu'il est indispensable qu'ils comprennent quelque chose de fondamental. Le Seigneur ne leur fait pas de reproche sur l'indécence de leur attitude alors qu'il leur annonce sa mort. Non, il veut les faire grandir, leur faire passer un cap avec lui.
Si quelqu'un veut être le premier, qu'il soit le dernier de tous et le serviteur de tous.
Face à toutes les ambitions, face à tous les désirs de domination, Jésus trace une voie nouvelle: celle de l'humble service. Notre société nous demande constamment "est-ce que tu es un leader?". Jésus nous demande 'est-ce que tu es un serviteur?". Serviteur de Dieu, bien sûr, mais aussi, par là même, serviteur des autres, de tous les autres.
En fait, Jésus invite les disciples et nous-mêmes à le prendre comme exemple. Quelques années après, Paul écrira:
Phi 2:5 Ayez en vous les sentiments qui étaient en Jésus Christ,
Phi 2:6 lequel, existant en forme de Dieu, n'a point regardé comme une proie à arracher d'être égal avec Dieu,
Phi 2:7 mais s'est dépouillé lui-même, en prenant une forme de serviteur, en devenant semblable aux hommes; et ayant paru comme un simple homme,
Phi 2:8 il s'est humilié lui-même, se rendant obéissant jusqu'à la mort, même jusqu'à la mort de la croix.

Puis, pour enfoncer le clou,

Mar 9:36 Jésus prit un petit enfant, le plaça au milieu d'eux, et l'ayant pris dans ses bras, il leur dit:
Mar 9:37 Quiconque reçoit en mon nom un de ces petits enfants me reçoit moi-même; et quiconque me reçoit, reçoit non pas moi, mais celui qui m'a envoyé.


Cela peut sembler choquant, mais dans la culture du temps, les enfants n'avaient que peu d'importance aux yeux des gens. C'est seulement quand ils arrivaient à l'entrée de l'âge adulte qu'on commençait à s'intéresser à eux. Cette attitude a continué longtemps, et sous d'autres cultures. Par exemple, Thomas d'Aquin, grand théologien médiéval expliquait qu'en cas d'incendie dans une maison, un homme devait d'abord sauver son père, puis sa grand-mère, puis son épouse et ensuite seulement ses enfants. Survie des plus forts, des plus capables…
Alors qu'en Jésus place ce petit enfant au milieu du groupe, quand il tient ses propos, il insulte la culture de ses amis, il insulte leurs valeurs, il remet en cause radicalement la façon dont ils voient le monde, dont ils conçoivent le pouvoir.
Matthieu, quand il raconte notre histoire, précise que Jésus a dit "si vous ne devenez comme les petits enfants, vous n'entrerez pas dans le royaume des cieux" (Mt 18.2).
On a donc ici un double aspect: d'un côté, en Marc, Jésus dit "celui qui reçoit un de ses petits me reçoit parce que je suis comme eux" et de l'autre, en Matthieu, le Seigneur nous invite à devenir comme ces petits enfants.
Dans les deux cas, les petits enfants sont l'image même de l'humilité, de l'ouverture, de l'absence de motifs cachés. Un petit enfant ne calcule pas quand il vous embrasse, il le fait spontanément, par affection, sans espérer rien en retour et sans rien pouvoir vous donner d'autre.

En fait, la clé de ce passage se trouve sans doute dans le contexte: alors que Jésus retourne vers Jérusalem, il annonce pour la deuxième fois sa mise à mort. On peut donc dire que l'ombre de la Croix domine déjà la leçon de Jésus, cette croix où le Fils de Dieu va mourir, va accepter l'humiliation d'être pendu au bois, puni pour nos péchés, abandonné du Père, où il va être au plus au point le serviteur souffrant dont parle le prophète Esaïe, avant de connaître la gloire de la résurrection.

C'est donc dans la même ombre de la croix que nous devons considérer la façon dont nous servons le Seigneur. Croyons-nous qu'il nous doit quelque chose, alors que notre salut vient tout entier de lui? Notre service dans la paroisse est-il mû par l'amour ou cache t'il un souci de prendre le contrôle des choses pour imposer notre point de vue? Savons-nous ne pas nous comparer à nos frères et sœurs?
Sommes-nous véritablement, comme nous le demande Jésus, "serviteur de tous?" et surtout, comment l'être?

