dimanche 20 mars 2011

Carême 2011: méditations sur le Petit Catéchisme (2)




Chers frères et soeurs,
chers amis,

Nous continuons aujourd'hui nos méditations de Carême sur le Petit Catéchisme. Nous en sommes à la deuxième partie, qui explique le Symbole des apôtres, cette vieille confession de foi que nous disons presque chaque dimanche:
Je crois en Dieu le Père tout puissant, créateur du ciel et de la terre
Je crois en Jésus-Christ, son Fils unique notre Seigneur...
Symbole des apôtres ou encore le Credo. Une vieille légende affirmait que chacun des 12 apôtres avait composé un partie de ce texte. C'est une légende bien sûr, dénuée de tout fondement historique. Le Credo a sans doute été composé progressivement, à partir du 2ème siècle après Jésus-Christ et, dans sa forme à peu près finale, il semble avoir été utilisé comme confession baptismale en Gaule au Vème siècle.

Ce n'est ni le lieu ni l'endroit pour approfondir ces questions. L'important pour moi se trouve ailleurs. Le Symbole est apostolique, non pas parce qu'il a été composé par les Apôtres, mais parce qu'il présente fidèlement leur enseignement. Dans le Nouveau Testament déjà, on trouve déjà des confessions de foi primitives (Matthieu 28.19: baptisez-les au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit; Romains 10.9: 9 Si tu reconnais publiquement de ta bouche que Jésus est le Seigneur et si tu crois dans ton coeur que Dieu l'a ressuscité, tu seras sauvé et surtout 1 Corinthiens 15.3-4: 3 Je vous ai transmis avant tout le message que j'avais moi aussi reçu: Christ est mort pour nos péchés, conformément aux Ecritures;4 il a été enseveli et il est ressuscité le troisième jour, conformément aux Ecritures.)
Nous ne disons pas le Symbole des Apôtres parce qu'il est ancien, mais parce qu'il est biblique, parce qu'il exprime et résume l'enseignement de la Parole de Dieu sur des points essentiels.
Ceci dit, l'ancienneté du Credo doit aussi nous interpeller. Cela fait quand même 15 siècles que (surtout en Occident) l'Eglise utilise le Credo pour dire sa foi et qu'elle le considère comme la norme de son enseignement. Pourquoi est-ce qu'un pasteur luthérien confessionnel fait étudier le Credo aux futurs confirmants? Tout simplement parce qu'il faut qu'ils connaissent bien les fondements de la foi chrétienne et que ce faisant, il puissent aussi faire la différence entre l'erreur et la vérité.
En 2 Timothée, Paul exhorte déjà son disciple Timothée à « garder le beau dépôt qui lui a été confié » car « un temps viendra où les hommes ne supporteront pas la saine doctrine. Au contraire, ayant la démangeaison d'entendre des choses agréables, ils se donneront une foule d'enseignants conformes à leurs propres désirs.4 Ils détourneront l'oreille de la vérité et se tourneront vers les fables ».

Alors faisons attention, frères et soeurs, car il existe des dérives inquiétantes au sein du christianisme actuel. Je vous le dis franchement: j'ai un gros problème avec ceux qui, s'affirmant chrétiens, refusent de souscrire aux affirmations du Credo. C'est le signe clair que quelque chose ne va pas, qu'il y a déjà une dérive. Voilà pourquoi aussi, j'ai toujours été énervé par ces confessions de foi modernes par lesquelles on a voulu remplacer le Credo dans certains milieux où l'on se veut très éclairé. Je n'aime pas quand un pasteur dit « confessons la foi de l'Eglise universelle » et nous sort sa propre petite confession perso, comme s'est devenu la mode. Je veux bien rédiger un texte où je vais dire en quoi je crois avec mes propres mots. Mais je n'aurai pas l'arrogance de la faire endosser par l'Eglise toute entière. Elle a déjà un guide sûr et simple avec le Credo, un guide qui a survécu aux modes et au temps: elle peut bien le garder.

C'est justement de l'Eglise dont je veux vous parler ce matin dans notre méditation.

« Je crois au Saint-Esprit, la sainte Église universelle, la communion des saints, la rémission des péchés, la résurrection de la chair et la vie éternelle »

De façon, générale, les catholiques qui nous font la joie de venir partager un culte avec nous sont surpris de trouver ces paroles dans nos bouches protestantes. D'une part, nous ne parlons pas « d'Eglise catholique », comme dans la version de Rome, mais d'Eglise universelle. En fait, c'est la même chose, puisque catholicos en grec veut dire universel.
Là où il y a une vraie différence, une nuance significative en tout cas, est que dans les paroisses catholiques romaines on va dire « je crois à (ou 'en') la sainte Eglise catholique ». Nous, c'est « je crois la Sainte Eglise universelle ». Cela me semble préférable.
En effet, il y a un risque dans la première formule (indirecte) de laisser penser qu'on doit croire en l'Eglise comme on croit en Jésus-Christ. Ce n'est pas vrai. L'Eglise n'esst pas une quatrième personne de la Trinité.L'Eglise ne nous sauve pas. l'Eglise n'est pas divine à proprement parler.L'Eglise n'a pas de parole propre à apporter. L'Eglise peut se tromper. L'Eglise joue un rôle fondamental dans le plan de Dieu, mais attention à ne pas lui attribuer plus que ce qui lui a été confié!!

