dimanche 13 octobre 2013

2 ROIS 5.1-14

Naaman, le chef de l'armée du roi de Syrie, jouissait de la faveur et de l'estime de son seigneur, car c'était par lui que l'Eternel avait donné la victoire aux Syriens. Toutefois, cet homme fort et vaillant était lépreux.
2 Or, les Syriens avaient mené des expéditions, et ils avaient ramené prisonnière une petite fille du pays d'Israël. Celle-ci était au service de la femme de Naaman,
3 et elle dit à sa maîtresse: «Si seulement mon seigneur pouvait voir le prophète qui se trouve à Samarie, il le guérirait de sa lèpre!»
4 Naaman alla dire à son seigneur: «La jeune fille du pays d'Israël a parlé de telle et telle manière.» 5 Le roi de Syrie dit: «Vas-y, rends-toi à Samarie. Je vais envoyer une lettre au roi d'Israël.» Naaman partit, prenant avec lui 300 kilos d'argent, 70 d'or et 10 habits de rechange,
6 et il apporta la lettre au roi d'Israël. Celle-ci disait: «Maintenant que cette lettre t'est parvenue, tu sais que je t'envoie Naaman, mon serviteur, afin que tu le guérisses de sa lèpre.»

7 Après avoir lu la lettre, le roi d'Israël déchira ses habits et dit: «Suis-je Dieu, pour faire mourir et pour faire vivre? En effet, il s'adresse à moi afin que je guérisse un homme de sa lèpre! Sachez-le donc et comprenez-le: il cherche une occasion de dispute avec moi.»
8 Lorsque Elisée, l'homme de Dieu, apprit que le roi d'Israël avait déchiré ses habits, il fit dire au roi: «Pourquoi as-tu déchiré tes habits? Fais-le venir vers moi et il saura qu'il y a un prophète en Israël.» 9 Naaman vint avec ses chevaux et son char, et il s'arrêta à la porte de la maison d'Elisée. 10 Elisée lui fit dire par un messager: «Va te laver 7 fois dans le Jourdain. Ta chair deviendra saine et tu seras pur.»
11 Naaman fut indigné et il s'en alla en disant: «Je me disais: 'Il sortira en personne vers moi, il fera appel au nom de l'Eternel, son Dieu, il fera un mouvement de la main sur l'endroit malade et guérira ma lèpre.'
12 Les fleuves de Damas, l'Abana et le Parpar, ne valent-ils pas mieux que tous les cours d'eau d'Israël? Ne pourrais-je pas m'y laver pour devenir pur?» Il tourna le dos, et il partait plein de colère 13 lorsque ses serviteurs s'approchèrent de lui pour lui parler. Ils dirent: «Mon père, si le prophète t'avait demandé quelque chose de difficile, ne l'aurais-tu pas fait? Tu dois d'autant plus volontiers faire ce qu'il t'a dit: 'Lave-toi et tu seras pur!'»
14 Il descendit alors se plonger 7 fois dans le Jourdain, conformément à la parole de l'homme de Dieu. Sa chair redevint comme celle d'un jeune enfant et il fut pur. 

Naaman. C'est un chef de guerre, un stratège reconnu, un des proches du Roi de Syrie, qui est alors un des hommes les plus puissants de la région. Comme nous allons le voir, Naaman est aussi riche. Très riche. Mais il y a autre chose dans la vie de Naaman. Il est lépreux. Regardez bien Naaman. Remarquez, ce n'est guère compliqué de le regarder: Presque tout notre texte est centre sur son histoire.
Il y a en revanche un autre personnage, très important, qui demeure très discret. C'est la petite fille qui est au service de l'épouse du stratège. On peut difficilement imaginer un fossé plus grand que celui qui sépare ces deux êtres.

Il est un homme puissant. Elle n'est qu'une petite fille.
Il est général en chef d'une armée victorieuse. Elle n'est qu'une prisonnière de guerre.
Il a la puissance. Elle n'est qu'une esclave.
Lui connaît la gloire tandis que nous ne connaissons même pas son nom à elle.
Il est un homme dur. Elle est un être plein de compassion, qui ne voit pas en Naaman un ennemi mais un humain qui souffre et auquel elle peut montrer le chemin de la guérison.
Il a tout : le pouvoir politique, l'argent, l'influence, le prestige. Elle n'a rien, à part une chose: son témoignage "il y a un prophète en Samarie qui peut guérir mon maître".

Et c'est bien ce dernier point qui donne sa force à notre histoire. C'est l'initiative de la petite fille et son témoignage qui vont mener Naaman vers la guérison. Mais le voyage vers la guérison sera long pour Naaman. Ce voyage, ce n'est pas seulement celui qui mène de la Syrie au seuil d’Élisée via le palais du roi d'Israël. C'est un voyage entre deux mondes totalement différents, dont Naaman et l'enfant sont justement les symboles.
Naaman quitte son pays, mais il ne quitte pas son monde. Dans ce monde là, la puissance (et notamment la puissance de l'argent) permet tout. Il part Naaman, avec ses luxueux vêtements; son or et son argent (l'équivalent de dizaines de millions d'Euros actuels), son influence qui lui permet d'être reçu par un roi. Et c'est bien sur tout cela qu'il compte pour se tirer d'affaire.