Il nous faut en fait accepter premièrement une position de fragilité, de vulnérabilité, car elle caractérise à la fois le service et la condition du petit enfant. Cela est inconfortable bien sûr, cela peut faire peur, mais soyons assurés que le Seigneur est avec ceux qui désirent faire sa volonté. Mais nous devons avant tout laisser Jésus questionner nos modes de vie, nos valeurs, les remettre en cause au nom de l'Evangile.

Etre serviteur de tous, cela veut dire aussi sortir d'une vision trop individualiste de la foi. L'Eglise n'est pas un restaurant où l'on pourrait rentrer, s'asseoir seul à une table alors que d'autres mangent à côté, commander, déguster puis s'en aller. Ceux que nous sommes appelés à servir, ce sont d'abord les frères et les sœurs de l'église locale.
Mais pas seulement. Il y a aussi tous ceux du dehors, que nous servons dans notre vie quotidienne, dans nos engagements associatifs, dans nos amitiés…

Et c'est en pensant à eux que nous devons nous demander: ne sommes-nous pas parfois comme ses disciples qui, alors que Jésus venait de leur annoncer sa mort pour les péchés du monde étaient entrés dans un débat on ne peut plus déplacé et inutile? Quand Jésus leur demande "de quoi parliez-vous en chemin?" ils n'osent pas répondre, sans doute trop embarrassés pour avouer la vérité?
Et nous, de quoi parlons-nous en tant que communauté le long de notre chemin de foi? Ne serions-nous pas nous aussi parfois un peu embarrassés en nous rendant compte que bien des questions triviales et matérielles ont pris le pas sur le message de Jésus-Christ? Ne prenons-nous pas parfois le risque de devenir un club, une assemblée de copropriétaires centrée sur elle-même plutôt que sur sa mission d'évangélisation?
Si c'est le cas; faisons demi-tour
Si ça n'est pas le cas, rendons grâces à Dieu et faisons attention à ce que cela dure longtemps, en nous demandant ce qui pourrait nous faire dévier.

Nous devons nous souvenir du message que Paul a reçu "ma force s'accomplit dans ta faiblesse". Il vaut aussi pour nous et pour notre communauté. Celle-ci n'est pas appelée à faire des pas de géants, mais des pas d'enfants. Les enfants ont besoin d'amour. Eux seuls, et ceux qui leur ressemblent acceptent de tout apprendre de celui qui s'est fait serviteur de tous.

samedi 12 septembre 2009

Marc 8.27-35

MARC 8.27-35

27 ¶ Jésus sortit avec ses disciples vers les villages de Césarée de Philippe. En chemin, il se mit à demander à ses disciples : Au dire des gens, qui suis–je ?
28 Ils lui dirent : Pour les uns, Jean le Baptiseur ; pour d’autres, Elie ; pour d’autres encore, l’un des prophètes.
29 Lui leur demandait : Et pour vous, qui suis–je ? Pierre lui dit : Toi, tu es le Christ.
30 Il les rabroua, pour qu’ils ne disent rien à personne à son sujet.
31 Il commença alors à leur apprendre qu’il fallait que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu’il soit tué et qu’il se relève trois jours après.
32 Il disait cela ouvertement. Alors Pierre le prit à part et se mit à le rabrouer.
33 Mais lui se retourna, regarda ses disciples et rabroua Pierre : Va–t’en derrière moi, Satan ! lui dit–il. Tu ne penses pas comme Dieu, mais comme les humains.
34 Puis il appela la foule avec ses disciples et leur dit : Si quelqu’un veut me suivre, qu’il se renie lui–même, qu’il se charge de sa croix et qu’il me suive.
35 Car quiconque voudra sauver sa vie la perdra, mais quiconque perdra sa vie à cause de moi et de la bonne nouvelle la sauvera.




Chers frères et sœurs,

Nos vies sont remplies de questions.
Il y a les questions triviales et courantes: "chérie, quand est-ce qu'on mange?", "il est où, le téléphone?"
Il y a les questions sans réponse: "qu'y a-t-il dans le sac des femmes?", "pourquoi Raymond Domenech est-il encore sélectionneur de l'équipe de France de football?"
Et puis il y a les questions terriblement importantes: "docteur, que disent les analyses?"; "comment on va l'appeler ce bébé?" ou "est-ce que tu veux m'épouser?"

Dans l'évangile d'aujourd'hui, Jésus pose deux questions qui ont des conséquences éternelles. La première a trait à l'opinion des autres concernant Jésus. Leur réponse montre l'état de leur cœur.
La seconde question concerne ce que vous croyez à propose de Jésus. Votre réponse déterminera votre destinée éternelle. Voilà pourquoi il est vital que vous pesiez bien votre réponse.