D'ailleurs, notre forme du troisième article me semble plus exigeante. Si je crois en l'Eglise, cela veut dire aussi que je peux me reposer totalement sur elle pour me dire ce que je dois faire ou penser. Facilité de tous les traditionalismes, qui attireront toujours les esprits faibles. Par contre, si « je crois la sainte Eglise universelle », c'est déjà plus dur. En effet, cela veut dire que, malgré toutes ses erreurs, ses crimes, ses lâchetés et ses compromissions, je vois l'Eglise comme étant sainte.
Cela veut dire que malgré toutes ses divisions, ses querelles, ses déchirements, ses incapacités à présenter au monde le visage d'un nouveau peuple, je vois l'Eglise comme étant universelle.
Alors, oui, malgré les inquiétudes, les découragements, je crois que le Dieu trinitaire, Père, Fils et Saint-Esprit continue à construire son Eglise, qui est sainte, comme nous le sommes tous.

Car, oui, frères et soeurs, vous êtes des saints. Là aussi, si j'avais eu 100€ à chaque fois que j'ai entendu « je pensais que les protestants ne croyaient pas aux saints », je serais plus riche. Et pourtant nous croyons en la « communion des saints ». La clé du problème, vous vous en doutez, est dans la définition de la sainteté. Il n'est pas bibliquement possible d'accepter la notion selon laquelle certains chrétiens, de par leurs mérites, auraient atteint un niveau spirituel supérieur qui leur permettraient notamment, après leur mort, d'intercéder plus efficacement pour nous auprès du Père.
En revanche, la Bible affirme clairement que les chrétiens (et l'Eglise qu'ils composent sont saints). Ca ne veut pas dire que nous que nous sommes parfaits, ou même meilleurs que les autres, surement pas.
En fait, le mot grec qui a été traduit par « saint » est hagios, qui veut dire « différent », « mis à part ».
Nous sommes saints si nous croyons en Jésus-Christ, parce que Dieu nous a mis à part. Au début de sa Lettre aux Romains, Paul salut ses frères en Christ comme « saints par appel » (NBS, TOB). Et non pas, comme cela se trouve dans d'autres versions « appelés à être saints ». Vous voyez bien que les deux traductions n'ont pas le même sens: d'un côté, l'appel à devenir saint (sans doute par nos efforts, nos jeûnes ou l'on ne sait quoi ); de l'autre la déclaration que nous sommes déjà saints parce que Dieu nous a choisis pour nous mettre à part.
Mais mis à part pour quoi?
Jésus « a aimé l'Église et s'est livré lui-même pour elle, 26afin de la sanctifier après l'avoir purifiée par l'eau et la parole, 27pour faire paraître devant lui cette Église glorieuse, sans tache, ni ride, ni rien de semblable, mais sainte et sans défaut. » (Ephésiens 5.27).
Ainsi, aux yeux de Christ, l'Eglise est sans tache, et il lui confie une tâche.

Cette tâche, c'est d'être simplement elle-même. Trop souvent, nous insistons sur que l'Eglise doit (ou devrait) faire: évangélisation, implication sociale, etc, etc... Mais en tant que chrétiens ce que nos actions doivent avant tout être le reflet de notre identité, ce que nous faisons doit venir de ce que nous sommes.
L'Eglise est communauté dans un monde où l'individualisme règne en maître, elle est lieu d'amour et de partage dans un monde où la dureté est la règle, elle est lieu de parole libre et claire dans une société qui ne tolère que les discours conformistes et empesés. L'Eglise se doit de s'incarner dans un lieu. Nous sommes, par exemple, l'Eglise Luthérienne en Poitou. En Poitou: pas en Alsace, pas à Paris, pas en Inde ou dans le Colorado. Ce n'est pas parce que l'Eglise est universelle qu'il faut oublier que sa manifestation pratique sera toujours locale. Etre chrétien ici et maintenant nous confronte à des défis, des interrogations, qui ne seront pas nécessairement les mêmes que ceux de nos frères et soeurs en Christ ailleurs en France et dans le monde.

A tout cela, nous pouvons faire face avec la certitude absolue de l'amour de Dieu pour nous, pour cette paroisse. Jésus aime la paroisse Saint-Paul de Prailles-Beaussais! Il l'aime avec ses membres et son pasteur, malgré ses membres et son pasteur parfois! Et notre église n'est sainte que parce que Jésus l'aime. Individuellement, collectivement, nous allons sans doute faillir, mais l'amour de Christ pour son Eglise, lui ne faillira jamais. Et c'est là que l'on voit que l'Eglise n'existe pas simplement parce qu'il fallait bien que Dieu trouve un moyen de faire passer son message et que tant qu'à faire, cette solution n'était pas plus bête qu'une autre. Non; on ne se marie pas simplement parce qu'il faut bien trouver quelqu'un pour aider à faire la vaisselle et avec qui faire des enfants. On se marie parce qu'on rencontré quelqu'un que l'on aime et avec lequel on veut partager sa vie. La mission de l'Eglise est importante, vitale pour le monde, mais elle vient toujours après le motif principal de son existence: l'amour de Dieu pour elle.

Alors, puisque nous sommes saint par appel, sachons nous réjouir de cet appel.
Si nous oeuvrons pour Dieu dans notre paroisse, que ce ne soit pas par obligation ou légalisme, mais dans la joie et la paix que nous donne l'assurance que Dieu nous a appelés, qu'il nous a choisis, qu'ils nous a aimés. Nous aussi, à notre tour, aimons l'église où il nous a placés, ainsi que tous ceux auprès desquels nous sommes appelés à être témoins de la grâce de Dieu.

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