Mais Elisée, le prophète de Dieu, le serviteur de l'Eternel n'est pas affolé par tout cela. Le général syrien peut être reçu par le roi d'Israël immédiatement, mais le prophète ne veut même pas le rencontrer. Tout ce qu'il a à dire, c'est « Va te laver sept fois dans le Jourdain et tu seras complètement purifié. »
Le statut de Naaman et sa façon de faire n'impressionnent pas Élisée. Pour lui, Naaman n'est qu'un autre lépreux parmi d'autres. La maladie, comme la mort, rend les hommes égaux. Naaman, bien sûr, est outragé. Il veut que sa guérison soit quelque chose qu'il peut gagner comme une nouvelle bataille, quelque chose qu'il peut se payer. Mais Élisée reste de marbre "va au Jourdain". Naaman, quitte ton monde pour entrer dans celui de Dieu, ce monde où cette rivière sale qu'est le Jourdain deviendra pour toi le fleuve de vie. C'est dans ce monde de Dieu que les puissant tombent de leurs trônes et où les humbles de cœur hériteront la terre!

Vous voyez, c'est là que se tient le cœur de notre histoire. Ce n'est pas un autre récit d'un lépreux guéri. C'est la rencontre, la collision de deux mondes. Le monde de la puissance humaine de Naaman, et le monde de la puissance de Dieu, cette puissance qui se manifeste par l'intermédiaire de moins que rien comme la petite fille et Élisée

Nous aussi, nous sommes pris dans ce conflit entre deux mondes. Le monde de la force, des gagnants, le monde où, si l'on veut quelque chose, il faut pouvoir y mettre le prix. Et le monde de Dieu, son Royaume, qui fonctionne selon l'étalon de la grâce et qui bannit toute notion de mérite. Ce que nous rappelle ce récit, c'est que le péché nous rend tous lépreux, et cette lèpre spirituelle est mille fois pire encore que la lèpre physique.. Mais nous n'avons pas besoin d'aller chercher à acheter le pardon, avec à la main les lingots dévalués de nos bonnes œuvres. Le pardon, Dieu nous le donne gratuitement car, comme le dit l'apôtre Jean
« le sang de Jésus son Fils nous purifie de tout péché » (1 Jean 1.7). Pour cela, il suffit de croire au sacrifice expiatoire de Jésus-Christ, tout comme Naaman n'a eu qu'à se plonger dans l'eau du Jourdain.

Il y a dans le texte hébreu un jeu de mots que nos traductions essaient de rendre. Quand il est dit que la chair de Naaman redevient saine comme celle d'un jeune enfant, le terme pour "jeune enfant" est très proche de celui qui veut dire…"petite fille". Ici, l'auteur, malicieusement veut nous faire comprendre que Naaman a dû devenir comme la petite fille. Pour nous cela évoqué bien sûr ces paroles de Jésus en Matthieu "Je vous le dis en vérité, si vous ne vous convertissez et si vous ne devenez pas comme des petits enfants, vous n'entrerez pas dans le Royaume des Cieux" (Mt 18.3) car "le Royaume des Cieux est pour ceux qui leur ressemblent". Oui, pour entrer dans le Royaume des Cieux il faut avoir cette simplicité, cette humilité, cette certitude de l'amour paternel et aussi cette vulnérabilité qui caractérise les enfants.
Alors, retournons vers cette petite fille, et demandons-nous si elle peut représenter quelque chose pour l’Église dans nos pays. Je crois que oui.

A première vue, de nouveau, nous n'avons qu'une enfant sans puissance exilée dans un pays étranger où l'on ne respecte pas son Dieu. Mais regardons y à deux fois. L'enfant n'est pas sans puissance. Elle a la force de son témoignage tranquille, un témoignage rendu à un Dieu qu'elle connaît personnellement et qui est capable de mettre à bas le monde si sûr de lui d'un Naaman.

Et pour nous chrétiens, citoyens du Royaume des cieux, c'est la même chose: nous vivons dans ce monde qui n'est pas vraiment notre pays, dans une société qui chaque jour rejette de plus en plus la Parole de Dieu . Il est loin le temps où l’Église pouvait se vêtir des beaux vêtements de son influence dans la société et parader avec sa richesse financière. Il faut accepter le fait que l’Église aujourd'hui est, d'un point de vue humain, insignifiante et pauvre. Et non seulement cela, mais elle doit aussi vivre dans une société qui lui est de plu en plus hostile, une société qui s'enfonce toujours plus dans une apostasie assumée (pensons notamment à ce qui s'est passé récemment lors du renouvellement des membres du Conseil National d'Ethique : tous les représentants des églises chrétiennes ont été remplacés. Peut-être parce que sur certains sujets, ils auraient pris des positions contraires à celles de certains groupes de pression ? En tout cas, les chrétiens n'ont plus voix au chapitre dans une institution sensée être composée des « différentes familles spirituelles et philosophiques de la nation »!! et pensons aussi au travail du dimanche!). De cela aussi, il faudra bien tirer les conclusions pour la vie de nos communautés et surtout pour nos propres vies de chrétiens : les temps sont mauvais, frères et soeurs ! Mais cette "pauvrette église" comme le disait Jean Calvin peut comme la petite fille louer son Dieu et lui rester fidèle en témoignant de la force de son amour. C'est la seule chose qui nous est demandée, c'est la seule qui doit compter pour nous, et c'est Dieu qui y veillera, car il nous a dit "ma grâce te suffit, car ma puissance s'accomplit dans la faiblesse" (2 Co 12.9).

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