Ecoutons cette discussion entre Jésus et ses disciples. Et considérons les deux questions a Jésus a posées à ses disciples ce jour-là, parce qu'elles continuent d'être d'une importance capitale pour aujourd'hui.

Saint Marc nous dit que Jésus et ses amis se trouvent "dans les villages voisins de Césarée de Philippe". Cette région était majoritairement peuplée de non-juifs et était un centre très important de cultes païens:
-Césarée de Philippe s'était d'abord appelée "Balinas" parce qu'elle avait été un lieu du culte de Baal, le dieu phénicien de la fertilité. Puis la ville s'était appelée "Panias", parce que les Grecs pensaient que leur dieu mi-homme mi-bouc, Pan, était né dans les collines du voisinage. Enfin, le roi Hérode avait fait construire dans la ville un magnifique temple dédié à César, l'empereur romain, qui était considéré comme un dieu. Chaque année, les habitants de la ville devaient entrer dans le temple, y brûler une pincée d'encens et affirmer "César est dieu!".

C'est dans ce contexte marqué par l'idolâtrie la plus grossière que Jésus choisit pour révéler de façon plus complète son identité. Il va le faire en posant des questions.

La première question, c'est "qui suis-je d'après les hommes?". Bien sûr, Jésus savait tout à fait ce que les gens croyaient à son sujet. Il n'était pas comme un homme politique qui lance un sondage pour mesurer sa popularité. Ce qu'il cherchait à faire, c'est à amener les disciples à réfléchir à leur propre opinion le concernant.
Les disciples répondent "Jean-Baptiste; d'après certains, Elie; d'après d'autres, l'un des prophètes".


Etudions ces réponses:
Jean-Baptiste? Un peu difficile à comprendre, mais il est vrai qu'il y avait de nombreux parallèles entre le message de Jésus et celui de son cousin. Même le roi Hérode Antipas croyait que Jésus n'était autre que Jean ressuscité (Mc 6.14): la confusion est peut-être venue de là.
Elie? Un peu plus logique, car le ministère du prophète et celui de Jésus étaient marqués par une predication puissante et de nombreux miracles.
Un des prophètes? C'est vrai que Jésus avait certains points communs avec les messagers de Dieu de l'Ancienne Alliance; comme Esaïe, Jésus préchait la sainteté; comme Daniel, il annonçait le Royaume de Dieu; comme Osée, il aimait ceux que tous rejetaient…
Et encore, vous remarquerez que les disciples oublient pudiquement de dire que nombreux étaient ceux qui avaient une opinion beaucoup moins favorable à propose de Jésus!
Les Pharisiens disaient "il a un démon, il est fou, pourquoi l'écoutez-vous?" (Jn 10.20)
Les Scribes disaient: "il a en lui Béelzebul, c'est par le prince des démons qu'il chasse les démons" (Mc 3.22)
Sa propre famille disait: "il a perdu la raison" (Mc 3.21)
Le Sanhedrin disait "il blasphème" (Mt 26.65-68).
Mais il y avait les autres, tous les autres, tous ceux qui, dans les pages des Evangiles confessent leur foi en Jésus; Jean-Baptiste, Siméon, Bartimée, le centurion romain…

Et aujourd'hui frères et sœurs, qu'en est-il dans notre société qui est retombé dans un paganisme proche de celui de la région où Jésus se trouvait, même si les idoles ne sont plus les mêmes?
Aujourd'hui encore, il y a multitude d'opinions à propos de Jésus:
Les Musulmans croient qu'il était un prophète, mais refusent de croire qu'il était Dieu et qu'il est mort sur la Croix pour le pardon de nos fautes.
Beaucoup de Juifs pensent qu'il était un enseignant religieux remarquable, mais pas qu'il était Dieu.
Les Mormons pensent que Jésus est le premier enfant que Dieu a eu par une union charnelle avec sa propre fille, Marie.
Beaucoup d'athées continuent à penser, contre toute évidence historique, que Jésus n'a jamais existé.
Et puis il y a un certain "christianisme", d'origine moderniste et libérale, qui ne veut voir en Jésus qu'un magnifique exemple d'amour, le plus haut point qu'un homme puisse atteindre, un gentil Jésus bien sympa qui aime tout le monde.
Il est tentant d'adopter cette ligne de pensée. Elle paraît tellement raisonnable, tellement acceptable. Plus besoin de s'encombrer de la naissance virginale de Christ, de sa divinité, de son sacrifice pour le pardon de nos fautes…C'est d'ailleurs ce qui arrive depuis plusieurs décennies dans trop d'églises.


Pourtant, cette ligne n'est pas tenable. Je voudrais ici faire une citation l'auteur britannique CS Lewis qui dit bien pourquoi:
"Je voudrais empêcher quiconque de prononcer cette phrase vraiment insensée qu'on avance souvent au sujet de Jésus: 'je suis prêt à voir en Jésus un éminent maître de morale, mais je récuse sa prétention d'être Dieu'. C'est la chose à ne pas dire. Un homme qui ne serait qu'un homme et qui tiendrait les propos que tiendrait Jésus ne serait pas un grand maître de morale. Ce serait soit un fou –comparable à l'individu qui affirme qu'il est un œuf poché- soit le Démon des enfers. Il vous faut choisir: ou bien cet homme était et reste le Fils de Dieu, ou bien il ne fut rien d'autre qu'un aliéné ou pire encore. Vous pouvez l'enfermer comme fou, lui cracher au visage et le tuer comme un démon; ou, au contraire, vous jeter à ses pieds et l'appeler 'mon Seigneur et mon Dieu'. Mais ne vous laissez pas entraîner à favoriser ce non-sens condescendant, à savoir qu'il était un grand maître issu de l'humanité. Il ne nous a pas laissé cette possibilité. Il n'a pas eu cette intention."

Voilà pourquoi Jésus se tourne vers ses disciples, et vers nous par la même occasion, pour leur et nous poser une question qui cette fois est personnelle: "et pour vous, qui suis-je?". Jésus ne s'intéresse pas tant à l'opinion générale, majoritaire: il veut savoir ce que nous pensons de lui.
"pour vous, qui suis-je?". Une simple question, mais avec des conséquences éternelles: la vie éternelle ou la perdition.
Comme souvent, c'est Pierre qui exprime l'opinion du petit groupe: "Tu es le Christ". Tu es le Messie! Voilà la seule et vraie bonne réponse.
Matthieu (16.16) précise que Pierre a rajouté "le Fils du Dieu vivant".
Pierre et les autres avaient donc reconnu dans les traits de l'humble charpentier de Nazareth le Messie que Dieu avait promis pour sauver le monde.

Bien sûr, les disciples n'étaient pas arrivés jusque-là par eux-mêmes. Toujours dans Matthieu, Jésus dit "tu es heureux, Simon fils de Jonas, car ce n'est pas une pensée humaine qui t'a révélé cela, mais c'est mon Père céleste".
Oui, pour reconnaître que Jésus est bien le Sauveur envoyé par le Père, l'Esprit Saint doit ouvrir nos cœurs, nous convaincre de notre situation de pécheurs et nous amener à la croix.
Alors nous pouvons reconnaître comme Luther dans son Petit Catéchisme:
Je crois que Jésus-Christ, vrai Dieu, né du Père de toute éternité, vrai homme, né de la vierge Marie, est mon Seigneur. Il m'a racheté, moi perdu et condamné, en me délivrant du péché, de la mort et de la puissance du diable; non point à prix d'or ou d'argent, mais par son saint et précieux sang, par ses souffrances et sa mort innocentes, afin que je lui appartienne et que je vive dans son Royaume, pour le servir éternellement dans la justice, dans l'innocence et la félicité, comme lui-même, étant ressuscité des morts, vit et règne éternellement. C'est ce que je crois fermement.

Frères et soeurs, chacun de nous doit répondre à la question "qui est Jésus pour toi?". Heureux sommes-nous si nous pouvons dire "il est le Fils de Dieu, vrai Dieu et vrai homme qui est mort et ressuscité pour le pardon de mes fautes, sans aucun mérite de ma part".
Alors, nous rejoignons cette grande nuée de témoins qui ont cru dans le vrai Christ. Le Christ qui a été annoncé par les Prophètes et duquel le Nouveau Testament rend témoignage. Le Christ qui a été confessé par les Pères à Nicée. Le Christ des bâtisseurs de cathédrales et des chevaliers. Le Christ des Réformateurs et des hommes du Réveil.

Frères et sœurs, c'est un triste état de fait, mais on doit dire de Jésus ce qu'on dit de certains produits commerciaux "méfiez-vous des imitations": elles sont dangereuses, comme le sont bien des contrefaçons.
Alors allons boire à la source pure de la Parole, nourrissons-nous des sacrements, restons fidèles à nos assemblées où la Loi et l'Evangile sont fidèlement enseignés.
Nous y rencontrerons celui qui nous a promis d'être avec nous tous les jours, jusqu'à la fin du monde.

samedi 5 septembre 2009

Marc 7.31-37






31 ¶ Jésus sortit du territoire de Tyr et revint par Sidon vers la mer de Galilée, en traversant le territoire de la Décapole.
32 On lui amène un sourd qui a de la difficulté à parler, et on le supplie de poser la main sur lui.
33 Il l’emmena à l’écart de la foule, lui mit les doigts dans les oreilles, cracha et lui toucha la langue avec sa salive ;
34 puis il leva les yeux au ciel, soupira et dit : Ephphatha –– Ouvre–toi !
35 Aussitôt ses oreilles s’ouvrirent, sa langue se délia ; il parlait correctement.
36 Jésus leur recommanda de n’en rien dire à personne, mais plus il le leur recommandait, plus ils proclamaient la nouvelle.
37 En proie à l’ébahissement le plus total, ils disaient : Il fait tout à merveille ! Il fait même entendre les sourds et parler les muets.




Chers frères et sœurs,

Etes-vous content quand vous recevez un cadeau? Je pense que oui. Même si parfois le présent n'est pas nécessairement à notre goût, nous pouvons être heureux que quelqu'un ait pensé à nous.
Alors, considérons le don que le Père nous a fait en Jésus-Christ. Jésus s'est fait homme pour que nous puissions recevoir le pardon de nos fautes et la vie éternelle.
Durant sa vie sur terre, Jésus a aussi fait beaucoup d'autres dons à des hommes et à des femmes.

Notre évangile d'aujourd'hui nous montre Jésus faire le don de l'ouïe et de la parole à un sourd-muet. Bien sûr, c'est loin d'être le seul récit de guérison miraculeuse dans le ministère de Christ. Ce qu'il y a de particulier dans cette histoire, c'est la façon dont Jésus guérit cet homme.

Saint Marc nous dit:

33 Il l’emmena à l’écart de la foule, lui mit les doigts dans les oreilles, cracha et lui toucha la langue avec sa salive ;
34 puis il leva les yeux au ciel, soupira et dit : Ephphatha –– Ouvre–toi !
35 Aussitôt ses oreilles s’ouvrirent, sa langue se délia ; il parlait correctement.

Voilà sans doute une manifestation merveilleuse du pouvoir du Fils de Dieu. Ceux qui avaient amené l'homme à Jésus lui avaient demandé de " poser la main sur lui". Sans doute Jésus pratiquait-il dans beaucoup de ses guérisons l'imposition des mains, vieux geste hébraïque de bénédiction que ses contemporains pouvaient facilement identifier. Mais Jésus fait beaucoup plus que ça.

Il place ses doigts dans les oreilles de l'homme.
Il met de sa salive sur sa langue.
Il prononce une parole.

C'est beaucoup plus que le geste très simple de placer une main ou les deux sur le front de quelqu'un. Jésus, pourrait-on dire, établit un contact physique avec le sourd-muet. Il entre dans l'espace de ce dernier.

De façon générale, nous tenons à préserver notre intimité. C'est pour cela que les contacts physiques (bises, tapes sur l'épaule) sont plutôt réservés à des gens que nous connaissons bien.
C'est OK si quelqu'un de notre famille nous embrasse sur la joue. Mais si c'est un parfait étranger qui le fait, notamment dans un cadre assez formel, nous pouvons nous dire qu'il a franchi une ligne jaune.
Imaginez qu'au moment de vous administrer le sacrement de la sainte-cène, je place mon doigt dans votre bouche en disant "ouvre-toi". Je pense que j'en entendrai parler à la prochaine réunion de conseil presbytéral…

Voilà pourquoi peut-être nous ne savons pas trop quoi faire de tout l'aspect physique du ministère de Jésus. Pourtant, il avait un corps, comme vous et moi, et il l'a utilisé.

Il existe une certaine spiritualité protestante qui rechigne aux symboles. On a parfois l'impression que, pour cette tendance, nous ne serions que de purs esprits. C'est un peu moins vrai dans la tradition luthérienne, où l'on est moins complexé par rapport à tout ce qui peut toucher nos sens. Les bougies sur l'autel, nous rappellent que Jésus est la lumière du monde. La robe pastorale que je porte, vêtement qu'on ne trouve nulle part ailleurs, vous dit que vous n'êtes pas en train de commander un hamburger chez McDo mais que nous sommes réunis pour quelque chose de particulier, de sacré. Les couleurs liturgiques, que je souhaiterais voir notre paroisse retrouver, placent dans notre esprit, par les yeux, l'atmosphère de telle ou telle période de l'année: violet du sombre carême, rouge flamboyant des fêtes de l'Eglise. La musique, par notre ouïe, peut créer les émotions qui répondent aux aspirations de nos âmes, etc… Ainsi, nous essayons d'avoir une forme de culte qui s'adresse à notre être tout entier: âme, corps et esprit.


Les gens qui ont amené le sourd-muet à Jésus lui demandaient une sorte de service général "si tu avais le temps de lui imposer les mains et de le guérir; on ne va pas trop te monopoliser". Mais Jésus, lui, veut prendre son temps avec cet homme.
Il l'emmène avec lui à l'écart des autres et lui applique l'étrange petit rituel dont je viens de vous parler.
Pourquoi? Est-ce que cas très dur à traiter qui requerrait des incantations un peu magiques? Non, le Fils de Dieu est tout-puissant et il n'a pas besoin de ça, pas plus d'ailleurs qu'il n'a besoin d'imposer les mains pour guérir. Alors pourquoi?

Encore une fois, c'est que Jésus veut entrer dans la vie de cet homme. Ce dernier ne sait pas qui est Jésus. Contrairement à beaucoup d'autres, il n'en a jamais entendu parler: et pour cause!!!
Ce que fait Jésus, par ses actes symboliques, c'est faire comprendre à l'homme ce qu'il va faire, un peu comme ses médecins qui, lorsqu'ils traitent de jeunes enfants, leur expliquent pas a pas ce qu'ils font pour les rassurer.
Frères et sœurs, je suis persuadé qu'il y a aujourd'hui des centaines de millions de vrais Chrétiens dans le monde. Et pourtant, Jésus nous connaît chacun par notre prénom, il sait ce dont nos vies sont faites, il nous a amenés à lui de façon différente et il entend chacune de nos prières individuellement. Avec le Seigneur, chacun de nous a droit à un traitement personnalisé. Jésus veut entrer au cœur de nos existences, de chacune d'entre elles, pour faire de chacun d'entre nous une pierre vivante qui prendra place dans l'édifice de Son Eglise.

Et pour cela, le Seigneur n'hésite pas à nous toucher (mais oui) physiquement.
Il nous donne l'eau du baptême. Par elle, Jésus nous dit "souviens-toi que je t'ai purifié de tes fautes".
Il nous donne le pain et vin consacrés de la Cène. Par eux, Jésus nous dit "je sais que ton chemin est souvent ardu. Je sais que tu dois refaire tes forces régulièrement. Alors je te donne mon corps à manger et mon sang pour te désaltérer, afin que ton âme soit restaurée".
L'eau, le pain, le vin sont les sceaux physiques des grâces spirituelles que Jésus déverse sur nous tous.

Ces dons, nous n'avons qu'à les recevoir, tout comme l'homme a reçu l'ouïe et la parole sans rien faire. La parole du prophète Esaïe (29.18-19) est alors accomplie en nous:

18 En ce jour–là, les sourds entendront les paroles du livre ; de l’obscurité et des ténèbres, les yeux des aveugles verront.
19 Les affligés auront dans le SEIGNEUR une joie débordante, et les plus pauvres des humains feront du Saint d’Israël leur allégresse.

La Parole s'est faîte chair pour nous libérer du péché et de la mort. La lumière dissipe les ténèbres. Et nous qui étions sourds et aveugles spirituellement, nous pouvons enfin, par la grâce de Dieu, entendre les paroles qui mènent à la vie et contempler le visage de Christ, notre Sauveur.



Le psaume 34 décrit la joie que nous apporte le don de la délivrance que Dieu nous fait:
Je bénirai le SEIGNEUR en tout temps ; sa louange sera constamment dans ma bouche.
(34:3) Je mets ma fierté dans le SEIGNEUR ; les pauvres entendent, ils se réjouissent !
(34:4) Magnifiez le SEIGNEUR avec moi, exaltons ensemble son nom !

Alors, oui, frères et sœurs, rachetés du Seigneur, célébrons le Dieu qui nous aimés le premier et a donné son Fils pour que nous soyons pardonnés, que nous puissions enfin entendre les paroles du Bon Berger qui va continuer à nous guider tous les jours de notre vie, jusqu'à notre entrée dans l'éternité.